CARHAIX-PLOUGUER : Bruce Springsteen qui harangue son public en breton, Muse qui chante en K-way sous des seaux de pluie... Depuis 30 ans, les Vieilles Charrues font vibrer la Bretagne de l'intérieur, devenant l'un des plus gros festivals de France.
Pour sa 30ème édition, du 14 au 17 juillet, le festival revient à sa jauge habituelle après deux années perturbées par le Covid, sur le thème "Back to the 90's" (Retour aux années 90), avec les Belges Angèle et Stromae, la Française Clara Luciani ou les Australiens de Midnight Oil entre autres têtes d'affiche.
Ça ne devait être qu'une "petite fête entre potes" pour célébrer la fin de l'année universitaire. En 1992, une dizaine d'étudiants attirent 500 convives près de Carhaix en Bretagne, à la pointe ouest de la France, pour une kermesse "sans prétention musicale", avec "grillade de bison" et "lancer de botte".
Mais l'équipe s'est "faite bluffer par un public toujours plus nombreux", jusqu'à atteindre 280 000 entrées en quatre jours, raconte Jean-Luc Martin, président bénévole du festival, qui ambitionne de "faire rêver les gens chez eux".
"Cela montre que notre petit pays de Centre-Bretagne, qui connaissait des difficultés économiques, une baisse démographique, sans TGV, sans 2x2 voies, sans aéroport, a su relever un immense défi grâce à l'énergie de sa population locale", observe le maire de Carhaix, Christian Troadec, cofondateur et président d'honneur des Charrues.
Festival associatif sans subventions publiques, les Vieilles Charrues ne pourraient pas fonctionner sans les bénévoles, qui représentent aujourd'hui 7.150 personnes.
Le gigantisme de l'événement parle de lui-même: 100 ha de terrains, 18 millions d'euros de budget, 35.000 campeurs par jour, 17,5 km de saucisses et 39.512 kebabs vendus par édition...
"C'est un petit miracle breton, une Bretagne rurale dont on est fiers", commente Loïg Chesnais-Girard, le président de la région Bretagne.
Blague de potache au départ, le nom "Vieilles Charrues" est un pied de nez aux "Fêtes maritimes de Brest", lancées la même année, en réaction à des médias "uniquement focalisés sur ce qui se passe sur la côte". Chaque année, le coup d'envoi est donné par un "tirer de charrues" pour "tracer le sillon de la nouvelle édition".
France: retour en fanfare des Vieilles Charrues pour leurs 30 ans
Les Belges Stromae et Angèle, la Française Clara Luciani, les Australiens de Midnight Oil... Après deux années en sourdine pour cause de crise sanitaire, les Vieilles Charrues reviennent en force.
Le festival breton, à Carhaix dans l'ouest de la France, revient à sa jauge habituelle de 70 000 entrées par jour qui en fait l'un des plus fréquentés de l'Hexagone. Avec comme thème pour sa 30ème édition "Back to the 90's", un clin d'oeil à ses origines.
Côté pop et chanson, on retrouve Clara Luciani, Angèle, Stromae, -M-, Vianney, Juliette Armanet, Aloïse Sauvage, Mansfield.TYA, Vendredi sur mer, ou encore le jeune groupe pop breton La Battue. Les Têtes Raides, qui reviennent avec "Bing Bang Boum", et Midnight Oil, remplacent Maxime Le Forestier et Queens of the Stone Age, qui ont annulé.
Vitalic, Contrefaçon, Thylacine, DJ Snake, Bob Sinclar B2b Pedro Winter ou encore Meute et NTO représenteront la scène électro.
Au rayon rap, sont programmés Orelsan, Laeti, de la série "Validé", Lujipeka, Rilès et Ninho, et pour le rock, les Irlandais Fontaines D.C., sacrés "meilleur groupe au monde" par le magazine britannique New Musical Express, ainsi que Matmatah, Lulu Van Trapp, Feu! Chatterton ou Izïa.
La chanteuse belgo-congolaise Lous and the Yakuza, ou encore Celeste seront également sur scène.
"On est très fiers de fêter nos 30 ans avec toujours autant de têtes d'affiche et de nouveaux talents. Ça nous amuse toujours de voir sur les affiches les noms d'artistes de renom faire Berlin, Londres, Milan et ... Carhaix qu'on sait maintenant situer sur la carte", se félicité auprès de l'AFP le directeur général du festival, Jérôme Tréhorel.
Particularité cette année, 400 drones s'élèveront dans le ciel chaque soir aux alentours de minuit pour une chorégraphie assortie de jeux de lumière et d'une bande sonore, afin de célébrer les 30 ans du festival, ont annoncé les organisateurs.
Annulé en 2020 en raison de la pandémie de Covid, le festival s'est tenu en 2021 sous une forme restreinte avec une jauge maximum de 5 000 personnes pour chacune des dix soirées organisées. En 2019, l'événement avait fait 270 000 entrées sur quatre jours.
James Brown ramené d'urgence en taxi
Parmi les anecdotes, le programmateur Jean-Jacques Toux, autre cofondateur, se souvient des sueurs froides qu'il a eues lorsqu'en 1997 James Brown, première grosse tête d'affiche, "oublie" son concert à Carhaix. Il est alors "ramené d'urgence en taxi" depuis Deauville, où il devait se produire plus tard.
Jean-Luc Martin se souvient lui de l'année où il avait commandé "4,5 tonnes d'huîtres", qu'il a dû "mettre à la poubelle" après avoir constaté qu'elles avaient tourné.
Une année, faute de pain un dimanche, il a dû aller lui-même "enfourner des miches dans une boulangerie pour satisfaire des dizaines de milliers de festivaliers en manque de sandwich".
"C'est le système D, mais on a consigné toutes nos erreurs dans des fiches techniques", rassure-t-il.
Côté artistes, le festival a fini par créer une "équipe dédiée" aux demandes les plus farfelues. Chips bio mexicaines, eau minérale fidjienne...
Parmi les souvenirs amers, celui de Bob Dylan, qui "au dernier moment, nous oblige à démonter l'arrière scène pour faire rentrer son bus au pied de l'escalier, arrive sans saluer personne et repart de même", se rappelle Jean-Luc Martin.
Que dire encore de Johnny Hallyday, arrivé en jet privé à Quimper, puis en hélicoptère sur le stade de foot de Carhaix, pour finir le dernier kilomètre en Hummer, sous les sirènes des gendarmes?
"Ça fait 30 ans, mais dans nos têtes on en a toujours 20", assure Jérôme Tréhorel, le directeur général, qui se dit "paré pour les 30 prochaines années".