RIYAD: Le planchiste saoudien Shareef Masarani est assis au deuxième étage de LocoSonix, un magasin de skate de Riyad. Une jeune fille s'approche de lui. Elle arrive à peine à dissimuler sa timidité et son émotion en lui présentant une planche qu'elle a choisie dans le magasin.
«Je voudrais vous poser une question: je pense acheter cette planche. Qu'est-ce que vous en pensez?» Pour son tout premier skateboard, elle tient à avoir un avis. C’est sur Instagram Live qu’elle a vu qu’il était disponible dans cette boutique.
«La marque Hydroponic est un bon choix pour ton premier skateboard», lui répond-il.
Après l'avoir identifié un jour sur Instagram, elle l'a aperçu au skatepark qui se situe sur le boulevard de Riyad. Cette coïncidence l'a encouragée à faire du skateboard pour la première fois.
Shareef Masarani, lui, pratique ce sport depuis près de vingt ans. C'est à l'âge de 15 ans qu'il a commencé. Il a abandonné son métier de chef cuisinier pour consacrer son temps à faire grossir la communauté des skateurs d’Arabie saoudite. Avec sa communauté de onze planchistes, les Sandlifers, il s'est imposé comme une référence dans ce domaine pour de nombreux skateurs en herbe.
Si le skateboard n'était pour lui qu'un passe-temps lorsqu'il vivait aux États-Unis, Masarani est aujourd'hui devenu un spécialiste de l'apprentissage du skate. Il collabore d'ailleurs avec de grandes marques telles que Vans et Mountain Dew.
Un jour, il reçoit un appel de la mère de l’une de ses jeunes clientes. Elle voulait le remercier pour le travail qu'il avait accompli: les compétences de sa fille se sont nettement améliorées. Mais, plus important encore, elle est devenue une personne plus extravertie et plus sûre d'elle.
«Sa personnalité a évolué. Elle était d’un tempérament plutôt renfermé, elle ne parlait à personne. Elle communique aujourd’hui avec sa famille. Le skateboard influence les gens, il produit réellement cet effet», explique M. Masarani à Arab News.
«Lorsque vous apprenez une nouvelle figure, vous parvenez à faire des choses qui vous paraissaient impossibles à faire», ajoute-t-il. «J'ai vu ce que cela m'a fait, et j’ai voulu transmettre cette expérience ici, au Moyen-Orient», poursuit-il.
L’une des clientes de Shareef Masarani, Reef Khaled Hassan, âgée de 15 ans, raconte de quelle manière l'entraînement qu'elle a suivi lui a permis de réussir les figures auxquelles elle aspirait. Le soutien que Shareef lui a apporté l'a encouragée à aller de l'avant.
«Depuis que je l'ai rencontré, il me répétait que je pouvais réussir... Shareef m'a aussi aidée à comprendre le fonctionnement du skateboard, à maîtriser plusieurs figures et il m’a appris à réfléchir», confie-t-elle à Arab News.
«Tu dois savoir quand foncer et quand ralentir», lui a-t-il notamment expliqué au cours d'une séance.
Reef a appris le skate toute seule il y a quelques mois. Selon Shareef Masarani, elle fait partie des jeunes étoiles montantes de la scène de Riyad.
«J'avais besoin d'un coup de main pour réaliser quelques figures, il y a quelques mois. Je me suis donc inscrite à un entraînement d’un mois et cela m'a beaucoup aidée», confie-t-elle.
Les virages et les ollies (sauts effectués avec la planche, NDLR) sont les deux premières figures qu'elle a réalisées. «Je me sentais bien. J'ai passé un temps fou à essayer avant d'y arriver... J'attends avec impatience le moment où je fais du skate, car j'apprends de nouvelles figures tous les jours», indique-t-elle.
Le skate n'a pas toujours été aussi populaire en Arabie saoudite. Shareef Masarani explique que, jusqu'en 2020, seules quelques personnes faisaient du skate. Parmi elles figuraient le groupe Sandlifers ainsi que des résidents philippins qui avaient importé cette activité de leur pays.
Cette année-là, le skatepark d'Al-Nakhil a ouvert ses portes au public. D'autres sites sont apparus ensuite, comme le club privé de Diriyah et le skatepark du boulevard Riyad. Ce dernier est spécialement conçu pour cette activité et propose des équipements sur place à la location.
Au fur et à mesure que le nombre de ses abonnés augmente sur Instagram, Shareef se sert de cette plate-forme comme d'un outil d'apprentissage pour transmettre ses connaissances aux autres. À travers la fonction «live» de l'application, il répond aux questions que les internautes se posent sur ce sport. Il lui arrive aussi d’expliquer quels produits LocoSonix sont les plus adaptés à vos besoins.
«Je veux que les gens me surpassent. C’est mon objectif!», lance-t-il.
Partenaire du magasin LocoSonix, le seul magasin de skate spécialisé du Royaume, Shareef Masarani présente souvent les nouveautés de l'enseigne. Ce magasin animé ressemble un peu à une galerie d'art.
«Ce sport présente un potentiel extraordinaire dans la mesure où il est de plus en plus intégré à la culture saoudienne», explique à Arab News Safi Marroun, le fondateur de LocoSonix.
«Dès l'instant où vous apprenez à vous tenir en équilibre sur une planche et que vous vous baladez sur votre skate, vous découvrez un nouveau mode de vie. LocoSonix rassemble à la fois les artistes, les planchistes professionnels et les personnes qui souhaitent s'amuser en roulant sur des skates».
En outre, LocoSonix a pour projet de créer des skateparks en 2023 afin de promouvoir ce sport.
Le Comité international olympique a intégré le skateboard au programme des Jeux olympiques d'été de 2020 à Tokyo.
Au Royaume, la Fédération saoudienne des sports extrêmes a organisé deux camps d'entraînement dédiés au skateboard à Riyad. Ils ont réuni cent onze amateurs. Elle a également organisé la première compétition de roller agressif et de skateboard. Cette compétition, qui durait deux jours, a accueilli trente-huit participants, femmes et hommes.
«La communauté du skateboard se développera si les gens continuent à faire ce qu'ils font. Comme pour toute activité, s'ils confirment leur engagement, elle prendra de l'ampleur, c'est certain», se félicite M. Masarani.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com