PARIS: A la peine dans les intentions de vote, Anne Hidalgo entend véritablement lancer sa campagne présidentielle en octobre avec son investiture par le Parti socialiste et une présence médiatique renforcée. L'occasion, espèrent ses soutiens, de se démarquer des Verts, comme sur les carburants.
« On est encore loin de la présidentielle. » A six mois de l'échéance, la garde rapprochée de celle qui doit être investie candidate du Parti socialiste lors d'un vote interne le 14 octobre répète ce mantra autour de celle qui « vient à peine de se lancer », selon le sénateur PS Patrick Kanner.
C'était le 12 septembre à Rouen, trois jours avant la parution de son livre, « une femme française ». Depuis, les sondages ne lui donnent généralement qu'entre 4 et 7% des voix, soit en-dessous de ses concurrents à gauche, Yannick Jadot (EELV, entre 6 et 9%) et Jean-Luc Mélenchon (LFI, entre 7 et 13%).
Loin, très loin d'une possible qualification au deuxième tour.
« On ne s'est jamais vraiment attendus à ce que la campagne décolle vite », relativise le sénateur PS Rémi Féraud. Et si « la séquence sondagière n'est pas bonne, elle est mauvaise pour tous les candidats de gauche, mais on ne le dit que pour Anne Hidalgo ».
Un « Hidalgo-bashing » qui est « révélateur », pour M. Féraud, qu'elle est bien « le candidat de gauche qui peut émerger cet automne ».
« Pour l'instant, je constitue mon équipe et je suis sur le terrain, pour écouter les Français. Certains critiquent cette méthode. Et alors quoi ? La politique, c'est s'afficher sur un ring et débattre avec Eric Zemmour? », souligne la maire de Paris dans un entretien mercredi à Libération.
Il n'empêche: pour Emmanuel Rivière, directeur international pour les études politiques de l'institut de sondage Kantar Public, l'entrée en campagne « n'a pas produit d'effet à tout le moins, et a même eu un effet négatif ».
Pour ce politologue, la proposition de « multiplier par deux au moins » le salaire des enseignants a pu être reçue avec « beaucoup de suspicion » par des électeurs qui ont pris une « très grande distance par rapport aux discours politiques traditionnels ».
Lille, nouvelle étape ?
Au contraire, Anne Hidalgo « a bien fait » de démarrer sa campagne sur ce terrain, argue sa directrice de campagne Johanna Rolland, soulignant l'écho rencontré par cet engagement. « Pendant dix jours, le pays a parlé à nouveau éducation. »
Dans son interview à Libération, la maire PS de Paris, au bilan marqué par la réduction de la place de la voiture dans la capitale, a choisi le contrepied en prônant la baisse de la taxe sur les carburants.
De quoi déclencher quelques tirs du côté des écologistes. « Anne Hidalgo est un peu en perdition dans sa campagne et a tendance à faire des propositions démagogiques, fustige ainsi le député européen David Cormand. Elle essaye d'exister en se distinguant des Verts mais ça crée plus de la confusion à l'arrivée. »
Anne Hidalgo « avance dans la clarté », rétorque Johanna Rolland, qui rejette l'idée d'un faux départ.
Place désormais à la « troisième étape », celle de la mobilisation générale à Lille le 23 octobre, pour entamer « le début d'une campagne collective », assure la maire de Nantes.
C'est dans la capitale des Flandres, fief de sa mentor en politique Martine Aubry, qu'Anne Hidalgo recevra solennellement le soutien du PS. « A partir de ce moment, pas une seconde ne sera perdue », assure David Assouline, autre sénateur socialiste proche de la candidate.
Pour accélérer, Rémi Féraud insiste sur la nécessité d'être « davantage présent dans les médias » face à la profusion de candidats à gauche (7 déclarés à ce stade).
Mais comme le total des candidats de gauche reste historiquement faible, la question d'une fusion avec les Verts, et donc de l'effacement d'un candidat au profit de l'autre, va continuer de se poser, même si le patron du PS, Olivier Faure, ne cesse de répéter qu'il n'y a « pas de plan B » à la candidature d'Anne Hidalgo.
« Elle ne donne pas le sentiment de vouloir y aller coûte que coûte », estime un élu proche de Yannick Jadot qui espère voir une alliance se « clarifier » d'ici la fin de l'année.