Vers un partenariat plus stratégique entre l’Union européenne et l’Arabie saoudite

Le haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères, Josep Borrell, et le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Faisal ben Farhane, tiennent une conférence de presse conjointe à Riyad, le 3 octobre 2021. (Reuters)
Le haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères, Josep Borrell, et le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Faisal ben Farhane, tiennent une conférence de presse conjointe à Riyad, le 3 octobre 2021. (Reuters)
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Publié le Samedi 26 mars 2022

Vers un partenariat plus stratégique entre l’Union européenne et l’Arabie saoudite

Vers un partenariat plus stratégique entre l’Union européenne et l’Arabie saoudite
  • La sécurité régionale a toujours été la pierre angulaire de notre partenariat de longue date, mais d’autres problèmes de sécurité font surface, ce qui signifie que nous devrons mettre les bouchées doubles
  • Nous sommes depuis longtemps engagés dans la résolution des conflits et le soutien aux processus politiques au Moyen-Orient et ailleurs, travaillant souvent de concert avec nos partenaires du Golfe

Les liens entre l’Arabie saoudite et les membres de l’Union européenne (UE) remontent à des décennies et se resserrent de plus en plus. Malgré la pandémie de Covid-19, de très nombreux chefs d’États et de gouvernements européens, ministres des Affaires étrangères et hauts représentants de l’Union européenne se sont rendus à Riyad au cours des deux dernières années. Par ailleurs, de nombreux ministres et fonctionnaires saoudiens ont également effectué des visites officielles dans les capitales européennes. Ces rencontres ont mis en évidence la nécessité d’établir un partenariat plus stratégique fondé sur des valeurs et des intérêts communs.

Il existe de nombreux défis et possibilités dont on ne peut faire fi: de la stabilité mondiale et régionale à la transition verte et la coopération économique, en passant par nos programmes novateurs respectifs, à savoir l’initiative Vision 2030 et le Pacte vert pour l’Europe. Nous sommes également liés par nos valeurs communes et notre attachement au multilatéralisme, à l’ordre international fondé sur des règles, à la transformation sociale et à l’autonomisation des femmes et des jeunes, ce qui donne une dimension humaine à notre coopération. Il en va de même pour toute la région du Golfe et c’est pour cette raison que l’Union européenne publiera en mai une nouvelle stratégie avec le Golfe. Une réunion ministérielle entre l’UE et le Conseil de coopération du Golfe (CCG) s’est tenue à Bruxelles le mois dernier, réunissant les ministres des Affaires étrangères des deux parties pour en discuter.

Le commerce et les investissements resteront sans aucun doute des éléments fondamentaux de notre stratégie future. Nous sommes le premier fournisseur d’investissements directs étrangers dans la région et le deuxième plus grand partenaire commercial. Mais il est possible d’en faire beaucoup plus en matière d’innovation, de technologie et d’expertise européennes afin de soutenir pleinement l’initiative Vision 2030 dans des domaines comme le tourisme, la culture, le divertissement, l’énergie et la défense. Les deux parties se sont également engagées à passer en revue un éventuel accord de libre-échange qui renforcerait nos relations.

Les énergies renouvelables pourraient être un nouveau défi au sein de notre partenariat. Le Royaume, qui est doté d’un très grand potentiel en matière d’hydrogène vert, serait un excellent partenaire puisque l’UE devrait devenir le plus grand marché – et probablement le plus grand importateur – d’hydrogène vert au monde d’ici 2030. L’UE veut réduire sa dépendance de la Russie en termes d’importations de gaz. Les pays du Golfe, et particulièrement l’Arabie saoudite, pourraient devenir de nouveaux partenaires à cet égard. Prendre conscience de ce potentiel aiderait les deux parties à atteindre leurs propres objectifs de neutralité climatique.

La sécurité régionale a toujours été la pierre angulaire de notre partenariat de longue date, mais d’autres problèmes de sécurité font surface, ce qui signifie que nous devrons mettre les bouchées doubles. Au-delà de son rôle de coordination dans les négociations relatives à l’accord sur le nucléaire iranien, l’UE souhaite contribuer davantage au renforcement de la sécurité et de la confiance dans l’ensemble de la région.

Dans ce contexte, la crise au Yémen demeure une préoccupation majeure. Cette semaine encore, des attaques transfrontalières – que nous condamnons fermement – ont été menées contre l’Arabie saoudite. Les attaques contre les infrastructures et les civils doivent cesser immédiatement. L’UE est déterminée à mettre en œuvre toutes les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies sur le Yémen et se tient aux côtés du Royaume et du CCG dans la recherche d’une solution politique inclusive et durable, y compris l’invitation récente à des pourparlers intrayéménites à Riyad, en coordination avec l’envoyé spécial des Nations unies. En attendant, l’UE reste pleinement engagée dans ses efforts humanitaires et de développement. Malgré la guerre en Ukraine, la dernière conférence des donateurs pour le Yémen a mis en lumière le soutien très important de l’UE et de ses États membres, portant la somme totale des fonds promis au pays à plus de 371 millions d’euros.

L’UE et ses États membres restent un acteur mondial et fiable pour la paix, fournissant plus de la moitié de l’aide publique au développement à l’échelle mondiale, notamment aux personnes vivant dans des zones de conflit. Nous sommes depuis longtemps engagés dans la résolution des conflits et le soutien aux processus politiques au Moyen-Orient et ailleurs, travaillant souvent de concert avec nos partenaires du Golfe. Pour ce qui est des conflits, nous avons toujours adopté une position reposant sur des principes et appelant au respect du droit international et de la Charte des Nations unies. Par ailleurs, nous nous opposons à l’usage de la force – tout comme nous le faisons maintenant dans le cas de l’agression contre l’Ukraine.

«L’Union européenne souhaite contribuer davantage au renforcement de la sécurité et de la confiance dans l’ensemble de la région.» Patrick Simonnet

La guerre en Ukraine inflige des souffrances indicibles à la population ukrainienne et porte déjà atteinte à l’ordre international et à l’économie mondiale. Il faudrait donc redoubler d’efforts pour instaurer un cessez-le-feu immédiat et garantir un accès humanitaire sans entrave. Nous saluons la position de l’Arabie saoudite et du Golfe vis-à-vis de la résolution de l’Assemblée générale des Nations unies du 2 mars. Nous espérons pouvoir de nouveau compter sur le soutien de tous nos amis et partenaires afin de pouvoir adopter, dans les prochains jours, une autre résolution sur la situation humanitaire en Ukraine.

Cela ne nous éloignera cependant pas de nos responsabilités mondiales. Nous voulons continuer à coopérer avec le Royaume sur les questions régionales, en nous appuyant sur nos positions similaires sur de nombreux conflits régionaux et notre vision commune de la sécurité régionale et maritime. Comme indiqué précédemment, nos ambitions seront au cœur de la nouvelle stratégie de l’Union européenne pour le Golfe qui nous permettra de renforcer encore plus notre partenariat.

 

Patrick Simonnet est l’ambassadeur de l’Union européenne auprès du royaume d’Arabie saoudite.

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com