En Allemagne, un scrutin peu reluisant devient soudain intéressant

Annalena Baerbock, candidate à la chancellerie et co-dirigeante du parti Vert allemand, prononce un discours baptisé "Berliner Reden : Pour un nouveau contrat social" à l'Allianz Forum à Berlin le 20 août 2021. (Kay Nietfeld/dpa via AP)
Annalena Baerbock, candidate à la chancellerie et co-dirigeante du parti Vert allemand, prononce un discours baptisé "Berliner Reden : Pour un nouveau contrat social" à l'Allianz Forum à Berlin le 20 août 2021. (Kay Nietfeld/dpa via AP)
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Publié le Lundi 23 août 2021

En Allemagne, un scrutin peu reluisant devient soudain intéressant

En Allemagne, un scrutin peu reluisant devient soudain intéressant
  • Le moins que l'on puisse dire, c'est que ces élections apparaissent bizarres puisque nombre de candidats médiocres font tout leur possible pour ruiner leurs chances de succéder à Angela Merkel
  • Cette auto- destruction politique inutile a frappé les deux partis qui se placent à la tête de la course

Voilà que la campagne, apparemment interminable, qui précède les élections législatives allemandes touche à sa fin. Le vote est prévu pour le 26 septembre. Le moins que l'on puisse dire, c'est que ces élections apparaissent bizarres puisque nombre de candidats médiocres font tout leur possible pour ruiner leurs chances de succéder à Angela Merkel.

Au départ, la course semblait se jouer au coude à coude entre la coalition de centre-droit de l'Union chrétienne-démocrate/Union chrétienne-sociale, qui règne depuis longtemps, et le parti des Verts, jeune mais florissant. Peu importe le vainqueur, il était fort probable qu'ils formeraient une coalition bipartite, qui n'allait pas apporter de changement majeur à la politique de l'Allemagne, en dépit de son souci de l'environnement.

Mais ce scénario ne tenait pas compte de la pulsion de mort qui habite ces deux partis. Pour commencer, Annalena Baerbock, candidate des Verts à la chancellerie, s'est avérée mal préparée pour le prime time. Du haut de ses 40 ans, elle a fait preuve d’une grande hésitation lors de sa campagne et a été mêlée à un scandale de plagiat d’un livre écrit à la va-vite. Sa position, ainsi que celle de son parti, en ont  pâti, ce qui a affaibli leur élan préélectoral.

Mais la CDU-CSU n'a pas su mettre à profit les déboires de Mme Baerbock. Bien au contraire, leur candidat insipide Armin Laschet, qui dirige la puissante province de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, s'est révélé tout aussi désastreux, pour ne pas dire plus. À la fin du mois de juillet, Laschet a lui-aussi dû présenter des excuses pour plagiat et pour sa réaction dérisoire aux inondations qui ont meurtri son État.

M. Laschet a été filmé en train de rire et de plaisanter lors d'une visite dans une ville sinistrée par les inondations qui ont fait plus de 180 morts. Inconscient que les caméras filmaient, il a révélé sa véritable nature froide. Dans le sillage de cet incident, un sondage réalisé par la ZDF a révélé que sa cote de popularité avait chuté de 12 points. Cet acte d'auto-sabotage inouï a fait dérailler la victoire qui semblait se dessiner pour Laschet.

 

L'idée qu'une coalition bipartite gouvernera l'Allemagne s'est évanouie. Loin de là, les statistiques électorales laissent entrevoir un gouvernement bien moins solide, regroupant trois partis au moins.

Dr. John C. Hulsman

 

Cette auto- destruction politique inutile a frappé les deux partis qui se placent à la tête de la course. Selon un sondage réalisé à la mi-août par Politico, la CDU/CSU a connu son plus bas niveau à 25 %. Les Verts affichent une tendance à la baisse à 19 %, le Parti social-démocrate (SPD), parti de centre-gauche, suit de près à 18 %, le Parti libéral-démocrate (FDP), favorable aux entreprises, à 12 %, et le Parti alternative pour l'Allemagne (AfD), parti d'extrême droite, à 11 %. Au milieu de toute cette confusion électorale, une chose est claire. L'idée qu'une coalition bipartite gouvernera l'Allemagne s'est évanouie. Loin de là, les statistiques électorales laissent entrevoir un gouvernement bien moins solide, regroupant trois partis au moins.

Voilà sans doute la véritable histoire des élections allemandes, qui n'a pas été racontée. La puissance économique et l'État dominant de l'Europe seront désormais accablés par un gouvernement tripartite, faible et encombrant, et ce dans un avenir proche. Les réponses politiques de l'Allemagne aux événements importants survenus dans le monde, vont ralentir davantage l'élan de ce pays qui va se replier encore plus sur lui-même. Cette situation est loin de répondre aux souhaits de l'Allemagne et de toute l'Europe.

Tandis que les deux candidats favoris s'effacent, Olaf Scholz, le ministre des Finances compétent mais sans charisme appartenant à l'actuelle coalition CDU-SPD et candidat du SPD, a profité de la bonne cote de popularité de son parti qui n'a pas bougé pendant que ses deux rivaux s’écroulaient. M. Scholz a habilement attaché son wagon au gouvernement apprécié de tous de Mme Merkel. Il a affirmé calmement que s'il accédait au poste de chancelier, bon nombre de politiques resteraient immuables. Caché sous la couverture de la stabilité de Merkel - que les Allemands admirent même si elle n'a pas réalisé d'importantes avancées politiques - Scholz se retrouve à une distance suffisante pour rattraper à la fois Baerbock et Laschet.

A ce jour, un quart de l'électorat allemand, peu enthousiaste, n’a pas encore décidé quel nom il va glisser dans les urnes ; cela est tout à fait compréhensible compte tenu de la tendance à l'autodestruction observée chez la CDU-CSU et les Verts. Toutefois, la véritable histoire ici ne se limite pas à la course de chevaux qui caractérise les élections allemandes. A la lumière de l'autodestruction manifeste à laquelle se livrent la CDU et les Verts, une coalition tripartite s’impose ; une coalition avec laquelle l'Allemagne conservera pour longtemps son statut de zone sans politique.

Dr. John C. Hulsman est président et associé directeur de John C. Hulsman Enterprises, une importante société de conseil en risque politique mondial. Il est également chroniqueur principal pour City AM, le journal de la ville de Londres.

Il peut être contacté via chartwellspeakers.com

NDLR :  L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com