PARIS : Des archives judiciaires de l'Ancien Régime, un mandat d'arrestation signé par Robespierre, le «J'accuse» de Zola: une passion méconnue de Robert Badinter, la collection de documents historiques, est exposée à la Bibliothèque de l'Arsenal.
L'ancien ministre de la Justice a réuni un ensemble vaste et éclectique, dont les pièces les plus marquantes sont montrées au public, sur ce site de la Bibliothèque nationale de France (BnF).
«Tout a commencé lorsque, jeune avocat dans les années 1950-1960, j'allais plaider dans des juridictions de province», écrit l'homme qui restera dans l'Histoire comme l'artisan de l'abolition de la peine de mort.
«Il y avait à l'ombre des Palais des librairies anciennes où, dans les rayons surchargés, l'amateur trouvait des documents sur la justice de l'Ancien Régime ou du XIXe siècle. Peu s'y intéressaient», se souvient-il.
Les prix se sont envolés, mais l'ancien président du Conseil constitutionnel a continué à cultiver ce goût dans une certaine discrétion.
«Robert Badinter est le premier à ne pas se définir comme bibliophile», souligne le commissaire de l'exposition, Olivier Bosc, qui a une formation d'historien de la criminologie.
Mais «quelqu'un m'a donné un tuyau, un camarade historien qui m'a dit que Robert Badinter avait beaucoup de choses (...) Et effectivement, c'est lui qui détient aujourd'hui la principale collection en France sur ce thème», explique-t-il à l'AFP.
Celle-ci suit un «fil rouge»: la lente construction des droits de l'Homme et la conquête des libertés publiques et individuelles.
Cela va de l'oeuvre de penseurs comme Montesquieu, Condorcet ou le philosophe Michel Foucault, dont un portrait par le peintre Gérard Fromanger apporte une touche de couleur inattendue, à des pièces uniques comme une ordonnance de Louis XIV sur la procédure criminelle ou une maquette de prison plus «humaine» conçue à l'époque où Robert Badinter était garde des Sceaux.
Mais également des documents sur des histoires individuelles méconnues de justiciables: un militaire condamné à la peine capitale pour une escroquerie, et gracié par le roi de France, ou une infanticide de 18 ans.
Entre les moulures de bois sombre et tentures d'un lieu généralement dédié à la bibliophilie, l'exposition s'achève avec le manuscrit du discours historique devant l'Assemblée nationale du 17 septembre 1981. Ces feuillets appartiennent déjà aux collections de la BnF.
– «Une passion pour la justice. Dans la bibliothèque de Robert Badinter», Bibliothèque de l'Arsenal, Paris 4e, du mardi au dimanche jusqu'au 12 décembre, entrée gratuite.