A moins de 100 jours du scrutin, une élection présidentielle hors normes

Le président français Emmanuel Macron est accueilli par le président de la région Hauts-de-France et candidat du parti Les Républicains (LR) à l'élection présidentielle française de 2022 Xavier Bertrand à son arrivée pour visiter le "Familistère Godin de Guise." (Photo, AFP)
Le président français Emmanuel Macron est accueilli par le président de la région Hauts-de-France et candidat du parti Les Républicains (LR) à l'élection présidentielle française de 2022 Xavier Bertrand à son arrivée pour visiter le "Familistère Godin de Guise." (Photo, AFP)
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Publié le Vendredi 07 janvier 2022

A moins de 100 jours du scrutin, une élection présidentielle hors normes

  • «On n'a jamais vécu une présidentielle dans cette situation, c'est une première»
  • Quasi novice en politique lorsqu'il a accédé au pouvoir en 2017, en ringardisant les partis de gouvernement de droite comme de gauche, le président Emmanuel Macron vise une nouvelle performance

PARIS : Emmanuel Macron pas encore candidat mais manifestement en campagne et donné favori, une droite et une extrême droite conquérantes face une gauche atomisée: la France entre dans une période d'élection présidentielle houleuse, en pleine vague de contaminations à la Covid-19.

Quasi novice en politique lorsqu'il a accédé au pouvoir en 2017, en ringardisant les partis de gouvernement de droite comme de gauche, le président Emmanuel Macron vise une nouvelle performance: devenir le premier président de la République élu deux fois au suffrage universel sans cohabitation. 

Les sondages le créditent de 24 à 27% des intentions de vote, avec une avance d'une dizaine de points sur ses principaux poursuivants, un trio composé de la candidate du parti de droite Les Républicains (LR) Valérie Pécresse, et des deux représentants de l'extrême droite, Marine Le Pen pour le Rassemblement national (RN) et l'ex-polémiste Eric Zemmour, qui gravitent autour de 15%. 

Au second tour, il l'emporterait de peu face à Valérie Pécresse, plus largement contre Marine Le Pen ou Eric Zemmour, selon les dernières enquêtes d'opinion.

Sa voie semblait toute tracée, selon les analystes: jouer à fond de son statut, au moment où la France assure la présidence du Conseil de l'Union européenne et en pleine crise sanitaire.

Mais à moins de 100 jours du premier tour, Emmanuel Macron a de nouveau dérouté, descendant dans l'arène par une sortie contre les non-vaccinés, confiant dans un entretien avec le quotidien populaire Le Parisien avoir "très envie de les emmerder" pour les amener à résipiscence par la multiplication des restrictions.

Il a également reconnu son "envie" de se représenter pour cette élection qui s'annonce âpre et fertile en polémiques.

Avant même cette déclaration, le RN comme Eric Zemmour avaient appelé leurs partisans à ne pas "se laisser voler cette élection" par la focalisation du débat sur la crise sanitaire.

Au moment où le nombre de contaminations enregistrées par jour dépasse les 330 000, le président sortant "instrumentalise cyniquement la Covid", pour "qu'on ne parle pas de son bilan" et "surtout de l'identité de la France", a accusé jeudi M. Zemmour.

«Gestion de l'urgence»

"On n'a jamais vécu une présidentielle dans cette situation, c'est une première", souligne Dominique Reynié, directeur général de la Fondation pour l'innovation politique (Fondapol). A cause de l'urgence sanitaire "la campagne ne peut pas commencer, on ne peut pas parler des programmes, des réformes du pays".

Deux formations de gauche, La France insoumise (LFI) et le Parti communiste, ont annoncé qu'ils distribueraient des masques FFP2 lors de leurs meetings. Le parti présidentiel, les LR et le Parti communiste ont aussi prévu de demander un pass sanitaire à l'entrée de leurs réunions électorales et d'imposer des jauges.

Déjà éliminée du second tour en 2017, la gauche risque d'être de nouveau condamnée à faire de la figuration. Son candidat le mieux placé, Jean-Luc Mélenchon (LFI) peine à se maintenir autour de 10% des intentions de vote, devant l'écologiste Yannick Jadot et la socialiste Anne Hidalgo.

Sur la droite de l'échiquier politique, la situation est très mouvante, "très nouvelle, par rapport à ce qu'on imaginait encore il y a plusieurs mois et même en septembre", explique Bruno Jeanbart, vice-président de l'institut de sondages OpinionWay.

"Marine Le Pen semblait vraiment très à l'abri d'une non-qualification au second tour depuis maintenant trois ans, ce qui, clairement, n'est plus le cas", indique-t-il, en raison de la concurrence imprévue d'Eric Zemmour et de la montée de Valérie Pécresse depuis sa victoire à la primaire LR en décembre.

"On voit bien qu'avec Valérie Pécresse, c'est beaucoup plus incertain pour Emmanuel Macron. Face à Le Pen ou Zemmour, la question est de savoir combien Macron ferait, pas de savoir s'il gagnerait ou pas", sauf imprévu majeur, estime Bruno Jeanbart.

Si un deuxième mandat Macron paraît actuellement le plus probable, Dominique Reynié s'interroge des conséquences sur sa légitimité et sa capacité à gouverner pendant cinq ans du scénario où "la réélection se ferait sur la gestion de l'urgence, un point c'est tout".

Dans cette hypothèse, "c'est les gilets jaunes au carré à chaque réforme", prédit-il, en référence au mouvement de protestation populaire de 2018-2019, déclenché par une hausse des prix de l'essence qui avait tourné à la révolte contre l'arrogance et le mépris prêtés au président Macron.

Une gauche française divisée peut-elle peser dans la présidentielle?

À moins de 100 jours du scrutin présidentiel, en France, la myriade de partis de gauche du pays risque d'être éliminée dès le premier tour, mais les appels à l'unification derrière un candidat unique n'aboutissent pas pour le moment.

Les sondages montrent régulièrement que seul Jean-Luc Mélenchon, candidat de la gauche radicale, qui avait obtenu presque 20% au premier tour il y a cinq ans, a des chances de dépasser les 10% en 2022. 

Aucun autre ne parvient à atteindre des résultats à deux chiffres, ce qui rend peu probable qu'un candidat de gauche ne vienne troubler Emmanuel Macron dans sa quête d'un second mandat. 

Le retournement de situation est brutal, en particulier pour les socialistes, qui ont occupé la présidence avant M. Macron et dont la candidate, la maire de Paris Anne Hidalgo, est en grande difficulté.

Celle-ci s'attèle désormais à convaincre Jean-Luc Mélenchon, le candidat des Verts Yannick Jadot, les communistes et autres forces de gauche à unir leurs forces. Mais tous ont pour l'instant rejeté l'idée. 

Entre-temps, Christiane Taubira ancienne ministre des gouvernements de François Hollande et figure respectée au sein de la base du Parti socialiste, a déclaré qu'elle "envisageait" de rejoindre la mêlée dans une tentative d'unification, ce qui brouille davantage l'échiquier.

La plupart des électeurs semblent résignés à l'idée que 2022 ne sera pas l'année du retour de la gauche, même si la dégradation du pouvoir d'achat, les inégalités et la menace du réchauffement climatique figurent régulièrement parmi les principaux enjeux électoraux dans les sondages.

"La gauche paie le fait de ne plus être capable de se mettre autour d'une table pour discuter et construire un projet commun", regrette Clémence Dollé, membre du mouvement des Jeunes écologistes qui soutient le parti Europe Ecologie Les Verts (EELV). "On aurait dû faire cela il y a deux ans. C'est trop tard".

«Pas envie d'attendre»

Interrogé par l'AFP, le politologue Gérard Grunberg a dressé un constat sans appel. "C'est désastreux. Jamais la gauche n'a été aussi divisée depuis le début de la Ve République" (en vigueur depuis 1958). 

Aux côtés des trois plus grandes formations de gauche, se trouve une demi-douzaine de partis de niche, dont peu sont enthousiastes à l'idée d'une primaire, prévue fin janvier par des militants espérant former une franche opposition à la droite. 

"Nous sommes là pour rappeler aux partis politiques que leur rôle est de répondre aux urgences que les citoyens font remonter", a déclaré Mathilde Imer, porte-parole de l'initiative de "La Primaire Populaire" qui a recueilli plus de 300.000 inscriptions en ligne. 

Selon elle, il est clair que les électeurs "n'ont pas envie d'attendre cinq ans" pour que la gauche présente une campagne convaincante face aux problèmes sociaux et climatiques.

Cependant, pour Rémi Lefebvre, professeur de sciences politiques à l'Université de Lille, "beaucoup de partis de gauche ont l'impression que c'est perdu d'avance et choisissent de défendre leur propre drapeau".

Pourtant, même si l'immigration et les craintes sécuritaires dominent le débat, M. Lefebvre réfute l'idée d'un basculement à droite du centre de gravité politique français. 

"Il y a un potentiel électoral pour la gauche mais elle n'arrive pas à le capter" a-t-il expliqué à l'AFP, soulignant un "problème de crédibilité" tant "le discours de gauche est difficile à vendre et à défendre". 

Les appels à l'intensification de la lutte contre le réchauffement climatique continuent par exemple à être perçus comme "sacrificiels" et nuisant aux emplois et à la croissance. 

"Une bonne image ne se traduit pas en capital électoral lorsque le débat se concentre sur la sécurité et l'immigration, des questions sur lesquelles la gauche est totalement absente", commente le politologue Stéphane Rozès.

Au delà de 2022, "je pense que la gauche va survivre. En tant que jeune militante, on se rend compte que ce sont les personnes les plus anciennes dans les appareils qui ont le plus de mal à se mettre autour d'une table et discuter", juge Clémence Dollé.


Agriculteurs: la Coordination rurale bloque toujours le port de Bordeaux

 La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
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  • La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place
  • Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine

BORDEAUX: La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais.

La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place.

Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine et auquel les agriculteurs comme la classe politique française s'opposent.

Il s'agit de la première visite de la ministre sur le terrain depuis le retour des paysans dans la rue, une mobilisation surtout marquée en fin de semaine par les actions des bonnets jaunes de la Coordination rurale.

A Bordeaux, ils bloquent ainsi les accès au port et au dépôt pétrolier DPA: des pneus, des câbles et un tracteur entravent l'entrée du site.

Sous une pluie battante, les agriculteurs s'abritent autour d'un feu et de deux barnums tanguant avec le vent. Une file de camions bloqués dont des camions citernes s'allonge aux abords.

Les manifestants ont tenté dans la matinée de joindre Annie Genevard, sans succès.

"On bloque tant que Mme Genevard et M. Barnier [Michel Barnier, Premier ministre] ne mettent pas en place des solutions pour la profession. Des choses structurelles, (...), on ne veut pas un peu d'argent aujourd'hui pour rentrer dans nos fermes, on veut des réformes pour vivre, avoir un salaire décent", a déclaré à l'AFP Aurélie Armand, directrice de la CR du Lot-et-Garonne.

"Le temps est avec nous parce que quand il pleut on ne peut pas travailler dans les fermes, donc c'est très bien", a-t-elle lancé, alors qu'une pluie battante balaye la Gironde avec le passage de la tempête Caetano.

Plus au sud, dans les Landes, des agriculteurs de la CR40 occupent toujours une centrale d'achat Leclerc à Mont-de-Marsan mais les autorités leur ont donné jusqu'à vendredi inclus pour libérer les lieux, a-t-on appris auprès de la préfecture.

Tassement du mouvement, avant une reprise 

La préfète du département a par ailleurs condamné "les dégradations commises par des membres de la Coordination rurale" mercredi soir sur des sites de la Mutualité sociale agricole (MSA), visée par des dépôts sauvages, et de la Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), ciblée par un incendie "volontairement déclenché" dans son enceinte.

Sur Europe1/Cnews, le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a redit que les agriculteurs avaient "parfaitement le droit de manifester", mais qu'il y avait "des lignes rouges" à ne pas dépasser: "pas d'enkystement", "pas de blocage".

A l'autre bout de la France, à Strasbourg, des membres de la CR se sont installés dans le centre avec une dizaine de tracteurs pour y distribuer 600 kilos de pommes aux passants.

"Nous, on propose un pacte avec le consommateur, c'est-à-dire lui fournir une alimentation de qualité en quantité suffisante et en contrepartie, le consommateur nous paye un prix correct", a souligné le président de la CR départementale, Paul Fritsch.

Les autorités constatent une "légère baisse" de la mobilisation à l'échelle du pays par rapport au début de la semaine, quand les syndicats majoritaires FNSEA et JA étaient aussi sur le terrain.

Ce nouvel épisode de manifestations agricoles intervient à quelques semaines d'élections professionnelles. La CR, qui préside aujourd'hui trois chambres d'agriculture, espère à cette occasion briser l'hégémonie de l'alliance FNSEA-JA et ravir "15 à 20 chambres" supplémentaires.

Le président de la FNSEA Arnaud Rousseau a annoncé mercredi que les prochaines manifestations emmenées par ses membres auraient lieu la semaine prochaine, "mardi, mercredi et jeudi", "pour dénoncer les entraves à l'agriculture".

FNSEA et JA avaient prévenu qu'ils se mobiliseraient jusqu'à la mi-décembre contre l'accord le Mercosur, contre les normes selon eux excessives et pour un meilleur revenu.

Troisième syndicat représentatif, la Confédération paysanne organise aussi des actions ponctuelles, contre les traités de libre-échange ou les installations énergétiques sur les terres agricoles.


Les députés approuvent en commission l'abrogation de la réforme des retraites

L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
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  • La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.
  • La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation.

PARIS : La gauche a remporté mercredi une première victoire dans son offensive pour abroger la très décriée réforme des retraites : sa proposition de ramener l'âge de départ de 64 à 62 ans a été adoptée en commission des Affaires sociales, avant son arrivée dans l'hémicycle le 28 novembre.

Le texte, présenté par le groupe LFI dans le cadre de sa niche parlementaire, a été approuvé par 35 voix (celles de la gauche et du Rassemblement national), contre 16 (venues des rangs du centre et de la droite).

La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.

Le Rassemblement national, qui avait présenté une proposition similaire fin octobre, mais que la gauche n'avait pas soutenue, a voté pour le texte de La France insoumise. « C'est le même que le nôtre et nous, nous ne sommes pas sectaires », a argumenté le député Thomas Ménagé.

La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation : celle-ci est ramenée de 43 à 42 annuités, ce qui revient à abroger également la réforme portée en 2013 par la ministre socialiste Marisol Touraine pendant le quinquennat de François Hollande.

Un amendement, présenté par les centristes du groupe Liot pour préserver la réforme Touraine, a été rejeté. Les socialistes, qui auraient préféré conserver cette réforme de 2013, ont décidé d'approuver le texte global malgré tout.

La gauche affirme qu'elle est en mesure de porter sa proposition d'abrogation jusqu'au bout : après l'examen du texte dans l'hémicycle la semaine prochaine, elle a déjà prévu de l'inscrire à l'ordre du jour du Sénat le 23 janvier, à l'occasion d'une niche communiste, puis en deuxième lecture à l'Assemblée nationale le 6 février, cette fois dans un créneau dédié aux écologistes.

Les représentants de la coalition gouvernementale ont mis en garde contre un texte « pas sérieux » ou « irresponsable ».

« Il faut être honnête vis-à-vis des Français : si cette réforme des retraites est abrogée, certes ils pourront partir à 60 ans, mais avec une retraite beaucoup plus basse », a ainsi argumenté la députée macroniste Stéphanie Rist.


Censure du gouvernement : Le Pen fait monter la pression avant sa rencontre avec Barnier

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
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  • "Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure"
  • Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget

PARIS: Marine Le Pen fait monter la pression sur Michel Barnier, avant leur rencontre lundi à Matignon : elle assure que son parti n'hésitera pas à censurer le gouvernement à la veille de Noël si "le pouvoir d'achat des Français est amputé" dans le projet de budget 2025.

"Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure", a affirmé mercredi la cheffe de file des députés du Rassemblement national sur RTL.

Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget de l'Etat.

Si le RN et la gauche votaient conjointement cette motion alors la coalition Barnier, fragile attelage entre LR et la macronie, serait renversée et le projet de budget rejeté.

Si elle n'a pas détaillé la liste précise de ses revendications, Marine Le Pen a en particulier jugé "inadmissible" la hausse envisagée par le gouvernement pour dégager trois milliards d'euros des taxes sur l'électricité, une mesure toutefois supprimée par l'Assemblée nationale en première lecture.

"Taper sur les retraités, c'est inadmissible", a-t-elle aussi affirmé, insatisfaite du compromis annoncé par le LR Laurent Wauquiez. Celui-ci prévoit d'augmenter les retraites de la moitié de l'inflation au 1er janvier, puis d'une deuxième moitié au 1er juillet pour les seules pensions sous le Smic.

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. Si elles étaient suivies, celles-ci pourraient empêcher Mme Le Pen de participer à une quatrième élection présidentielle.

Face à cette menace de censure, Michel Barnier va recevoir en début de semaine prochaine, un par un, l'ensemble des présidents de groupes parlementaires, à commencer par Marine Le Pen dès lundi matin.

Ce premier tête à tête, depuis son entrée à Matignon, suffira-t-il ?

"Et-ce que M. Barnier va respecter l’engagement qu’il a pris, que les groupes d’opposition puissent reconnaître dans son budget des éléments qui leur paraissent essentiels ?", s'est interrogée la cheffe de file des députés RN.

Les demandes de notre parti étaient "de ne pas alourdir la fiscalité sur les particuliers, de ne pas alourdir sur les entrepreneurs, de ne pas faire payer les retraités, de faire des économies structurelles sur les dépenses de fonctionnement de l'Etat", a-t-elle récapitulé. "Or nous n'avons pas été entendus, nous n'avons même pas été écoutés".

Poker menteur 

Alors qu'il a déjà lâché du lest sur les économies demandées aux collectivités locales, aux retraités et aux entreprises face aux critiques de sa propre majorité, le Premier ministre, confronté à la colère sociale des agriculteurs, des fonctionnaires ou des cheminots, a très peu de marge de manoeuvres.

"L'objectif est d'arriver à un équilibre entre les ambitions des groupes parlementaires et les impératifs de rigueur" budgétaire, répète Matignon, alors que le déficit public est attendu à 6,1% du PIB fin 2024 contre 4,4% prévu initialement.

L'exécutif agite, à destination du RN mais aussi des socialistes, la menace du chaos.

"Celui ou celle qui renversera le gouvernement privera le pays d'un budget et le précipitera dans le désordre et la chienlit", a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, sur CNews.

"Le pire pour le pouvoir d'achat des Français, ce serait une crise financière", a alerté de son côté sur LCI sa collègue Astrid Panosyan-Bouvet (Travail).

Une question demeure: le RN bluffe-t-il ?

"Si le gouvernement tombe, il faudra attendre juin pour qu'il y ait des élections législatives parce qu'il ne peut pas y avoir de dissolution pour le moment!", a semblé nuancer le porte-parole du RN Julien Audoul.

Dans tous les cas, ce jeu de poker menteur risque de durer jusque la veille de Noël, lorsque l'Assemblée nationale aura à se prononcer définitivement sur le projet de budget 2025 de l'Etat.

Le RN n'entend, en effet, pas déposer ou voter de motion de censure sur les deux autres textes (fin de gestion de 2024 et projet de budget de la Sécurité sociale) qui pourraient être adoptés par 49.3 avant.