Négocier avec un régime paria comme l’Iran, dont le modus operandi consiste à multiplier les assassinats et les enlèvements et à promouvoir le terrorisme, ne ferait que le rendre plus fort. Ledit régime s’est tellement enhardi qu’il a tenté de kidnapper une journaliste new-yorkaise –citoyenne irano-américaine – critique envers le régime théocratique.
La semaine dernière, la justice américaine a inculpé quatre iraniens – Alireza Shavaroghi Farahani, alias Vezerat Salimi, et Haj Ali, 50 ans; Mahmoud Khazein, 42 ans; Kiya Sadeghi, 35 ans; et Omid Nouri, 45 ans. Tous sont accusés d’être des agents de renseignement du régime de Téhéran et d’avoir comploté afin d’enlever une journaliste. Une Iranienne résidant en Californie, Niloufar Bahadorifar, est également accusée de participation au financement du plan d’enlèvement, de complot pour violation des sanctions contre l’Iran, de fraude bancaire et électronique ainsi que de blanchiment d’argent.
Selon Audrey Strauss, procureur par intérim des États-Unis pour le district Sud de New York, les agents iraniens «avaient prévu d’enlever une citoyenne américaine d’origine iranienne critique du régime autocratique. Ils avaient l’intention d’emmener de force leur victime en Iran, où son sort aurait été –au mieux – incertain». Il est extrêmement préoccupant que Téhéran ait des agents aux États-Unis.
Le régime iranien aurait engagé des enquêteurs privés à Manhattan afin de surveiller la victime visée et prévoyait de l’emmener au Venezuela en bateau avant de la conduire en Iran. Le ministère de la Justice a fourni une explication détaillée de l’incident: «Dans le cadre du projet d’enlèvement, le réseau de renseignement dirigé par M. Farahani a également recherché des moyens de conduire la victime hors des États-Unis pour l’emmener en Iran. M. Sadeghi, par exemple, s’est mis à la recherche d’un hors-bord de type militaire pour une évacuation maritime hors de New York. Il a également œuvré afin de trouver des services de transport maritime au départ de New York et à destination du Venezuela, dont le gouvernement entretient des relations amicales avec l’Iran. M. Khazein, quant à lui, s’est chargé d’étudier les trajets entre le domicile de la victime et le quartier riverain de Brooklyn, ainsi que l’emplacement du domicile de la victime par rapport au Venezuela et à Téhéran.»
«Téhéran tente de semer la peur partout dans le monde, tout en adressant un avertissement à son peuple: toute opposition au régime sera sévèrement réprimée.» – Dr Majid Rafizadeh
Le régime iranien entretient de bonnes relations avec le Venezuela où il renforce ses liens militaires, politiques et économiques. Les dirigeants iraniens semblent se servir du pays dans le cadre d’un programme plus large qui vise à accroître l’influence de Téhéran et la présence de ses mandataires en Amérique latine et du Nord. Caracas a délivré un grand nombre de passeports aux Iraniens afin de leur permettre de se rendre en Amérique du Nord et en Europe.
Les États-Unis s’inquiètent de plus en plus de la présence de mandataires iraniens au Venezuela. L’ambassadeur Nathan Sales, coordinateur du département d’État pour la lutte contre le terrorisme, a déclaré en janvier dernier: «Nous sommes préoccupés par le fait que le président du Venezuela, Nicolas Maduro, donne l’asile à plusieurs groupes terroristes… partisans et sympathisants du Hezbollah.»
Ce n’est pas la première fois que le régime iranien tente d’enlever des dissidents et des journalistes ou de les ramener en Iran pour les réduire au silence. Rouhollah Zam, célèbre journaliste opposé au régime, a été exécuté en Iran fin 2020. Longtemps exilé en France, il a été enlevé par des agents de renseignement du régime iranien peu de temps après avoir quitté le pays pour l’Irak en octobre 2019. Il a dirigé le site d’information en ligne Amad News sur la plate-forme de messagerie cryptée Telegram, qui réunissait plus d’un million d’abonnés.
Téhéran tente de semer la peur partout dans le monde, tout en adressant un avertissement à son peuple: toute opposition au régime sera sévèrement réprimée.
Dans d’autres cas, l’Iran a assassiné des dissidents en territoire étranger et a même essayé de mener des attaques terroristes. En juillet 2018, un projet d’attentat avait été déjoué à Paris lors d’un grand rassemblement annuel auquel j’ai assisté, en présence du ministre canadien des Affaires étrangères, John Baird. Quelques mois plus tard, un diplomate iranien et d’autres personnes d’origine iranienne ont été arrêtés en France, en Belgique et en Allemagne pour leur implication dans un complot terroriste commandité par le régime iranien, selon le rapport des services de renseignement français. Un autre incident est l’assassinat d’Ahmad Mola Nissi, un citoyen néerlandais d’origine iranienne fortement opposé au régime. Il a été abattu devant la porte de son appartement en novembre 2017. Les autorités néerlandaises ont reconnu l’existence de «sérieux indices» selon lesquels le gouvernement iranien aurait commandité le meurtre. Un opposant politique au régime de Téhéran, Mohammed Reza Kolahi Samadi, a également été tué dans des circonstances similaires à Amsterdam en 2015. Il avait été pris pour cible en raison de son opposition au gouvernement iranien depuis les années 1980.
En conclusion, l’administration Biden et l’Union européenne (UE) ne devraient pas négocier avec un régime qui se livre au terrorisme, en plus d’enlever des dissidents politiques et de les assassiner sur leurs propres territoires. Les pourparlers devraient être interrompus jusqu’à ce que le régime iranien change de comportement.
Le Dr Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain formé à Harvard. Twitter: @Dr_Rafizadeh
NDLR : L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com