VENISE: "Pouvez-vous distinguer ce qui est réel de ce qui ne l'est pas?" demande Tilda Swinton alors que la pièce se désintègre en millions de pixels.
L'actrice britannique s'est elle aussi convertie au monde de la réalité virtuelle, mis en avant au 78e Festival du film de Venise, et en passe de devenir un média au potentiel à la fois incroyable et déconcertant.
Elle est la narratrice de "Goliath", sur la trajectoire d'un homme qui sombre dans la schizophrénie, illustrée par des effets spéciaux et des expériences interactives qui montrent sa perte de contact progressive avec la réalité.
Ce film, présenté dans la section VR (pour Réalité Virtuelle) du festival de Venise, ne représente que l'une des nombreuses expériences offertes à ceux qui sont prêts à se couvrir le visage d'un masque/casque dans l'espace exigu d'une cabine.
"Conteneur" représente une expérience particulièrement surprenante: dans un premier moment, le conteneur se remplit d'eau alors qu'une femme essaye désespérément d'échapper à la noyade, puis il devient soudainement un salon de massage où un homme essaye de contraindre une femme à des rapports sexuels, et enfin un atelier textile...
Mostra de Venise: les vainqueurs des principaux prix
Voici les vainqueurs des principaux prix décernés samedi soir lors de la cérémonie de clôture de la 78ème édition du festival de Venise.
Lion d'or du meilleur film : "L'événement" d'Audrey Diwan (France)
Lion d'argent - Grand Prix du Jury : "La main de Dieu" de Paolo Sorrentino (Italie)
Lion d'argent - Prix de la meilleure réalisation : "La part du chien" de Jane Campion (Nouvelle-Zélande)
Prix d'interprétation féminine : Penélope Cruz pour son rôle dans "Madres paralelas" de Pedro Almodovar (Espagne)
Prix d'interprétation masculine : John Arcilla pour son rôle dans "On the Job: The Missing 8" d'Erik Matti (Philippines)
Prix Marcello Mastroianni du meilleur espoir masculin ou féminin : Filippo Scotti pour son rôle dans "La main de Dieu" de Paolo Sorrentino (Italie)
Prix spécial du jury: "Il Buco" de Michelangelo Frammartino (Italie)
Prix du meilleur scénario : Maggie Gyllenhaal pour "The lost daughter" (Etats-Unis)
Le "spectateur" est immergé dans l'image, à quelques centimètres des personnages, à tel point que la sensation de réalité est viscérale et provoque quasiment une sensation de malaise.
"La réalité virtuelle est une rencontre entre théâtre immersif et technologie. Elle a un énorme potentiel qui dépasse l'imagination sur ce que les gens peuvent vivre dans l'espace et dans l'art", a expliqué à l'AFP May Abdalla, l'une des créatrices de "Goliath".
"La réalité virtuelle ne convient pas à tous les projets. Il faut trouver l'expérience adéquate", ajoute-t-elle.
«Ca va cartonner»
La VR est désormais présente dans la plupart des grands festivals de cinéma, de Sundance à Cannes, mais l'évolution rapide de ce secteur reste méconnue.
"La technologie a atteint un stade où les créateurs ne sont plus obnubilés par l'aspect technologique (...) et où la réalité virtuelle est devenue une forme d'art à part entière", estime Michel Reilhac.
A Venise, on peut voir des films à 360 degrés où le spectateur peut regarder autour de lui mais sans interagir avec les objets, mais aussi profiter d'autres expériences où il devient un avatar complètement immergé dans un monde interactif.
"Votre cerveau est trompé et on ne peut pas l'en empêcher. Quand vous êtes debout au bord d'une falaise, impossible de ne pas avoir une sensation de vertige", décrit une autre responsable de Venezia VR, Liz Rosenthal.
Les potentialités de ce secteur restent à explorer. "Vous découvrez les possibilités en travaillant avec les outils", résume May Badalla.
"Avec un film, il y a déjà un rapport sophistiqué avec le public. Ils comprennent le vocabulaire du cinéma. Mais avec la réalité virtuelle, c'est souvent leur première fois. Il faut prendre cela en compte. C'est une collaboration".
Depuis des années, la VR est censée toucher le grand public, mais sans jamais vraiment y parvenir, notamment en raison du coût des équipements. C'est seulement à partir du milieu des années 2010 que nombre de groupes comme Google, Apple et Amazon ont commencé à investir dans ce secteur.
Selon Michel Reilhac, la pandémie a toutefois accéléré la tendance, avec la possibilité d'organiser des rencontres virtuelles pour participer à des jeux par exemple.
Le potentiel de ce nouveau média a été illustré le mois dernier quand Facebook, qui détient le fabriquant de casques Oculus, a dévoilé "Horizon Workrooms", un projet permettant aux gens de travailler ensemble de manière virtuelle.
"Encore deux ou trois ans et nous verrons où nous en sommes, mais je parie que ça va cartonner", conclut-il.