SCHWETZINGEN, Allemagne: Le Dr Mohab Moussa, neurochirurgien palestinien, a vécu et travaillé en Ukraine jusqu'à ce que la guerre dans le pays l'oblige à fuir. Aujourd'hui, il s’est réfugié avec sa famille en Allemagne.
Plus de 4 millions de personnes ont fui l'Ukraine depuis le début du conflit. Plus de 300 000 sont arrivées en Allemagne. Nombre d’entre elles sont originaires du Moyen-Orient, l'Ukraine comptant une communauté de dizaines de milliers de personnes de cette région.
Moussa, originaire de Rafah, dans la bande de Gaza, a vu de ses propres yeux les horreurs de la guerre chez lui. Comme la situation à Gaza ne risquait pas de s'améliorer, il avait décidé de partir.
«Je voulais améliorer mes compétences et offrir un foyer sûr à ma femme et mes enfants», raconte-t-il à Arab News. Moussa s'est inscrit à l'université de Kharkiv, dans l'est de l'Ukraine, en 2016. Sa femme et ses trois enfants l’ont suivi peu de temps après. Son quatrième enfant, qui y est né, a la nationalité ukrainienne.
Moussa a appris le russe et a commencé à travailler dans la ville de Kharkiv. L'Ukraine est devenue sa nouvelle patrie. «J'aime ce pays, et Kharkiv est quelque chose comme une histoire d'amour personnelle», indique-t-il.
«Les gens sont aimables et il y a une grande communauté d'expatriés – en fait, tout à Kharkiv est magnifique», explique-t-il.
Mais le nouveau monde vers lequel Moussa a fui a été bouleversé. Il ne s’y attendait pas, même à la veille du conflit. «Je prenais un café avec un ami qui m'a demandé s'il allait y avoir une guerre. Je lui ai répondu que non.»
Dès le lendemain, le quartier où il habitait, en périphérie de la ville, était touché par des missiles. «J'ai réveillé ma femme et mes enfants, et nous nous sommes enfuis vers l'école pour y trouver un abri», se souvient Moussa. Alors que la situation se détériorait de jour en jour, lui et sa femme ont décidé de partir pour protéger leurs enfants.
Ils n'ont pris que ce qu'ils pouvaient transporter et ont réservé leurs places dans un train pour la ville de Lviv, à l'ouest de l'Ukraine. Ils y sont arrivés après un voyage épuisant qui a duré trente heures, mais ils étaient loin d'être en sécurité. Des personnes sournoises qui proposaient aux réfugiés de se rendre en Slovaquie n'ont pas hésité pas à tirer profit de la situation.
«Ils ont facturé aux étrangers 2 500 hryvnia ukrainiennes (soit 78 euros) au lieu des 500 habituelles», précise Moussa. Ayant ses enfants avec lui, et avec des températures au-dessous de zéro la nuit, il a accepté. La famille a réussi à se rendre à Bratislava, où «le stress que les petits ont dû subir a commencé à se faire sentir», explique-t-il.
Malgré des souvenirs positifs de personnes prêtes à apporter leur aide, Moussa décrit le traitement général des étrangers non ukrainiens en Slovaquie comme «honteux». En dépit des garanties de l'UE selon lesquelles les réfugiés venant d'Ukraine pourraient voyager librement, un employé de la gare principale de Bratislava a insisté pour que Moussa paie 77 euros pour les billets, n’étant pas Ukrainien.
«Je lui ai demandé pourquoi. J'avais nos permis de séjour ukrainiens, et mon plus jeune enfant est citoyen ukrainien. Il a dû payer malgré tout. «C'était arbitraire.»
L'odyssée de la famille n'était pas encore terminée. Après de nombreuses stations, ils sont finalement arrivés dans la ville de Karlsruhe, au sud-ouest de l'Allemagne, où ils se sont inscrits et ont été hébergés, d'abord dans la ville de Heidelberg, puis à Schwetzingen.
Moussa a assuré qu'il avait fait de son mieux pour cacher la réalité de la guerre à ses enfants, une tâche quasiment impossible. Son souhait est qu'ils reprennent leurs études et puissent suivre des activités de plein air. «Ils devraient commencer maintenant à apprendre l'allemand, afin de pouvoir s'intégrer plus facilement», ajoute-t-il.
Bien qu'il ait vécu six ans en Ukraine, Moussa est déterminé à rester en Allemagne et à y exercer son métier. C’est pourquoi il souhaite apprendre l'allemand le plus rapidement possible, prouver ses qualifications, et commencer à travailler. «Un homme improductif est un fardeau pour la société», conclut-il.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com