S’il y a une région qui a suivi avec énormément d’intérêts la présidentielle française, c’est bien celle du Maghreb. Après l’Europe, c’est la zone qui aurait été la plus impactée par l’issue du scrutin. Le suspense a été à son comble, la tension à son zénith jusqu’au bout, pour savoir qui allait décrocher la palme: le président sortant ou l’icône de l’extrême droite?
Il existe une incontestable réalité diplomatique. Les capitales du Maghreb, à l’image de la totalité des pays de l’Union européenne (UE), ont poussé un râle de soulagement à l’annonce de la victoire d’Emmanuel Macron. Non pas qu’ils adhèrent à tous les choix diplomatiques du président français, mais parce que voir l’extrême droite prendre le pouvoir en France aurait été un vrai cauchemar.
La raison est simple. Si avec Macron, les choix diplomatiques et leurs enjeux sont identifiés, l’élection de Marine Le Pen aurait été un vrai saut dans l’inconnu. La présidente du Rassemblement national (RN) n’a en effet jamais abordé les relations internationales autrement que sous le prisme de l’immigration, de la culture de l’expulsion et de la xénophobie.
Au Maroc, malgré quelques fritures sur la ligne et des tensions sur certains dossiers, les attentes sont grandes. La France, qui a été un des premiers pays européens à soutenir l’option de l’autonomie du Sahara marocain proposée en 2007, s’est brusquement trouvée en décalage stratégique avec cette nouvelle donne.
Maintenant que Macron a été réélu, les capitales du Maghreb, certes rassurées, s’interrogent sur la séquence diplomatique du nouveau quinquennat et les possibles évolutions de la relation entre la France et le Maghreb.
Au Maroc, malgré quelques fritures sur la ligne et des tensions sur certains dossiers, les attentes sont grandes. La France, qui a été un des premiers pays européens à soutenir l’option de l’autonomie du Sahara marocain proposée en 2007, s’est brusquement trouvée en décalage stratégique avec cette nouvelle donne. Soit elle maintient le niveau de son soutien au Maroc et court le risque de paraître en décalage avec les accélérations de l’Histoire dans cette région, soit elle adapte son positionnement et doit procéder à la reconnaissance officielle de la souveraineté du Maroc sur Sahara. Autrement, l’axe Rabat/Paris court le risque d’un statu quo, nocif à la longue pour la qualité des relations historiques et stratégiques entre la France et le Maroc.
Pour réussir cet objectif, Paris doit sortir d’une situation qui a longtemps contraint son expression et limité sa marge de manœuvre. La diplomatie française subit depuis des années – et de plein fouet – la pression permanente et le chantage sournois des autorités algériennes. Ce chantage prend plusieurs formes économiques, sécuritaires.
Avec le mandat Macron II, la diplomatie française devrait se défaire de ces pressions et pouvoir imaginer une nouvelle approche. D’autant plus que le rapport de force a beaucoup changé. La capacité de nuisance du régime algérien s’est beaucoup dégonflée. Outre sa menace économique, qui a été démagnétisée, son isolement et sa perte de crédibilité en font un régime autoritaire à l’intérieur et édenté pour l’extérieur.
L’intérêt de Macron pour son second mandat est que le dialogue avec les pays du Maghreb sur des questions cruciales comme l’immigration soit fluide, que la lutte commune contre le danger terroriste soit plus efficace et la coopération économique plus fructueuse.
À l’égard de l’Algérie, Macron relancera à n’en pas douter son dialogue mémoriel avec ce pays. Libéré des affres d’un troisième mandat, il voudra marquer l’Histoire de son empreinte et rester dans les mémoires collectives comme l’homme qui a donné une accélération historique à ce chantier.
L’évolution de ces dossiers dépendront certes de la stratégie de la nouvelle administration française, mais aussi des futurs ministres chargés de la relation avec ces pays. À titre d’exemple, le froid qui a longtemps caractérisé les relations entre Paris et Rabat est en partie le fruit de la présence de deux importants ministres des Affaires étrangères et de l’Intérieur, Jean-Yves Le Drian et Gérald Darmanin, connus pour leur tropisme algérien.
Le premier, par culture et par affinités, a toujours veillé au grain à la moindre mauvaise humeur algérienne. Le second, par stratégie de séduction, avait offert sur un plateau d’argent le contrôle de l’islam de France aux représentants des autorités algériennes en France.
À l’égard de l’Algérie, Macron relancera à n’en pas douter son dialogue mémoriel avec ce pays. Libéré des affres d’un troisième mandat, il voudra marquer l’Histoire de son empreinte et rester dans les mémoires collectives comme l’homme qui a donné une accélération historique à ce chantier.
Pour assurer un dialogue dans des bonnes conditions avec les pays du Maghreb, Macron devra lever la limitation des visas accordés aux ressortissants de ces pays au cours de son mandat, instrumentalisée pour des raisons électoralistes. Aujourd’hui, une nouvelle réalité s’impose dans la relation entre la France et le Maghreb, où la realpolitik doit être mise en avant.
Mustapha Tossa est un journaliste franco-marocain. En plus d’avoir participé au lancement du service arabe de Radio France internationale, il a notamment travaillé pour Monte Carlo Doualiya, TV5 Monde et France 24. Mustapha Tossa tient également deux blogs en français et en arabe où il traite de la politique française et internationale à dominance arabe et maghrébine.
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NDLR : L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.