À travers le prisme des dirigeants israéliens, un Iran nucléaire est une menace existentielle pour leur pays. L'ancien ministre de la Défense, Naftali Bennett, n'a pas mâché ses mots lorsqu'il a averti en 2017 : « Je n’ai aucun doute sur le fait que la nucléarisation de l'Iran est la menace existentielle n°1 pour l'État d'Israël ».
Si nous assumons qu’une guerre nucléaire éclaterait entre l’Iran et Israël, les dommages causés à Israël seraient bien plus graves du fait de sa superficie relativement petite. La superficie de l’Iran est d’environ 1.6 millions de kilomètres carrés, alors que celle d’Israël est seulement de 22,000 kilomètres carrés. Ceci veut dire que l’Iran est 70 fois plus large qu’Israël. Bennett a quant à lui confirmé qu’ « une attaque sur l’Iran ne détruirait pas le pays de la même façon qu’une attaque sur Israël par l’Iran le ferait ».
Les dirigeants iraniens ont effectivement juré de détruire Israël à maintes reprises. Le commandant en chef du Corps des gardiens de la révolution islamique, Hossein Salami, a clairement expliqué le plan du gouvernement iranien en affirmant : « Notre stratégie est de rayer Israël de la carte politique mondiale. Et il semble qu’Israël, considérant le mal qu’il est en train de commettre, se rapproche davantage de ce résultat ». De plus, le Guide suprême Ali Khamenei, qui a apparemment publié un livre détaillant comment détruire Israël, avait écrit une longue tirade sur Twitter en 2018, assurant que « le régime sioniste périra dans le futur proche ».
Que les dirigeants iraniens décident finalement d’honorer leurs promesses ou pas, l’une des préoccupations majeures d’Israël est que son ennemi devienne un État nucléaire. Selon le point de vue de Tel Aviv, la communauté internationale ne fait pas suffisamment d’efforts pour empêcher Téhéran d’obtenir des armes nucléaires, puisque la Russie, la Chine, l’Allemagne, la France et le Royaume-Uni sont toujours fidèles au Plan d’action global commun (PAGC) ou l’accord sur le nucléaire iranien.
Les autorités israéliennes s’opposent fermement à cet accord depuis son établissement en 2015. Son objectif primaire était d’empêcher le programme nucléaire iranien de manière permanente, éliminant ainsi la possibilité d’une course aux armes nucléaires dans la région, et la menace stratégique qu’un Iran doté d’armes nucléaires pourrait faire peser en raison de ses ambitions hégémoniques. Toutefois, les puissances occidentales ont renoncé à leurs demandes initiales et ont accepté de faire un compromis en signant un accord qui limite le programme nucléaire de l’Iran à un certain nombre d’années. Comme l’a dit Mohammed Javad Zarif, ministre des Affaires étrangères iranien, au groupe de réflexion du Conseil des relations extérieures à l’époque : « Mettons en place un mécanisme pour un certain nombre d’années. Pas 10, ni 15 – mais j’accepte de vivre avec moins ». C’est ainsi que sont apparues les clauses d’extinction qui ont enragé Israël.
Les clauses d’extinction permettront au régime iranien de résumer éventuellement son enrichissement en uranium autant qu’il le désire, de faire tourner autant de centrifugeuses avancées qu'il le souhaite, de rendre ses réacteurs nucléaires pleinement opérationnels, de construire de nouveaux réacteurs à eau lourde, de produire autant de combustibles pour ses réacteurs que possible et de maintenir une capacité d'enrichissement en uranium plus élevée sans aucune restriction.
Non seulement les puissances européennes, ainsi que la Russie et la Chine sont déterminées à garder l’accord sur le nucléaire, mais elles semblent également ignorer les violations les plus récentes du PAGC par l’Iran. Le mois dernier, l’Agence internationale de l'énergie atomique a rapporté que Téhéran violait toutes les restrictions de l’accord sur le nucléaire, empêchait les inspecteurs de surveiller certains de ses sites et refusait de répondre aux questions concernant les sites et activités nucléaires non-déclarés.
Pendant ce temps, bien qu’Israël voudrait que les États-Unis interviennent militairement pour empêcher l’Iran de se transformer en État nucléaire, Washington et les américains sont peu enclins à une confrontation militaire directe avec encore un autre pays du Moyen-Orient.
Avec la communauté internationale réticente à agir en réponse aux violations nucléaires iraniennes, et avec l’Iran qui se rapproche de plus en plus de devenir un État nucléaire, Israël est ainsi à cours d’options pour contrer Téhéran. Le régime iranien s’est déjà assez enrichi en uranium pour produire une bombe nucléaire, s’il le désire.
Prêts à tout pour empêcher l’Iran d’obtenir des armes nucléaires, les dirigeants israéliens semblent prendre les choses en main. Le journal koweitien Al-Jarida a rapporté la semaine dernière qu’Israël a mené une cyberattaque, qui a causé un incendie et une explosion dans le site nucléaire iranien de Natanz. D’après le journal, « il s’agit probablement d’une attaque électronique sur le réseau informatique qui contrôle les réservoirs de compression de stockage ».
Les tensions accrues entre l’Iran et Israël sur les violations nucléaires de Téhéran pourraient mener à une plus grande guerre. Afin d’éviter une confrontation militaire majeure, la communauté internationale doit agir immédiatement pour demander des comptes aux dirigeants iraniens pour leurs violations nucléaires, et rassurer les puissances régionales que l’Iran ne deviendra pas un État nucléaire.
Le Dr Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain formé à Harvard. Twitter: @Dr_Rafizadeh
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Ce texte est la traduction d’un article paru sur ArabNews.com