En Syrie, le monastère de Mar Moussa espère sortir de son isolement

En 2010, 30 000 personnes ont visité Mar Moussa l'Éthiopien, un monastère du VIIe siècle perché au sommet d'une colline rocheuse à environ 100 km au nord de Damas (Photo, AFP).
En 2010, 30 000 personnes ont visité Mar Moussa l'Éthiopien, un monastère du VIIe siècle perché au sommet d'une colline rocheuse à environ 100 km au nord de Damas (Photo, AFP).
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Publié le Lundi 20 juin 2022

En Syrie, le monastère de Mar Moussa espère sortir de son isolement

  • A une centaine de kilomètres au nord de Damas, le monastère de Saint-Moïse l'Abyssin (Deir Mar Moussa al-Habachi) était devenu à partir des années 90 un centre de dialogue islamo-chrétien
  • Construit sur plusieurs niveaux, le monastère possède parmi les plus anciennes fresques de l'Orient chrétieN

MAR MOUSSA : Niché au coeur de montagnes, le monastère de Mar Moussa, l'un des plus vieux de Syrie, a rouvert ses portes début juin et espère attirer de nouveau pèlerins et touristes après avoir été isolé des années en raison de la guerre.

A une centaine de kilomètres au nord de Damas, le monastère de Saint-Moïse l'Abyssin (Deir Mar Moussa al-Habachi) était devenu à partir des années 90 un centre de dialogue islamo-chrétien à l'initiative du père italien Paolo Dall'Oglio.

"Nous souhaitons que les gens reviennent, qu'ils prient et méditent dans ce lieu où ils trouveront peut-être un espace de calme, de silence et de contemplation", explique à l'AFP le père abbé Jihad Youssef.

Construit sur plusieurs niveaux, le monastère possède parmi les plus anciennes fresques de l'Orient chrétien. Il comporte également une église qui date du 11e siècle et des inscriptions murales à connotation musulmanes et chrétiennes en arabe, syriaque et grec.

Après le début de la guerre en 2011, déclenchée avec la répression par le régime de manifestations prodémocratie, le monastère n'a pas subi de dégâts matériels mais la disparition du père Paolo en 2013 dans une zone tenue par les jihadistes lui a porté un coup dur.

Dialogue interreligieux

En 2010, 30 000 personnes avaient visité le site.

Aujourd'hui, seules quelques personnes, dont deux moines et une bonne-sœur, vivent au monastère, doté de plusieurs chambres d'hôtes, une grande bibliothèque et une oisellerie. Elles vivent en autosuffisance.

"Nous vivons dans un endroit simple et modeste. Il n'y a pas d'Internet ou de réseau téléphonique, c'est bien pour s'éloigner de la ville" et de son bruit, confie père Jihad.

Cette sérénité, le monastère l'avait perdue durant la guerre.

En 2013, des combats acharnés entre des groupes d'opposition et les forces gouvernementales ont éclaté dans la ville de Nabek, à 16 km du monastère. Ensuite, le groupe jihadiste Etat islamique (EI) a notamment contrôlé une région proche entre 2015 et 2017.

"Nous étions très inquiets (...) surtout après l'arrivée de l'EI dans deux villages voisins et l'enlèvement des habitants chrétiens" en 2015, se souvient père Jihad.

L'esprit de père Paolo Dall'Oglio souffle encore sur le site. C'est grâce à lui que ce monastère chrétien est devenu un symbole du dialogue interreligieux, avec son ouverture sur l'islam.

Figure incontournable de Mar Moussa, ce père jésuite avait été expulsé de Syrie en 2012 pour avoir soutenu le soulèvement contre le régime, mais y était revenu clandestinement un an plus tard.

Il a disparu à l'été 2013 à Raqa, ville du nord de la Syrie qui allait devenir quelques mois plus tard la "capitale" autoproclamée de l'EI dans ce pays, où il était allé plaider pour la libération des militants kidnappés.

«Souffler»

"L'EI l'a probablement enlevé. Et nous n'avons pas d'informations fiables pour dire s'il est vivant ou mort", indique père Jihad ajoutant qu'aucune demande de rançon n'avait été faite.

Avec la présence de l'EI non loin du monastère, "nous avons eu peur, nous avons été isolés, une situation qui a empêché les gens de nous rendre visite", poursuit-il.

L'EI a fini par être vaincu en 2019 mais ces deux dernières années, la pandémie du Covid-19 a encore retardé la réouverture du monastère, qui fait figure de site touristique dans de nombreux guides parus avant 2011.

Le monastère a finalement décidé de rouvrir ses portes début juin, en accueillant un petit groupe de visiteurs.

Situé dans une région désertique et difficile d'accès par la route, le lieu jouit d'une tranquillité absolue.

Youssef Al-Halabi, 48 ans, y est moine depuis 16 ans. Il ne cache pas son ennui toutes ces années, faute de visiteurs.

"Des fois, nous n'avions aucun visiteur de toute l'année", dit-il.

Après sa prière du matin, le moine à la barbe blanche a l'habitude de se rendre dans une grotte voisine pour fabriquer des bougies. Parfois, il travaille la terre.

Ce moine, qui a consacré sa vie à Dieu et au service des visiteurs de Mar Moussa, espère que touristes et fidèles vont y revenir.

"C'est un endroit pour souffler", dit-il.


Liban: quatre morts dans un raid israélien, riposte du Hezbollah et des factions alliées

Cette photo prise depuis le kibboutz de Malkia, au nord d'Israël, le long de la frontière avec le sud du Liban, montre de la fumée s'échappant du village libanais de Mays al-Jabal lors des bombardements israéliens le 5 mai 2024 (Photo, AFP).
Cette photo prise depuis le kibboutz de Malkia, au nord d'Israël, le long de la frontière avec le sud du Liban, montre de la fumée s'échappant du village libanais de Mays al-Jabal lors des bombardements israéliens le 5 mai 2024 (Photo, AFP).
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  • Les blessés ont été transportés vers des hôpitaux de la région
  • En près de sept mois de violences transfrontalières, au moins 389 personnes parmi lesquelles 255 combattants du Hezbollah et plus de 70 civils ont été tuées au Liban

BEYROUTH: «Quatre personnes d'une même famille» ont été tuées dans un «raid de l'armée israélienne» sur le village de Mays al-Jabal, a déclaré l'agence officielle d'information libanaise (ANI), actualisant un précédent bilan faisant état de trois victimes.

Il s'agit d'un homme, d'une femme et de leurs enfants âgés de 12 et 21 ans, d'après l'ANI, qui a précisé que deux autres personnes ont été blessées.

Depuis le début de la guerre à Gaza, le Hezbollah libanais, un allié du Hamas palestinien, échange quasi-quotidiennement avec l'armée israélienne des tirs à la frontière libano-israélienne. Des factions palestiniennes et autres groupes alliés ont aussi revendiqué des attaques depuis le Liban contre Israël.

Blessés transportés 

Selon ANI, des habitants du village inspectaient leurs maisons et magasins endommagés dans de précédents bombardements au moment du raid.

Les blessés ont été transportés vers des hôpitaux de la région.

Samedi soir, le Hezbollah a revendiqué des tirs sur des positions militaires dans le nord d'Israël.

Le Hezbollah a déclaré dans un communiqué avoir tiré « des dizaines de roquettes de types Katioucha et Falaq » sur Kiryat Shmona, dans le nord d'Israël, «en réponse au crime horrible que l'ennemi israélien a commis à Mays al-Jabal », qui, selon lui, a tué et blessé des civils.

En près de sept mois de violences transfrontalières, au moins 389 personnes parmi lesquelles 255 combattants du Hezbollah et plus de 70 civils ont été tuées au Liban, selon un décompte de l'AFP. Au moins 11 combattants du Hamas ont été tués selon ce même décompte.

Côté israélien, 11 soldats et neuf civils ont été tués, selon un bilan officiel.


Le forum de Riyad examine le rôle de la traduction dans la promotion de l'identité saoudienne

L'Université Princesse Noura bent Abdelrahman accueillera le 15 mai une conférence intitulée « Traduire l'identité saoudienne à travers d'autres langues et cultures ». (SPA)
L'Université Princesse Noura bent Abdelrahman accueillera le 15 mai une conférence intitulée « Traduire l'identité saoudienne à travers d'autres langues et cultures ». (SPA)
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  • La conférence vise à contribuer à un objectif clé de la Vision 2030 du Royaume, à savoir la promotion des valeurs islamiques et de l'identité nationale, en encourageant les Saoudiens à traduire ces concepts dans d'autres langues et cultures
  • Le rôle de la traduction dans la promotion d'une image positive du Royaume sera également discuté, ainsi que la promotion de la reconnaissance internationale et la mise en évidence de l'impact culturel du Royaume

RIYAD : Le Collège des langues de l'Université Princesse Noura bent Abdelrahman de Riyad accueillera le 15 mai une conférence intitulée « Traduire l'identité saoudienne à travers d'autres langues et cultures ».

L'événement, dont le slogan est « Nous traduisons notre identité », aura lieu au département des conférences et des séminaires et est parrainé par le ministre saoudien de l'Éducation, Yousef Al-Benyan.

Il se concentrera sur le partage du patrimoine culturel, historique, littéraire et intellectuel du Royaume avec un public mondial, a rapporté l'agence de presse saoudienne.


L'interminable attente des proches de jeunes migrants tunisiens perdus en mer

El Hencha fait actuellement face à un exode de jeunes en quête de mieux comme en Europe. (X : @ClimateActionG1)
El Hencha fait actuellement face à un exode de jeunes en quête de mieux comme en Europe. (X : @ClimateActionG1)
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  • Les occupants du bateau étaient surtout des jeunes de 17 à 30 ans, originaires d'El Hencha, bourgade agricole de 6.000 habitants
  • Inès Lafi n'avait aucune idée des intentions de son frère Mohamed, presque 30 ans

EL HENCHA: La plupart avaient gardé le secret: une quarantaine de migrants tunisiens, très jeunes, ont embarqué clandestinement en janvier en quête du "paradis européen" et depuis plus de quatre mois, leurs proches désespèrent de recevoir des nouvelles des disparus.

Ils sont partis vraisemblablement de Sfax (centre), épicentre en Tunisie de l'émigration irrégulière vers l'Italie, la nuit du 10 au 11 janvier sur une mer démontée, selon les familles.

Les occupants du bateau étaient surtout des jeunes de 17 à 30 ans, originaires d'El Hencha, bourgade agricole de 6.000 habitants à 40 kilomètres au nord de Sfax. Une mère et son bébé de quatre mois étaient aussi du voyage.

Inès Lafi n'avait aucune idée des intentions de son frère Mohamed, presque 30 ans, qui gagnait sa vie en conduisant la camionnette familiale de "louage" (taxi collectif).

"Il est sorti vers 22H00 avec son téléphone, sans rien dire à mes parents, sans vêtements de rechange ni sac, comme s'il allait retrouver ses amis", raconte à l'AFP cette ouvrière de 42 ans, qui souffre d'insomnies depuis.

Yousri, 22 ans, est aussi parti en cachette. "La majorité des jeunes n'ont pas informé leur famille, ils se sont débrouillés pour avoir un peu d'argent", confirme M. Henchi, son oncle instituteur.

Meftah Jalloul, poissonnier de 62 ans, savait lui "depuis un certain temps" que son fils Mohamed, 17 ans, "voulait migrer en Europe" et le lui avait déconseillé "mais c'est devenu une idée fixe".

La nuit fatidique, il a tenté d'empêcher son unique garçon de sortir, l'implorant d'attendre une meilleure météo, mais "il m'a embrassé sur la tête et il est parti", relate M. Jalloul.

«Désespérance»

Le commerçant culpabilise: "chaque jour, il créait des problèmes à la maison, il voulait de l'argent pour migrer. C'est moi qui lui ai donné l'argent, donc je suis responsable".

Les Tunisiens ont représenté la deuxième nationalité des migrants illégaux arrivés en Italie (17.304) en 2023, après les Guinéens, selon des statistiques officielles.

"Cette immigration irrégulière ne s'explique pas seulement par des motifs économiques et sociaux", analyse Romdhane Ben Amor, porte-parole de l'ONG FTDES. Il y a aussi "le facteur politique (le coup de force du président Kais Saied à l'été 2021, NDLR) et le sentiment de désespérance des Tunisiens qui ne croient pas dans l'avenir du pays".

Les disparus d'El Hencha, issus de la classe moyenne, pas particulièrement pauvres, partageaient cette "sensation d'horizon bouché".

Le frère d'Inès avait un travail mais "avec 20 dinars par jour (trois euros environ), une fois payé ses cigarettes, il disait qu'il ne pouvait pas faire de projets, ni construire une maison, ni se marier".

Mohamed l'instituteur pointe du doigt "les jeunes déjà en Italie qui publient sur les réseaux sociaux (...) leur quotidien". Les autres "voient ça et veulent changer leur avenir. Ils imaginent l'Europe comme un paradis", souligne-t-il. C'était, pense-t-il, le cas de Yousri qui travaillait dans un café internet pour 10/15 dinars par jour après avoir quitté le lycée avant le bac.

Meftah Jalloul était lui d'accord pour que son fils, également décrocheur scolaire, émigre, mais légalement et seulement après avoir fait une formation. "Il pouvait apprendre un métier: plombier, menuisier, mécanicien", souligne le père de famille.

Aujourd'hui, M. Jalloul lutte pour garder espoir.

«Temps très mauvais»

"Quatre mois se sont écoulés et je pleure mon fils. Ma famille et moi, nous sommes épuisés", dit-il en fondant en larmes.

Lui et d'autres familles se raccrochent à l'idée que l'embarcation aurait pu dériver vers la Libye voisine. Des contacts ont été pris, des recherches menées, en vain.

Inès Lafi et Mohamed Henchi redoutent le pire. Plus de 1.300 migrants sont morts ou ont disparu dans des naufrages l'an passé près des côtes tunisiennes, selon le FTDES.

"Le temps était très mauvais. Même les pêcheurs qui connaissent la mer sont rentrés, lui est sorti", explique Inès, furieuse contre le passeur, connu de tous pour son activité clandestine, qui n'est pas non plus revenu de cette dernière traversée.

Aux autorités, les familles demandent la poursuite des recherches et davantage d'opportunités à El Hencha.

"Il faut enrichir la zone industrielle avec d'autres unités de production, fournir des emplois aux jeunes", estime M. Henchi.

Il faudrait aussi, dit l'instituteur, "construire un état d'esprit différent" avec des programmes éducatifs pour donner envie de bâtir son avenir en Tunisie. Sinon les jeunes "se contentent d'un tour au café, d'un peu de ping-pong ou volley-ball".