Emmanuel Carrère récompensé par le prix Princesse des Asturies de Littérature

«Sans être hispanophone, malheureusement pour moi, j'ai un goût assez vif pour la littérature hispanique». (Photo, AFP)
«Sans être hispanophone, malheureusement pour moi, j'ai un goût assez vif pour la littérature hispanique». (Photo, AFP)
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Publié le Jeudi 10 juin 2021

Emmanuel Carrère récompensé par le prix Princesse des Asturies de Littérature

  • Auteur reconnu, Emmanuel Carrère a connu de nombreux succès en librairies, se classant régulièrement en tête des ventes de romans
  • Il a aussi fait partie du jury du Festival de Cannes en 2010 et de celui de Venise en 2015

MADRID: L'écrivain français Emmanuel Carrère s'est vu décerner mercredi le prestigieux prix espagnol Princesse des Asturies de Littérature pour une œuvre "ô combien personnelle" qui "efface les frontières entre réalité et fiction".

Le jury, présidé par Santiago Muñoz Machado, directeur de l'Académie Royale Espagnole, a également estimé qu'Emmanuel Carrère avait dressé dans son œuvre "un portrait incisif de la société actuelle" et qu'il avait "exercé une influence notable sur la littérature de notre époque".

"Sans être hispanophone, malheureusement pour moi, j'ai un goût assez vif pour la littérature hispanique", a déclaré l'écrivain. "Et puis, c'est dans le monde hispanique où mes livres suscitent le plus d'intérêt, et ça, ça me rend très heureux. J'ai l'impression d'une certaine affinité avec les lecteurs espagnols", a-t-il ajouté.

Âgé de 63 ans, Emmanuel Carrère, qui est également scénariste, journaliste, comédien, biographe, cinéaste et documentariste, est notamment l'auteur de "L'adversaire", "Un Roman Russe" ou "Limonov", qui lui avait valu en 2011 le Prix Renaudot, l'un des principaux prix littéraires français. 

Le jury du prix Princesse des Asturies a salué une œuvre "où s'entremêlent des faits et des personnages de la vie réelle avec des réflexions sur l'acte d'écriture et l'expérience de l'auteur lui-même".

À ce propos, l'auteur a commenté que le fait "de travailler à la frontière du roman, de la fiction et de ce qu'on pourrait appeler le documentaire" était "une caractéristique" de son travail.

Exploration de soi

Auteur reconnu, Emmanuel Carrère a connu de nombreux succès en librairies, se classant régulièrement en tête des ventes de romans.

Son dernier livre, Yoga, grand succès de la rentrée littéraire 2020, revient sur l'hospitalisation de l'écrivain à Sainte-Anne en 2017 et sur le traitement par électrochocs.

Évoquant ce qu'il appelle une "autobiographie psychiatrique", Emmanuel Carrère écrit ainsi que "tout ce qui est réel est vrai, par définition, mais certaines perceptions du réel ont une plus grande teneur en vérité que d’autres".

Le roman, figurant parmi la première sélection du jury du prix Goncourt, le prix littéraire français de plus grand prestige, avait finalement été éliminé, n'étant pas considéré comme une "œuvre d'imagination", comme le mentionne le testament d'Edmond de Goncourt, fondateur de cette récompense.

La polémique avait mis en exergue le débat difficile sur les limites à la création romanesque s'agissant de personnes réelles, et sur les frontières entre fiction et récit véridique, puisque son ex-épouse, l'ancienne journaliste Hélène Devynck, avait même publié un droit de réponse sur le sujet.

Toute l'œuvre romanesque d'Emmanuel Carrère est en effet bâtie sur l'exploration de soi, y compris quand il raconte la vie des autres, qu'il s'agisse du meurtrier Jean-Claude Romand dans "L'Adversaire" ou de l'écrivain russe Edouard Limonov dans "Limonov".

Auteur éclectique

Outre l'introspection, le travail d'Emmanuel Carrère est marqué par trois tropismes: la Russie, avec notamment ses romans "russes": "Un Roman Russe" (2007), "Limonov" (2009), "Voyage à Kotelnitch" (2003); le fantastique, avec des romans comme "Je suis vivant et vous êtes morts" (1993); et enfin le fait-divers et le fait social dans des livres comme "La classe de neige" (1995), porté à l’écran par Claude Miller, ou "L'adversaire" (2000), dont le protagoniste, Jean-Claude Romand, a donné son nom à l'un des faits divers les plus connus et les plus macabres de la France de la fin du XXe siècle.

Adapté à de nombreuses reprises, il a également pris en main la caméra pour se faire documentariste ("Retour à Kotelnitch", 2003) et cinéaste ("La moustache", 2005), et a participé à l’écriture de fictions télévisées, notamment pour la série multi-primée "Les revenants" (2012).

Il a aussi fait partie du jury du Festival de Cannes en 2010 et de celui de Venise en 2015.

Il doit faire l'ouverture de la Quinzaine des réalisateurs, une section parallèle au Festival de Cannes, en juillet, avec son film "Le quai de Ouistreham", adaptation éponyme du récit de la journaliste Florence Aubenas mettant en scène l'actrice Juliette Binoche.

Parmi les précédents lauréats du prix Princesse des Asturies, figurent des géants de la littérature latino-américaine, comme le Péruvien Mario Vargas Llosa, les Mexicains Carlos Fuentes et Juan Rulfo et le Cubain Leonardo Padura.

Créés en 1981, les prix Princesse des Asturies, qui portent le nom de l'héritière au trône d'Espagne, couvrent au total huit catégories. Les lauréats ont déjà été annoncés dans cinq catégories cette année.

Ils sont remis aux lauréats par les souverains espagnols en octobre à Oviedo, capitale de la région des Asturies (nord).


La Semaine de l'art de Riyad marque un nouveau chapitre dans la renaissance culturelle saoudienne

La Semaine de l'art de Riyad fait des vagues dans la capitale saoudienne cette semaine, les conservateurs et les créateurs saluant l'événement comme un moment charnière dans le paysage culturel en pleine évolution du Royaume. (SPA)
La Semaine de l'art de Riyad fait des vagues dans la capitale saoudienne cette semaine, les conservateurs et les créateurs saluant l'événement comme un moment charnière dans le paysage culturel en pleine évolution du Royaume. (SPA)
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  • Cet événement, organisé par la Commission des arts visuels et accueilli dans le JAX District du 6 au 13 avril, est salué comme un moment charnière dans le paysage culturel en pleine évolution du Royaume.
  • Riyad se définit de plus en plus comme un espace où modernité et tradition se rencontrent, favorisant une évolution créative unique selon Vittoria Matarrese.

RIYAD : La Semaine de l'art de Riyad fait des vagues dans la capitale saoudienne. Les conservateurs et les créateurs saluent l'événement comme un moment charnière dans le paysage culturel en pleine évolution du Royaume, a rapporté l'Agence de presse saoudienne.

Organisé par la Commission des arts visuels et accueilli au JAX District du 6 au 13 avril, l'événement rassemble des artistes locaux et internationaux, des conservateurs et des institutions pour célébrer la créativité contemporaine et le dialogue interculturel.

Cette initiative reflète l'élan croissant de la transformation culturelle de l'Arabie saoudite, qui s'inscrit dans le cadre du programme de réforme Vision 2030 visant à remodeler le tissu social et artistique du Royaume, selon les organisateurs. 

Vittoria Matarrese, directrice et commissaire artistique de la Semaine de l'art de Riyad, a décrit l'événement comme un tournant important.

« Nous avons choisi le titre Au bord, car il reflète la nature de la phase que traverse Riyad », a-t-elle déclaré. « C'est une ville située entre le désert et l'urbanisation, entre le patrimoine et le renouveau. Cet équilibre est visible dans la diversité des œuvres présentées et des dialogues de l'exposition ».

Elle a ajouté que Riyad se définit de plus en plus comme un espace où modernité et tradition se rencontrent, favorisant une évolution créative unique.

Shumon Basar, conservateur du programme culturel public de l'Art Week Riyadh, a souligné l'importance des conversations qui se tiennent dans le cadre du programme intitulé « Comment créer un monde de l'art : Lessons in Value ». 

Il explique : « Notre objectif n'est pas seulement de partager des expériences, mais aussi de soulever des questions essentielles sur les types de valeur que l'art crée dans le monde contemporain — qu'elle soit économique, symbolique ou sociale — et sur la manière dont l'art peut servir d'outil pour comprendre les transformations culturelles, plutôt que de simplement les refléter. »

La Semaine de l'art de Riyad est une plateforme culturelle essentielle qui embrasse la diversité et encourage l'expérimentation artistique, offrant un espace de réflexion critique sur l'évolution du rôle de l'art dans la société, ajoute la SPA.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com  


Alejandra Castro Riosecco: « L'émancipation des femmes n'est pas une question régionale, c'est une question universelle »

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  • Pour Alejandra Castro Riosecco, collectionneuse chilienne d’origine espagnole et fondatrice de MIA Art, « l'émancipation des femmes n'est pas une question régionale, c'est une question universelle »
  • Castro Riosecco revient également sur l’exposition organisée à la Dubaï Tower par le MIA en collaboration avec le musée d'art latino-américain MOLAA

DUBAI : Pour Alejandra Castro Riosecco, collectionneuse chilienne d’origine espagnole et fondatrice de MIA Art, « l'émancipation des femmes n'est pas une question régionale, c'est une question universelle ». Pour Arab News en français, elle estime que les femmes ont toujours été dans une lutte constante pour rechercher des opportunités dans tous les domaines, « et l'art ne fait pas exception ». Castro Riosecco revient également sur l’exposition organisée à la Dubaï Tower par le MIA en collaboration avec le musée d'art latino-américain MOLAA ainsi que sur le MIA Art Collection Gala & Awards, un classique de la foire de l’art.

Question - Pouvez-vous nous parler de l'inspiration derrière l'exposition MIA en collaboration avec le musée d'art latino-américain MOLAA ? Quels thèmes les visiteurs peuvent-ils s'attendre à voir le 17 avril ?

Réponse - L'inspiration pour cette exposition est venue lors d'une visite à Los Angeles, en Californie, l'année dernière, lorsque mon mari et moi avons rejoint le comité international du conseil d'administration du MOLAA. Nous avons découvert ce musée et nous avons voulu le soutenir en le faisant connaitre avec le Moyen-Orient.

Nous sommes une organisation qui tente de faire fleurir l'inspiration et cherche à apporter quelque chose de différent chaque année à Dubaï dans le domaine de l'art.

Depuis 6 ans maintenant, nous créons des expositions innovantes, pleines de beauté et de sens, qui rencontrent un énorme succès, de sorte que l'inspiration est pour nous comme l'amour dans l'air...

Mon expérience de l'art latino-américain, ayant vécu de nombreuses années en Amérique latine, fait de moi une personne très bien informée sur ce sujet et en particulier sur les femmes artistes et leur rôle dans la société et dans le monde de l'art.

Pendant des décennies, les musées ont représenté la vision la plus pure de l'art en collaboration avec des fondations, en particulier ce musée, le MOLAA, qui est l'un des rares musées spécialisés dans l'art latino-américain et qui abrite une collection d'œuvres d'artistes historiques et d'artistes internationaux de premier plan tels que Leonora Carrington, Botero, entre autres.

Q - Y a-t-il des artistes ou des œuvres en particulier qui vous captent votre enthousiasme ?

Ils nous enthousiasment tous beaucoup, plus que les œuvres, nous aimons toujours voir l'effet et l'impact de ce mélange d'œuvres d'artistes plus établis et d'artistes plus jeunes. Cette conversation émergente entre les œuvres d'art génère beaucoup de créativité et de dynamisme et nous invite en même temps à découvrir l'histoire des dernières décennies et plus encore de l'art féminin latino-américain. Les œuvres qui nous enthousiasment le plus sont bien sûr celles de Leonora Carrington, la mère du surréalisme, et Doris Salcedo par exemple, une artiste cubaine qui participe à des expositions dans des musées tels que le MOMA à New York.

R - Quelle importance revêt l'organisation de cette exposition à la Dubaï Festival Tower pour le MIA et le musée MOLAA ?

C’est important pour une multitude de raisons. Tout d'abord, parce que pour la première fois dans l'histoire des pays arabes, nous avons obtenu qu'un musée américain déplace des pièces de sa collection vers une exposition. Il s'agit vraiment d'un effort "public-privé". Je suis très heureuse que Dubaï Festival City, propriété d'une famille émiratie locale, soutienne un projet comme le nôtre. J'admire et respecte leur esprit d'entreprise et leur engagement envers la société, et cela me semble être un merveilleux exemple pour les groupes économiques de Dubaï. La responsabilité sociale ne devrait pas être un simple sujet de conversation, elle devrait être réellement mise en pratique. DFC (Dubaï Festival City) le fait dans tous les domaines : arts, éducation, environnement et développement durable, etc.

Nous sommes heureux de cette collaboration, et pour le MOLAA, cette fenêtre qui s'est ouverte est un cadeau. En ces temps difficiles où les frontières nationales semblent être des barrières énormes, les Émirats sont toujours ouverts et prêts à apporter leur soutien.

Q- Le MIA Art Collection Gala & Awards est un événement prestigieux prévu pour le 18 avril. Quels sont les principaux objectifs de ce gala et comment contribuera-t-il à la communauté artistique ?

Le MIA Art Collection Gala & Awards est un classique de la foire d'art de Dubaï, un classique parce que c'est un gala unique, avec un sens profond de la chaleur humaine, et cette année, il se tiendra pour la première fois au Lana - Dorchester Collection Hotel. Grâce à leur collaboration, nous pouvons à nouveau organiser ce magnifique dîner au cours duquel MIA ART Collection récompense 10 personnalités distinguées du monde de l'art, 10 personnes qui, par leur engagement, changent chaque jour la scène artistique internationale. Les lauréats sont l'âme de ce gala. Notre contribution à la scène artistique est énorme, MIA est une organisation à but non lucratif qui se concentre entièrement et exclusivement sur la philanthropie et l'aide aux femmes artistes dans le monde entier. Basée dans une ville où la plupart des œuvres d'art sont des affaires et évoluent dans des limites transactionnelles, MIA Art Collection le fait simplement pour l'amour de l'art et la simple passion de la conviction.

R - Quel impact espérez-vous que l'exposition HER LAND aura sur les artistes émergents et sur l'appréciation de l'art dans la région ?

Il est très important d'avoir une large scène artistique à Dubaï, qui ne se concentre pas uniquement sur l'achat et la vente d'œuvres d'art, mais aussi sur des projets qui cherchent uniquement à éduquer. Je pense que si nous voulons que Dubaï continue à devenir une référence dans le monde culturel, nous devons avoir la capacité d'aller au-delà de la transaction et de comprendre que l'art est plus que cela, et que la culture améliore la société et la rend plus sensible et plus hospitalière.

Q - Quel rôle l'art joue-t-il dans l'émancipation des femmes artistes de la région ?

L'émancipation des femmes n'est pas une question régionale, c'est une question universelle. La recherche d'opportunités a été une lutte constante pour les femmes dans tous les domaines, et l'art ne fait pas exception. Nous savons qu'au cours des 100 dernières années, nous avons fait de grands progrès. Le droit de vote universel pour les femmes a été approuvé il y a 45 ans à peine. Cependant, il reste encore beaucoup à faire.

Pour moi, les Émirats arabes unis font un excellent travail en ce qui concerne le rôle des femmes. Les femmes émiriennes sont très fortes et intelligentes. Elles savent ce qu'elles doivent faire et comment le faire. Les femmes artistes arabes sont des pionnières en matière de techniques artistiques, et ce depuis plusieurs décennies. Je suis sûre que le rôle important que les femmes ont joué dans l'art est une question que de nombreuses organisations doivent aborder, reconnaître et soutenir. Il est essentiel pour atteindre notre objectif de donner aux femmes artistes plus de visibilité, plus d'espace, plus de soutien.

La façon dont les femmes voient et observent le monde est fascinante, et lorsque l'art le montre, il nous émeut, il nous touche, mais surtout, il nous enseigne, et une chose que nous ne devrions jamais cesser de faire, c'est d'apprendre.

L'exposition est ouverte au public du 18 avril au 17 mai à la DUBAI FESTIVAL TOWER, 30ème étage.

 


Un voyage à travers les chefs-d’œuvre préhistoriques de NEOM

 Les sculptures du désert de Hisma - représentant des animaux, des scènes de chasse et des silhouettes humaines - sont un pont entre notre vie moderne et le monde des hommes d'il y a des milliers d'années. (SPA)
Les sculptures du désert de Hisma - représentant des animaux, des scènes de chasse et des silhouettes humaines - sont un pont entre notre vie moderne et le monde des hommes d'il y a des milliers d'années. (SPA)
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  •  Un musée en plein air d'œuvres d'art anciennes permet de décoder les civilisations du passé
  • Les dessins révèlent comment les êtres humains interagissaient avec les animaux aujourd'hui disparus de la région

LA MECQUE : Au cœur du désert d'Hisma du NEOM, où des montagnes et des plateaux de grès s'élèvent dans un paysage aride, se trouve une extraordinaire collection d'œuvres d'art rupestre et d'inscriptions archéologiques anciennes. Ces trésors inestimables témoignent de la vitalité culturelle et économique de civilisations disparues depuis longtemps.

Autrefois couloir vital pour les caravanes empruntant les anciennes routes commerciales de la péninsule arabique, cette région conserve un héritage inestimable gravé dans ses formations géologiques.

Interrogé par Arab news, Abdulelah Al-Fares, photographe et expert en artefacts anciens, membre de la Société saoudienne de préservation du patrimoine, a déclaré que l'art rupestre se trouve dans les montagnes et les plateaux de NEOM, qui fait partie d'une chaîne de montagnes situées dans la partie nord-ouest de Tabuk.

Le désert de Hisma est bordé par les montagnes d’Al-Sharah au nord, par Wadi Araba au nord-ouest, par les montagnes de Hedjaz à l'ouest et par Harrat Rahat au sud.