PARIS: Le sultanat d’Oman, malgré ses particularités culturelles, géographiques et sociétales, reste relativement méconnu du grand public. C’est pour combler cette lacune qu’Arab News en français est parti à la rencontre de l’artiste omanais Abdelaziz al-Shukairi.
C’est en 2014, alors qu’il n’est âgé que de 16 ans, qu’Abdelaziz al-Shukairi, découvre l’univers particulièrement imaginatif du photographe omanais Ali al-Sharji. «Ce fut une véritable révélation artistique. J’ai suivi sa voie en utilisant la photographie comme un moyen d’exprimer mes idées totalement imaginaires et décalées.»
Idées singulières
Il est intéressant à plus d’un titre d’analyser les mises en scènes photographiques d’Abdelaziz al-Shukairi. L’artiste aime les idées singulières, celles qui sortent de l'ordinaire, mais garde constamment à l’esprit la spécificité omanaise. La photographie qui traduit le plus fidèlement son esprit et son art est sans doute celle qu’il a prise pendant le mois du ramadan. À cette occasion, il a mis en scène un scénario totalement invraisemblable, mais d’une intelligence et d’une grâce artistique rares: on y découvre trois jeunes Omanais qui portent des casques de moto et tiennent à leur ceinture des téléphones portables dernier cri, mais aussi leur kandjar, l’emblématique poignard recourbé omanais. Ces étonnants personnages se sont mis en quête d’un morceau d’une fusée chinoise qui a subitement perdu tout contrôle.
L’une des singularités d’Abdelaziz al-Shukairi réside également dans le fait qu’il appartient au pop art. «Mes idées fantaisistes sont devenues une signature dont la présence est également sensible dans mes réalisations de pop art.»
Son œuvre la plus connue est celle qui représente Burj Al Sahwa («la tour de l’Horloge»), l’édifice emblématique de Mascate, la capitale omanaise. «Si Dubaï possède Burj Khalifa [«la tour de Khalifa»], Mascate, elle, possède Burj Al Sahwa. Notre symbole national est la dague appelée “kandjar” et les deux épées croisées, mais Burj Sahwa représente notre emblème patrimonial. Sur les réseaux sociaux, j’ai constaté que, contrairement à Burj Khalifa et Dubaï, les gens n’associent pas Mascate à Burj Al Sahwa. Mon travail artistique a pour but de faire connaître mon pays et son patrimoine culturel», explique l’artiste.
Abdelaziz al-Shukairi utilise le pop art comme un moyen pour sensibiliser les spectateurs étrangers aux us et coutumes omanaises. Si la boisson la plus populaire l'hiver reste le thé Kayak, les chips omanaises très réputées jouissent également, en toute saison, d’un incontestable prestige.
Combat intellectuel
L'œuvre de Abdelaziz al-Shukairi ne saurait être réduite à une vitrine éminemment esthétique du sultanat d'Oman. Il mène un combat intellectuel et le revendique. «Ces deux dernières années, j’ai entendu beaucoup d’histoires qui réduisaient le rôle de la femme omanaise à celui d’une personne au foyer dont la seule fonction est d’éduquer ses enfants. Mes œuvres tentent justement de dénoncer ce type de récit. Je trouve qu’il est important de dire qu’il faut laisser toute la liberté aux femmes – comme c’est le cas avec nous, les hommes – en évitant de réduire leur fonction sociale à une case prédéterminée.»