Les États-Unis doivent surtout mettre l’accent sur les causes des crimes commis avec des armes à feu

Le jour où les Américains ont célébré la naissance de leur nation, de sa démocratie et de ses libertés, un tireur a tué sept civils et en a blessé plus de 40 autres en attaquant un défilé dans l'une des banlieues les plus riches de l'Illinois, Highland Park.

Cette violence est immédiatement devenue le cœur d'un débat national sur la question de l'arme que le tireur a utilisée pour commettre les meurtres, plutôt que sur ses motivations.

Les Démocrates réclament des lois plus strictes sur le contrôle des armes à feu, tandis que les Républicains insistent sur le fait que le contrôle des armes n'est pas la solution. Les lois sur les armes à feu empêchent les citoyens respectueux de la loi de posséder des armes, mais les tueurs qui utilisent ces armes ne sont pas du tout respectueux de la loi, affirment les Républicains.

Le débat se corse lorsqu'il est question de la race du tireur et la plupart des gens essaient d'éviter de pointer du doigt les problèmes de pauvreté et de colère raciale comme étant à l’origine de la violence. La plupart des minorités vivent dans des zones urbaines dominées par les Démocrates et non dans des zones dominées par les Républicains. La violence dans les zones contrôlées par les Républicains est généralement liée à la pauvreté.

Ces questions sont difficiles à aborder et quiconque les soulève est souvent taxé de « raciste ». Du coup on se concentre plutôt sur le contrôle des armes à feu.

Mais le débat sur le contrôle des armes à feu n'est-il qu'une distraction pour éviter une discussion sur des questions plus épineuses, comme la pauvreté, la race et même l'idéologie ? La population de Chicago est composée à 66 % de noirs et d'hispaniques, dont beaucoup sont pauvres, mais le simple fait de faire allusion à ces discussions peut susciter des accusations de racisme.

Les Américains disent qu'ils ne veulent pas de stéréotypes lorsqu'ils abordent la question de la violence en Amérique. Mais ils n'ont aucun problème avec les stéréotypes lorsque la violence se déroule dans des pays étrangers, où ils insistent sur le fait qu'elle est la conséquence d'idéologies politiques ou religieuses extrémistes. Ils cataloguent facilement les musulmans et les Arabes lorsque la violence se produit au Moyen-Orient.

La violence à Highland Park et dans de nombreux autres endroits - y compris la ville d'Uvalde, au Texas, où un adolescent armé a abattu 19 enfants et deux enseignants dans une école primaire en mai - impliquait des individus qui avaient clairement des problèmes psychologiques. Les questions de leur race ou de leur motivation ont été marginalisées alors que la possession d'armes à feu était mise en exergue.

La plupart tentent d'éviter d’attribuer les causes de la violence aux problèmes de pauvreté et de colère raciale.

Ray Hanania

Qu'en est-il de la responsabilité des parents à l'égard de leurs enfants ? Les parents du tireur d'Uvalde n'ont-ils pas reconnu les facteurs qui ont poussé leur enfant à commettre ce crime horrible ? Et quelle est leur responsabilité dans ses actes ?

Si Uvalde s'était trouvé ailleurs, et non au Texas, la question aurait porté sur l'éducation religieuse du tireur, son idéologie et l'environnement dans lequel il vivait. Ces questions sont mises de côté dans le débat américain sur le contrôle des armes à feu.

Uvalde n'est pas un cas exceptionnel de fusillade dans une école américaine, malheureusement. C'était la 27e fusillade à avoir lieu dans une école aux États-Unis en 2022. Et c'était la 212e fusillade de masse dans l’ensemble du pays.

À Chicago, le taux d'homicide continue de grimper. L'année dernière a été la plus meurtrière pour les fusillades en un quart de siècle, avec 797 homicides, soit 25 de plus qu'en 2020 et 299 de plus qu'en 2019. Il y a eu 3 561 fusillades en 2021, soit 300 de plus que l'année précédente et 1 415 de plus qu'en 2019.

La maire de Chicago, Lori Lightfoot, insiste sur le fait que le problème est le contrôle des armes à feu, bien que la ville ait la quatrième loi la plus stricte du pays en matière de possession d'armes à feu, seulement derrière New York, Philadelphie et Baltimore - municipalités contrôlées par les Démocrates.

L’année dernière, Adam Toledo, 13 ans, un enfant hispanique, se trouvait avec un membre connu d'un gang dans le West Side de Chicago à 2h30 du matin lorsque la police l'a poursuivi et l'a abattu. Le débat s'est concentré sur la question de savoir si Toledo portait une arme lorsque l'agent l'a abattu, comme l'a affirmé la police, ou s'il l'avait lâchée, comme l'ont affirmé les militants anti-police. Personne ne s'est demandé pourquoi un enfant de 13 ans était sorti de chez lui au milieu de la nuit, bien après le couvre-feu pour mineurs, ni quelle responsabilité devait peser sur les épaules de ses parents.

Quoi qu'il arrive à la suite de la fusillade de Highland Park, l'attention ne se portera pas sur le tueur présumé parce qu'il n'est pas du Moyen-Orient. La police a décrit le suspect comme « un homme, blanc, âgé de 18 à 20 ans ». S'il avait été originaire du Moyen-Orient, la question ne serait pas celle des armes ou du contrôle des armes, mais celle de la race, du racisme et des stéréotypes. C'est la véritable tragédie de la guerre contre le crime en Amérique.

- Ray Hanania est un ancien journaliste politique et chroniqueur primé de la mairie de Chicago. Vous pouvez le joindre sur son site Web personnel à l'adresse www.Hanania.com.

Twitter : @RayHanania

NDLR : L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.