PARIS: L'avenir politique d'Eric Zemmour et de son mouvement Reconquête! semble d'autant plus incertain que l'ancien candidat d'extrême droite se heurte au refus de sa rivale Marine Le Pen de conclure une alliance aux législatives.
Depuis une dizaine de jours, les zemmouristes, qui ont réuni 7% des voix au premier tour de la présidentielle, ne cessent de tambouriner à une porte quasi close.
Forte de sa progression à la présidentielle de près de huit points par rapport à 2017, Marine Le Pen (41,5%) n'envisage pas d'accord avec Reconquête! pour le scrutin des 12 et 19 juin.
Et les échanges acrimonieux se multiplient entre les deux camps. Marion Maréchal, qui hésite à se présenter à Carpentras (Vaucluse), a déploré mardi sur RTL des débats « de cour de récréation ».
Le RN n'exclut pas une exception pour l'ex-LR Guillaume Peltier, vice-président de Reconquête! et député sortant dans le Loir-et-Cher, ou Stanislas Rigault, patron des jeunes de Génération Zemmour, tenté par une candidature.
« Pourquoi pas » un soutien à ces candidats, a affirmé mardi Louis Aliot, vice-président du RN, car « ils font partie de ceux qui ont été les moins vindicatifs ».
« Mal passé »
Pour le reste, le parti ne digère pas les remarques répétées d'Eric Zemmour sur l'incapacité de Marine Le Pen à remporter la présidentielle ou sa sortie de dimanche soir sur »la huitième fois que la défaite frappe le nom de Le Pen », du père Jean-Marie à sa fille Marine.
C'est « mal passé », confirme Louis Aliot. « Si vraiment le nom de Le Pen le gêne, il va falloir qu'il se départisse d'une Le Pen qu'il a voulu agréger à lui, en l'occurrence Marion (Maréchal, nièce de Marine Le Pen) », a-t-il taclé sur CNews.
Chez Eric Zemmour, après la claque reçue à la présidentielle, on multiplie les appels du pied. Dimanche, l'ancien candidat a invité le « bloc national » à « s'unir », sans évoquer cette fois son mantra d'« union des droites » qui rebute le RN.
Lundi, les trois vice-présidents de son parti, M. Peltier, ainsi que deux anciens RN Marion Maréchal et Nicolas Bay, ont proposé une « rencontre » avec le parti lepéniste.
Mais engager une discussion avec les « traitres » du RN, comme ils sont surnommés en interne, paraît difficile. Leur départ du mouvement, « c'est un aller sans retour » et zéro accord aux législatives, avait cinglé Marine Le Pen.
Dans le camp Zemmour, « on ne comprend pas cet enfermement depuis dix jours. Politiquement, ça n'a aucun intérêt. Si elle fait dix députés toute seule, ça ne sera une satisfaction pour personne ».
L'ancien éditorialiste n'a pas tranché sa candidature éventuelle aux législatives, où une défaite sur son nom ferait tache. L'un des cadres de Reconquête!, l'eurodéputé venu du RN Jérôme Rivière, lui recommande plutôt de viser les européennes dans deux ans.
« Gros sous »
Stanislas Rigault pense que »la base ne comprendrait pas qu'on se dispute là-haut alors qu'il y a une montée de LFI, le risque de suprématie de la macronie ». « On voit que la gauche se parle, (...) à nous de le faire aussi ».
A ses yeux, l'avenir de Reconquête! n'est pas du tout compromis. Il met en avant les « 122 000 adhérents, le fait qu'on n'a pas trop de soucis financiers » et « qu'on a des cadres et des jeunes ».
Selon l'eurodéputé Jérôme Rivière, « ce sera très difficile d'obtenir un accord » avec le RN aux législatives, car « Marine a peur d'être évincée et veut mener la bataille pour éviter les questionnements individuels ».
Et puis « il y a une question de gros sous » selon lui, alors que le RN est très endetté et compte sur une « meilleure dotation » grâce à des élus supplémentaires.
Le RN espère constituer un groupe à l'Assemblée, ce qui nécessite d'obtenir 15 députés, même si en 2017, Marine Le Pen avait réuni 33,9% des voix mais n'avait obtenu que 8 élus (7 aujourd’hui, dont une apparentée).
Le parti a calculé que Marine Le Pen était arrivée en tête dans 159 circonscriptions. Elle est aussi première dans 23 départements métropolitains, au lieu de deux en 2017.