DIJON: "Avec 575 euros, on ne vit pas!" Pour son premier vrai déplacement de campagne, Emmanuel Macron a été vivement interpellé sur le pouvoir d'achat lundi à Dijon, où il s'est présenté de nouveau comme le candidat au dessus des partis, capable à la fois de "libérer" et de "protéger".
En bras de chemise par une belle journée printanière, le président candidat a retrouvé pendant plusieurs heures le contact avec les Français qu'il avait délaissé ces derniers mois, accaparé par l'actualité brûlante de la guerre en Ukraine.
Dans le quartier populaire Fontaine d'Ouche, il a pu à la fois goûter aux encouragements de certains et mesurer les fortes inquiétudes de nombreux habitants pour leur pouvoir d'achat.
"Est-ce que vous trouvez ça normal que je n'arrive plus à vivre de mes revenus?", l'a interpellé un agent commercial de 46 ans. "Tout flambe (...) Mettez-vous à la place d'une famille française. Ca ne peut plus durer, les gens vont péter un câble!", lui lance-t-il sur un ton décidé mais courtois.
Emmanuel Macron tente de lui répondre. Il insiste sur la remise à la pompe de 18 centimes TTC par litre de carburant à partir de vendredi, et sur le "bouclier" pour limiter le prix du gaz... Mais "il n'y a pas d'argent magique", reconnaît-il, en soulignant que les entreprises "vont devoir accompagner leurs employés".
Il affirme aussi que l'Etat français est "celui qui fait le plus" en Europe pour aider à faire face à l'inflation.
"Moi, les 20 milliards (d'euros), je ne m'en rends pas compte!", le coupe le père de famille, en évoquant l'enveloppe des montants débloqués par le gouvernement.
"Avec 575 euros, on ne vit pas !", lui lance juste après une dame aux cheveux courts en référence au montant mensuel du revenu de solidarité active (RSA). "Pour moi c'est insupportable ce que vous avez dit sur le RSA", ajoute-t-elle, alors que le candidat veut le conditionner à une quinzaine d'heures d'activités.
De tels échanges musclés rappellent ceux qu'avaient connus Emmanuel Macron avant le déclenchement de la crise des Gilets jaunes en novembre 2018.
Le «tandem» Le Pen/Zemmour
Alors que ce thème du pouvoir d'achat domine la campagne, Emmanuel Macron avait choisi de donner une coloration sociale à ce déplacement, rythmé par une rencontre avec des élèves d'un lycée professionnel, la présentation de projets de rénovation urbaine et des bains de foule.
A ses côtés, bien visibles, l'accompagnaient deux ténors venus du Parti socialiste: le patron des sénateurs LREM François Patriat et le maire de Dijon François Rebsamen, nouveau rallié.
Emmanuel Macron s'est défendu d'avoir un programme de droite, critique récurrente avec ses propositions de retraite à 65 ans et de RSA conditionné.
"Quand on marche, il faut deux jambes, la droite et la gauche, et il faut mettre l'une après l'autre pour pouvoir avancer", a argumenté le président candidat. "On a fait des réformes que les gens venant de la droite n'avaient jamais voulu, ou pu, ou su faire ; et elles nous ont permis de financer des politiques sociales que les gens de gauche n'avaient jamais faites", a affirmé le favori pour la présidentielle, en soulignant que le diptyque "Libérer/protéger" était toujours "valable".
Comme en 2017, Emmanuel Macron s'est présenté comme le candidat "des valeurs de la République" face à l'extrême-droite, "qui est toujours là (...), toujours portée par un clan et veut la division". Sans citer leurs noms, il a prédit que la compétition entre Marine Le Pen et Eric Zemmour allait se "finir en tandem" au second tour.
Omniprésente dans son agenda, la guerre en Ukraine s'est invitée à Dijon lorsque plusieurs réfugiés, brandissant des drapeaux bleu et jaune, l'ont salué. Il a assuré qu'il parlerait mardi au président russe Vladimir Poutine "pour sécuriser l'opération humanitaire à Marioupol".
Emmanuel Macron devrait retrouver la campagne jeudi avec un déplacement sur le thème de l'écologie, probablement en Charente-Maritime, avant l'unique meeting du premier tour samedi près de Paris.
"Les meetings, j'adore ça! Je vis une frustration" de ne pas avoir pu en faire avant, a-t-il reconnu dimanche sur France 3.