ALGER: Un activiste et figure du mouvement contestataire du Hirak a été arrêté par les gardes-côtes algériens tandis qu'il tentait de traverser la Méditerranée clandestinement pour rejoindre l'Espagne, a-t-on appris mardi auprès de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH).
Chems Eddine Laalami, dit Brahim, a été intercepté en compagnie d'autres "harragas", ces jeunes clandestins qui quittent les côtes algériennes à bord d'embarcations de fortune dans l'espoir de gagner l'Espagne.
Selon des médias locaux, les gardes-côtes avaient appréhendé 14 "harragas" dans la nuit de dimanche à lundi au large d'Oran (nord-ouest), dont "un activiste politique".
Figure emblématique du Hirak, Brahim Laalami, un tailleur de 30 ans, avait manifesté au début du mois de février 2019 à Bordj Bou Arreridj, près d'Alger, pour dénoncer la candidature à un cinquième mandat de l'ancien président Abdelaziz Bouteflika.
Un soulèvement populaire pacifique avait éclaté peu après dans les grandes villes algériennes, forçant M. Bouteflika à démissionner deux mois plus tard.
Depuis, M. Laalami a été arrêté à plusieurs reprises, poursuivi et condamné lors de plusieurs procès. Le 15 février, il s'était vu infliger deux ans de prison ferme, assortis d'une amende de 200 000 dinars (1 250 euros). Il avait ensuite bénéficié d'une grâce présidentielle, avec plusieurs dizaines de détenus du Hirak.
Il risque à nouveau la prison après sa tentative de départ clandestin.
"Son cas à lui seul résume le drame de la jeunesse algérienne", a expliqué Saïd Salhi, vice-président de la LADDH.
"Après avoir renoué avec l'espoir suscité par le Hirak, les jeunes sombrent dans la désillusion et le désespoir au point de tenter la 'Harga' au péril de leur vie", a-t-il ajouté.
Le mot "harraga" se réfère à la pratique des jeunes clandestins qui brûlent souvent leurs papiers en arrivant à destination, afin d'éviter d'être rapatriés.
"Malheureusement, devant le blocage des horizons, les jeunes ont le regard rivé sur l'autre rive (de la Méditerranée)", a déploré M. Salhi.
L'Algérie a voté en 2009 une loi visant à "combattre l'émigration clandestine" prévoyant des peines allant jusqu'à six mois d'emprisonnement, mais cela n'a pas réduit les départs. Au contraire, le phénomène s'amplifie.
Déterminé à briser le Hirak, la pouvoir algérien a interdit ses manifestations et multiplie les poursuites judiciaires contre opposants, activistes, journalistes et universitaires.
Quelque 300 personnes sont actuellement derrière les barreaux pour des faits en lien avec le Hirak, selon le Comité national pour la libération des détenus.