ANKARA : Fermer un accès transfrontalier permettant d'acheminer de l'aide en Syrie à des millions de personnes, comme le souhaite Moscou, serait "inhumain" et pourrait provoquer un nouvel afflux migratoire, a estimé jeudi le président du Croissant-Rouge turc.
L'extension pour un an de cet accès entre la Turquie et la Syrie devait faire l'objet d'un vote jeudi au Conseil de sécurité de l'ONU, mais celui-ci a été reporté pour permettre des négociations visant à vaincre les réticences russes.
"Le sort de millions de personnes dans le besoin risque d'être négativement affecté à cause d'un veto (russe) (...) Une telle décision serait injuste et inhumaine", a déclaré à l'AFP le président du Croissant-Rouge turc et vice-président de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, Kerem Kinik.
La Syrie est déchirée depuis 2011 par une guerre civile déclenchée par la répression de manifestations pro-démocratie par le régime du président Bachar al-Assad.
Le conflit, dans lequel des puissances étrangères se sont impliquées, a fait près d'un demi-million de morts et des millions de déplacés, notamment dans le nord-ouest, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme, une ONG.
La Russie, principal soutien de M. Assad, exige le rétablissement de la souveraineté de Damas sur l'ensemble du territoire, d'où son opposition à l'acheminement humanitaire en dehors du contrôle du régime syrien.
L'autorisation transfrontalière de l'ONU, qui permet d'acheminer l'aide sans l'aval du régime, expire samedi.
Elle permet de transporter l'aide humanitaire aux Syriens depuis la Turquie, via le point d'entrée de Bab al-Hawa (nord-ouest de la Syrie) afin d'atteindre plus de trois millions de personnes dans la région rebelle d'Idleb.
En privant ces dernières d'une aide "vitale", la non-prolongation de l'accès transfrontalier risque en outre de provoquer une nouvelle vague de migration vers la Turquie, qui accueille déjà près de quatre millions de Syriens, selon M. Kinik.
"En cas de fermeture de la frontière, cette population serait privée de soutien et le risque de migration pourrait être accru", a-t-il déclaré.
En visite jeudi à la frontière turque avec la Syrie, le commissaire européen chargé de la gestion des crises, Janez Lenarcic, a lui aussi appelé à garder ouvert l'accès humanitaire.
"L'Union européenne prie instamment les membres du Conseil de sécurité de s'entendre sur le renouvellement (...) permettant l'acheminement d'une aide vitale", a-t-il dit.