Au procès Charlie, les témoignages bouleversants des survivantes du massacre

La caricaturiste Corinne Rey était sur les lieux le jour de l’attentat (Photo, Thomas SAMSON/AFP).
La caricaturiste Corinne Rey était sur les lieux le jour de l’attentat (Photo, Thomas SAMSON/AFP).
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Publié le Mercredi 09 septembre 2020

Au procès Charlie, les témoignages bouleversants des survivantes du massacre

  • « C'était l'effroi en moi. C'était la détresse, je n'arrivais plus à réfléchir » , raconte la dessinatrice Corinne Rey, alias Coco
  • « C'est le talent qu'on a tué ce jour-là, c'étaient des modèles pour moi », juge Coco en rendant hommage aux disparus

PARIS : « J'avais accepté de mourir à ce moment-là » : au procès des attentats de janvier 2015, des survivants de la tuerie de Charlie Hebdo ont replongé mardi devant la Cour d'assises spéciale dans « l'horreur » du carnage auquel ils ont assisté « perdus » et « impuissants ».

« C'est l'impuissance qui est le plus dur à porter dans ce qui s'est passé » : les mains jointes sur le pupitre, la dessinatrice Corinne Rey, alias Coco, cherche ses mots en agitant les doigts, la gorge nouée par l'émotion.

« C'était l'effroi en moi. C'était la détresse, je n'arrivais plus à réfléchir », ajoute la caricaturiste, veste kaki et cheveux noirs rassemblés en chignon, en racontant s'être « longtemps sentie coupable ».

Le 7 janvier 2015, c'est elle qui avait composé le code de la porte d'entrée, sous la menace d'une kalachnikov, qui a permis aux frères Chérif et Saïd Kouachi de pénétrer au sein de la rédaction et d'y commettre leur carnage.

« Ils m'ont dit : on veut Charlie, on veut Charb. J'étais dévastée, comme dépossédée de moi, je n'arrivais plus à rien », raconte la dessinatrice. « Je sentais que les terroristes approchaient de leur but, je sentais une excitation à côté de moi ».

A peine entrés dans les bureaux, les terroristes tirent sur Simon Fieschi, webmaster de l'hebdomadaire. L'aîné, Saïd, monte la garde dans l'entrée, quand le cadet, Chérif, se rue dans la salle de réunion. Coco, elle, court se cacher sous un bureau.

Depuis la salle de rédaction, Sigolène Vinson, ancienne avocate devenue chroniqueuse judiciaire pour l'hebdomadaire, entend deux coups de feu. « J'ai croisé le regard de Charb: je pense que Charb avait compris », confie la quadragénaire, jean délavé et baskets noires.

« C'est mon tour »

Chérif Kouachi entre alors dans la salle et ouvre le feu sur les personnes présentes. « Ce n'était pas des rafales, c'était des coups secs, des bruits sourds », précise la journaliste, qui a alors « rampé » pour se réfugier près d'un muret.

« Un silence s'est fait, un silence de plomb comme je n'en ai jamais entendu », raconte Sigolène Vinson, qui a alors entendu des bruits de pas : « j'ai compris que le tueur m'avait vu et qu'il me suivait. J'ai pensé, c'est mon tour ».

Mais son tour ne vient pas : Chérif Kouachi se penche vers elle et lui dit qu'il l'épargne « parce qu'il ne tue pas les femmes », explique la journaliste avant de s'interrompre quelques instants, prise de sanglots.

Lui aussi dans la salle, le journaliste d'investigation Laurent Léger ne doit son salut qu'à un « réflexe de survie », qui l'a fait se jeter sous une table.

La tuerie « était destinée à tout le monde. J'ai eu une chance inouïe. J'ai eu un réflexe quasi animal, pour échapper à ce déluge de balles, de feu et de mort », témoigne le survivant, en décrivant d'une voix calme une scène « épouvantable ».

Au total, dix personnes sont mortes sous les balles des terroristes au sein de la rédaction, dont les caricaturistes emblématiques Charb, Cabu et Wolinski. Un « massacre » qui hante encore les souvenirs des survivants, cinq ans après l'attaque.

« Ils sont tous morts »

« Il y avait des éclats d'os qui brillaient partout, c’étaient des paillettes. Et de la matière que j'ai identifiée comme de la cervelle... Quelques secondes avant c'était de l'intelligence, c'était de l'humanisme, c'était de l'humour », lâche Sigolène Vinson, avec des mots aussi crus que poétiques.

Sur les bancs de la salle d'audience comme dans les box où se trouvent une partie des 14 accusés, jugés pour leur soutien aux frères Kouachi et à Amédy Coulibaly, tueur de l'Hyper Cacher, un lourd silence s'abat.

« J'ai enjambé les corps. J'ai pris mon téléphone, appelé les pompiers et j'ai dit "ils sont tous morts », poursuit Mme Vinson, son masque imbibé de larmes. « Un doigt s'est levé au fond de la salle : "non, moi je ne suis pas mort". C'était Riss », désormais directeur de la publication du journal. 

« C'est le talent qu'on a tué ce jour-là, c'étaient des modèles pour moi », juge Coco en rendant hommage, comme les autres « victimes sans blessures apparentes », aux disparus. « C'étaient des gens d'une extrême gentillesse qui avaient une manière d'être drôles ... C'est pas facile d'être drôles, mais ils y arrivaient très bien ».

Cinq ans après cette attaque qui a décimé la rédaction de l'hebdomadaire, Coco continue de dessiner pour Charlie Hebdo afin d' « exorciser ». Sigolène Vinson a « fui » près de la mer, dans le sud de la France. Laurent Léger continue de publier des enquêtes, mais plus pour Charlie.

Les témoignages des survivants se poursuivent mercredi matin avec celui de Riss.


Condamnation de Marine Le Pen: Macron rappelle au gouvernement l'indépendance de la justice

Le président français Emmanuel Macron (Photo AFP)
Le président français Emmanuel Macron (Photo AFP)
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  • Le président français Emmanuel Macron a « rappelé » que l'autorité judiciaire est indépendante et que les magistrats doivent être protégés
  • Le chef de l'État a également affirmé que « tous les justiciables ont droit au recours ».

PARIS : Mercredi en Conseil des ministres, le président français Emmanuel Macron a « rappelé » que l'autorité judiciaire est indépendante et que les magistrats doivent être protégés, après la condamnation de la cheffe de l'extrême droite Marine Le Pen qui a suscité des attaques contre les juges, ont rapporté des participants.

Le chef de l'État a également affirmé que « tous les justiciables ont droit au recours », selon ces sources. La justice a déjà fait savoir qu'un nouveau procès en appel pourrait se tenir dans des délais qui laissent une porte ouverte à une éventuelle candidature présidentielle en 2027 de la leader du Rassemblement national (RN), principale formation d'extrême droite française. 

Devant la presse, à l'issue du Conseil des ministres, la porte-parole du gouvernement Sophie Primas a rapporté mercredi les propos du chef de l'État.

« La première chose qu'il a rappelée, a poursuivi Mme Primas, est que la justice est évidemment indépendante et prend ses décisions en toute indépendance, et qu'il faut donc la respecter comme l'un des piliers de notre démocratie. La première, a-t-elle dit, est que la justice est indépendante et qu'elle prend ses décisions en toute indépendance et qu'il faut donc la respecter comme un pilier de notre démocratie.

« La troisième chose, pour rappeler que les menaces qui sont faites à l'encontre des magistrats sont absolument insupportables et intolérables, puisque nous sommes encore une fois dans une démocratie. Et la justice est tout à fait indépendante et doit être respectée », a-t-elle ajouté.

« Et la troisième chose, pour rappeler que chacun a le droit à une justice équivalente et que le droit est le même pour tous. »


Bac: l'épreuve de maths en première se précise pour l'an prochain

La ministre de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Elisabeth Borne, lors d'une conférence de presse à l'issue d'une visite à l'école élémentaire Claude-Monnet à Rueil-Malmaison, en banlieue parisienne, le 28 mars 2025. (Photo Thomas SAMSON / AFP)
La ministre de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Elisabeth Borne, lors d'une conférence de presse à l'issue d'une visite à l'école élémentaire Claude-Monnet à Rueil-Malmaison, en banlieue parisienne, le 28 mars 2025. (Photo Thomas SAMSON / AFP)
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  • Le Conseil supérieur de l'éducation (CSE, qui rassemble syndicats, associations de parents, collectivités, etc.) a majoritairement voté contre le projet de décret et d'arrêté
  • L'ex-ministre de l'Éducation nationale, Gabriel Attal, avait annoncé en décembre 2023 la création de cet examen sur le modèle de l'épreuve anticipée de français pour le baccalauréat en fin de première,

PARIS : Le projet d'épreuve de mathématiques en classe de première pour l'an prochain, qui vise à mettre en œuvre le « choc des savoirs » annoncé par l'ex-ministre de l'Éducation nationale Gabriel Attal, a été présenté mardi devant une instance consultative de l'Éducation nationale, étape-clé avant sa publication.

Le Conseil supérieur de l'éducation (CSE, qui rassemble syndicats, associations de parents, collectivités, etc.) a majoritairement voté contre le projet de décret et d'arrêté instaurant cette « épreuve terminale de culture mathématique aux baccalauréats général et technologique ».

Ils ont recueilli 0 voix pour, 27 contre, 31 abstentions et 4 refus de prendre part au vote (l'administration ne votant pas dans cette instance), un vote indicatif qui n'empêche pas la mise en œuvre de la réforme, selon des sources syndicales.

Cette épreuve écrite d'une durée de deux heures, qui entrera en vigueur au printemps 2026, sera « affectée d'un coefficient 2 » (points pris sur l’épreuve du Grand oral en terminale), selon ces textes, consultés par l'AFP.

L'ex-ministre de l'Éducation nationale, Gabriel Attal, avait annoncé en décembre 2023 la création de cet examen sur le modèle de l'épreuve anticipée de français pour le baccalauréat en fin de première, un projet confirmé en novembre 2024 par sa successeure, Anne Genetet.

Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU, principal syndicat du second degré (collèges et lycées), qualifie auprès de l'AFP la mesure de « rafistolage supplémentaire du bac Blanquer », décidé en 2019 par l'ex-ministre Jean-Michel Blanquer.

Pour Jérôme Fournier, secrétaire national du SE Unsa, la nouvelle épreuve « alourdit la fin de l'année pour les élèves et les correcteurs ».

La première partie, qui est commune à tous les élèves, sera sous forme de QCM et pourrait être corrigée automatiquement, ce à quoi « de nombreuses organisations syndicales sont opposées », a-t-il ajouté, tandis que la deuxième partie devrait consister en des résolutions de problèmes.

Des projets de textes ont par ailleurs été votés au CSE relatif à « la mise en place du +parcours renforcé+ en classe de seconde générale et technologique » ou professionnelle à partir de la rentrée 2026, avec trois votes pour, 45 contre et 13 abstentions.

Mis en place par la ministre Élisabeth Borne, ce parcours est destiné aux élèves n’ayant pas obtenu le diplôme du brevet. Son organisation relèvera « de l’autonomie de l’établissement sur la base indicative de deux heures hebdomadaires sur tout ou partie de l’année », selon le projet d'arrêté.

Sophie Vénétitay déplore « une coquille vide » tandis que Tristan Brams (CFDT Éducation) regrette l'absence de « moyens supplémentaires ».  


Boualem Sansal fait appel de sa condamnation en Algérie, indique son avocat français

Son annonce intervient deux jours après un appel entre Emmanuel Macron et le président algérien Abdelmadjid Tebboune pour relancer le dialogue entre les deux pays, au cours duquel le sort de Boualem Sansal a été évoqué. (AFP)
Son annonce intervient deux jours après un appel entre Emmanuel Macron et le président algérien Abdelmadjid Tebboune pour relancer le dialogue entre les deux pays, au cours duquel le sort de Boualem Sansal a été évoqué. (AFP)
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  • L'écrivain franco-algérien Boualem Sansal a fait appel de sa condamnation à cinq ans de prison en Algérie, a indiqué à l'AFP mercredi son avocat français, François Zimeray
  • Cet appel, a précisé Me Zimeray, qui a appelé à un "geste humanitaire" pour libérer son client âgé de 80 ans, n'empêche pas de le gracier

PARIS: L'écrivain franco-algérien Boualem Sansal a fait appel de sa condamnation à cinq ans de prison en Algérie, a indiqué à l'AFP mercredi son avocat français, François Zimeray.

Cet appel, a précisé Me Zimeray, qui a appelé à un "geste humanitaire" pour libérer son client âgé de 80 ans, n'empêche pas de le gracier. Son annonce intervient deux jours après un appel entre Emmanuel Macron et le président algérien Abdelmadjid Tebboune pour relancer le dialogue entre les deux pays, au cours duquel le sort de Boualem Sansal a été évoqué.