PARIS: Lancé fin 2019 sur un marché français de l'épargne pourtant bien achalandé, les plans d'épargne retraite font mouche auprès des épargnants, grâce notamment à leur souplesse permettant de retirer l'intégralité du capital amassé pour ses vieux jours.
Les PER ont déjà conquis 1,4 million d'assurés. "Un bilan très positif", estime Franck Le Vallois, directeur général de la Fédération française de l'assurance. "Nous sommes à des encours qui s'élèvent à 18 milliards d'euros" fin mars.
Si ce montant reste modeste face à d'autres placements plus chenus et prisés des Français tels l'assurance vie (1 800 milliards d'euros d'encours) ou le Livret A (463 milliards), le jeune PER fait toutefois des premiers pas remarqués.
Entre octobre 2019 et mars 2021, le montant net engrangé par ce placement a atteint environ 4 milliards d'euros, là où l'assurance vie a vu le départ d'un peu plus d'un milliard d'euros, selon des chiffres transmis par la Fédération française de l'assurance.
Pour M. Le Vallois, "c'est un produit qui a trouvé rapidement sa place sur le marché. Quand on compare les courbes de progression, celle du PER peut être parfois jusqu'à trois fois supérieure" à celles d'autres produits au même objectif comme les vieux plans d'épargne retraite populaire (PERP) fermés à la commercialisation depuis fin 2020.
Objectif 300 milliards
Créé via la loi Pacte et distribué depuis le 1er octobre 2019, le PER doit permettre de relancer en France l'épargne retraite, un placement long pouvant servir à financer les entreprises mais délaissé ces dernières décennies au profit notamment de l'assurance vie.
Cette dernière a longtemps fait figure de couteau suisse en France. Elle "faisait tout, permettant à la fois de la sécurité et de performance, mais dans la période actuelle de taux bas, cette équation de fonctionne plus", affirme Jean-François Garin, directeur général de Groupama Gan Vie. "Les épargnants doivent davantage se poser la question de ce qu'ils veulent faire avec leur épargne."
L'épargne retraite permet d'accumuler un pécule qui sera distribué à la fin de la vie active et complètera le système de retraite par répartition.
Le secteur a longtemps été fragmenté en de multiples produits (Madelin, Perp, Perco, article 83, etc.) aux règles hétérogènes, complexes.
A l'été 2019, seuls 230 milliards d'euros étaient investis en épargne retraite, soit grosso modo sept fois moins qu'en assurance vie.
Appelé à remplacer les autres contrats et à en corriger les défauts, le PER est décliné sous trois formes: PER individuel, PER d'entreprise collectif et PER d'entreprise obligatoire. Il peut être souscrit soit à titre individuel auprès d'un banquier, assureur ou courtier, soit par l'entreprise pour le compte de ses salariés.
Le gouvernement espère grâce à lui porter l'encours d'épargne retraite à 300 milliards d'euros d'ici 2022.
"On est très satisfait, le produit se développe très bien et rencontre un satisfecit assez général, que ce soit de la part des clients, des réseaux de distribution, des compagnies", se félicite une source à Bercy.
Sortie en rente ou en capital
Là où les précédents produits ne proposaient généralement que le versement d'une rente au moment de la retraite, les PER permettent de choisir librement entre rente, retrait du capital accumulé ou mélange des deux. Les sommes versées sont déductibles de l'impôt sur le revenu.
"La suppression de la sortie obligatoire en rente a constitué un vrai gros déblocage, qui attire les gens", explique Gilles Belloir, directeur général du courtier en ligne Placement-direct.fr. Cette disposition "permet de davantage moduler avec les autres placements".
Le PER a également les faveurs des compagnies d'assurance car les fonds sont bloqués - sauf quelques exceptions - jusqu'à la retraite, ce qui "laisse énormément de temps à l'assureur pour retrouver une équation et une performance sur le long terme", insiste M. Garin.
Mais tous les contrats ne se valent pas: "beaucoup d'acteurs ont la main lourde sur les frais de versement, qui mangent parfois quasiment toute rentabilité", met en garde Lionel Maugain, de la revue 60 millions de consommateurs.
Ces frais, "de 2,5% en moyenne, peuvent atteindre jusqu'à 5%. Ils sont injustifiables de notre point de vue", ajoute M. Maugain, appelant les épargnants à faire jouer la concurrence.