CHICAGO: C'est dans le quartier de Habs al-Dam, à Naplouse, que commence et prend fin ce récit incroyable. Il retrace l'histoire de Nidal et de la famille Al-Qahtan. Ces derniers font partie des nombreux protagonistes de la résistance palestinienne sous le mandat britannique que présente l'ouvrage Mon Premier et Unique Amour (My First and Only Love), de la grande écrivaine Sahar Khalifa.
Dans cet ouvrage traduit par Aïda Bamia, Nidal se souvient de son enfance en Palestine. Là, elle se réveillait au chant du chardonneret et se baladait parmi les citronniers, alors que son oncle Wahid dirigeait une faction de la résistance dans les montagnes et que son oncle Amine travaillait comme journaliste à Jérusalem pour documenter les événements survenus jusqu'à la mort de leur dirigeant, Abdelkader al-Husseini, en 1948.
Après des décennies, Nidal retourne dans sa maison familiale et les souvenirs affluent dans cet endroit de Cisjordanie où elle vivait avec sa grand-mère et sa mère. Désormais vide, la maison fourmillait autrefois de monde et débordait d'espoir – l'espoir de voir la résistance triompher, l'espoir que la chance sourit pour une fois à Widad, la mère de Nidal, et l'espoir que l'avenir de celle-ci soit radieux. Bien que certains de leurs rêves ne se soient pas réalisés, et après avoir passé sa vie à fuir, la jeune femme décide de vivre à l'endroit qu'elle aime: sa maison, dans toute sa beauté, dans laquelle elle a rencontré son premier amour, Rabie, un combattant de la résistance.
Sahar Khalifa plonge les lecteurs dans la vie de ses personnages avec fluidité et charme. Elle dépeint une Palestine fertile dont les habitants sont soudés comme les branches d'un arbre. Voisins depuis des générations, ils connaissent l'histoire et les secrets des uns et des autres.
Nidal et sa grand-mère Zakiya se rendent chez Oum Nayef qui vend du yaourt dans le village d'Asira. Elle leur donne des nouvelles des résistants tandis que des avions britanniques survolent l'endroit. Les femmes de la campagne transportent des paniers remplis de raisins, de figues et de fromage vers le marché. La résistance est épuisée, les prisons débordent de prisonniers condamnés à des peines plus longues que le temps lui-même, les oliviers ne donnent plus d'olives et les jeunes hommes dispersés dans les montagnes se battent pour sauver leur maison. Pour Nidal, tout semble vieux, mais la réalité est tout autre. Se battre pour obtenir son indépendance n'est pas sans conséquence.
Dans ce récit bouleversant, Mme Khalifa raconte comment la Ligue arabe a refusé d'aider les Palestiniens en 1948 avant la fin du mandat britannique, un tournant décisif pour l'indépendance de la Palestine. Au-delà de la douleur, la vie continuait, l'amour fleurissait, l'espoir grandissait et le combat pour l'avenir se poursuivait. Les romans de Sahar Khalifa ont le pouvoir de faire trembler la terre aussi bien qu'ils font vibrer les cœurs.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com