WASHINGTON: Américains et Européens ont exprimé mardi leur "inquiétude" face à la décision de Téhéran de s'affranchir un peu plus de ses engagements en matière nucléaire, ce qui compromet encore les efforts pour sauver l'accord international de 2015.
L'agence internationale de l'énergie atomique a fait savoir, dans un rapport, que l'Iran comptait "produire de l'uranium métal avec un taux d'enrichissement de 20%", en violation de ses engagements internationaux.
"Les opérations ont commencé", a confirmé le représentant de l'Iran auprès de l'agence onusienne, Kazem Gharibabadi, cité par l'agence iranienne Irna, en assurant que celles-ci visaient à améliorer "la production de produits pharmaceutiques".
Mais les occidentaux craignent que, sous couvert de recherches scientifiques, l'Iran ne cherche à se doter de l'arme atomique.
"C'est inquiétant que l'Iran ait choisi l'escalade (...) avec des expériences qui ont de l'intérêt pour la recherche d'armes nucléaires", a commenté le porte-parole du département d'État, Ned Price lors d'un point-presse, en l'appelant à mettre un terme à cette "provocation".
"L'Iran n'a aucun besoin civil crédible de poursuivre des activités de production ou de R&D sur l'uranium métal, qui constituent une étape clé du développement d'une arme nucléaire", ont renchéri les ministres des Affaires étrangères de la France, de l'Allemagne et du Royaume-Uni, en faisant part dans un communiqué commun de leur "grande préoccupation".
«Pas en arrière»
Après de longues et âpres négociations, ces cinq pays, ainsi que la Chine et la Russie, avaient conclu, en 2015 à Vienne, un accord sur le programme nucléaire de Téhéran.
Il offrait à l'Iran un allègement des sanctions occidentales et onusiennes en échange de son engagement à ne jamais se doter de l'arme atomique, et d'une réduction drastique de son programme nucléaire, placé sous un strict contrôle de l'ONU.
Mais cet accord a été torpillé en 2018 par la décision de l'ex-président américain Donald Trump de s'en retirer et de rétablir les sanctions américaines. En riposte, l'Iran a renoncé à une partie de ses engagements.
À son arrivée à la Maison Blanche en janvier, Joe Biden a annoncé son intention de revenir dans cet accord et des négociations ont repris en avril dans la capitale autrichienne entre les pays signataires pour définir le cadre de ce retour.
Mais en février, Téhéran a imposé des restrictions aux vérifications menées par l'AIEA et a débuté la production d'uranium métal à des fins de recherche, un sujet sensible, car cette matière peut être utilisée dans la fabrication d'armes nucléaires.
En décidant désormais de passer à un taux d'enrichissement supérieur, "l'Iran fait peser un risque sur la possibilité de conclure avec succès les discussions de Vienne", ont estimé les ministres européens.
"C'est un nouveau pas en arrière de la part de l'Iran alors que nous avons montré notre intention sincère de revenir" dans l'accord de Vienne, a également commenté Ned Price.
"De telles provocations ne donneront aucun levier à l'Iran dans les discussions", a-t-il ajouté, en appelant la république islamique "à mettre un terme à cette surenchère, à revenir à Vienne pour de réelles négociations, et à être prêt à terminer le travail entamé en avril".
Ces pourparlers sont actuellement au point mort. "Ils ne reprendront pas cette semaine", selon un diplomate européen qui dit ne pas avoir de visibilité, alors que le nouveau président iranien, Ebrahim Raïssi, un ultra-conservateur, entre en fonction en août.