RABAT : L’ancien coordinateur des services de sécurité algérien, Athmane «Bachir» Tartag, a été condamné jeudi à 6 ans de prison ferme par le Tribunal militaire de Blida.
Arrêté le 4 mai 2019 alors que le mouvement pro démocratie du Hirak battait son plein, l’ancien homme fort du renseignement est accusé de «mauvaise utilisation de la fonction» pour avoir fait taire un dossier de pots-de-vin et de fraude relatif aux élections législatives de 2017. Il a été arrêté en même temps que Saïd Bouteflika, le frère de l’ancien président Abdelaziz Bouteflika, chassé du pouvoir par la rue qui réclamait un changement de système politique. S'ensuit une purge anti-corruption – peu crédible aux yeux de nombreux algériens – qui résulta en l’arrestation de plusieurs personnalités politiques, du monde des affaires et militaires.
L’accusation fait suite à la dénonciation de Djamel Ould Abbès, ex-secrétaire général du FLN, par Baha Eddine Tliba, député FLN pour Tlemcen, lorsque le fils de ce premier aurait demandé un pot-de-vin en échange de l’octroi d’un siège au parlement.
Selon Baha Eddine Tliba, Bachir Tartag avait été averti des actes d’Ould Abbès mais décida de geler le dossier. «J’ai remis le dossier à Bachir Tartag», avait affirmé le député. Une accusation que Bachir Tartag rejette, justifiant son immobilisme par des instructions parvenues de plus haut, en l'occurrence le Président Bouteflika et son frère.
«Madame Maya»
Dans un deuxième dossier, Bachir Tartag est accusé de ne pas avoir transmis à la justice un dossier relatif à une saisie effectuée par les services de sécurité dans l’affaire dite «Madame Maya» (de son vrai nom Zoulikha Nachinache), une femme d’affaires qui se présentait comme la fille du président Bouteflika, afin de bâtir une fortune colossale.
Lors d’une descente de la gendarmerie nationale dans sa villa située au niveau de la résidence d’Etat de Moretti, un million d’euros en espèces ainsi que 17 kg de bijoux avaient été saisis. Elle a été condamnée à la mi-octobre 2020 à 12 ans de prison pour trafic d’influence, blanchiment d’argent, dilapidation de deniers publics, ainsi que transfert illicite de devises à l’étranger. Une peine confirmée en appel. L’accusée avait reconnu avoir obtenu des avantages, mais a nié avoir prétendu être la fille du président déchu.
Dans cette affaire, Bachir Tartag a accusé Said Bouteflika de l’avoir empêché de remettre à la justice les biens et documents saisis. «Après avoir demandé une enquête, il m’a demandé de gérer le dossier de manière discrète, parce qu’il s’agissait d’une affaire qui concerne le Président», avait-il affirmé lors de son audition.
Contacté par le quotidien Liberté, son avocat Khaled Bourgheul a affirmé faire appel de cette décision.