Procès du meurtre de George Floyd: les jurés face à plusieurs options

Des manifestants près du palais de justice du comté de Hennepin, le 19 avril 2021 à Minneapolis, Minnesota (Photo, AFP)
Des manifestants près du palais de justice du comté de Hennepin, le 19 avril 2021 à Minneapolis, Minnesota (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 20 avril 2021

Procès du meurtre de George Floyd: les jurés face à plusieurs options

  • Biden a évoqué «l'angoisse» de la famille de George Floyd dans l'attente du verdict 
  • Quel que soit le verdict, les autorités fédérales, qui mènent leur propre enquête depuis des mois, pourraient décider de poursuivre le policier pour violation des lois américaines sur les droits civiques

MINNEAPOLIS: Après trois semaines de procès, les jurés se sont retirés lundi pour débattre de la culpabilité du policier blanc Derek Chauvin dans la mort de l'Afro-Américain George Floyd. Plusieurs options s'offrent à eux. 

Trois chefs d'accusation  

Derek Chauvin, 45 ans, est jugé pour trois chefs d'accusation et peut être condamné pour l'un d'entre eux, deux d'entre eux ou les trois. Les peines ne se cumulent pas.  

Il est d'abord inculpé de « second-degree unintentional murder », passible de 12 ans et demi de prison selon le barème établi par l'Etat du Minnesota pour une première condamnation, ce qui est le cas du policier. Mais le juge dispose d'une certaine latitude pour diminuer ou augmenter cette peine, s'il conclut à l'existence de circonstances aggravantes. Ce chef d'accusation, qui fait normalement encourir 40 ans de prison, suppose que Chauvin a tué dans le cadre d'un crime dangereux, même s'il n'avait pas forcément l'intention de causer la mort (comme pour les braquages qui dégénèrent). En revanche il implique que le policier avait l'intention de commettre des violences illégales à l'encontre de George Floyd. 

Le deuxième chef d'accusation, « third-degree murder », est également assorti d'une peine de 12 ans et demi de réclusion pour une première condamnation, et de 25 ans autrement. Il s'applique aux personnes ayant causé une mort sans l'intention de la donner, mais en commettant un « acte particulièrement dangereux » manifestant un «esprit malfaisant dépourvu de respect pour la vie humaine ». Cette charge ouvre aux jurés une voie plus facile pour condamner lourdement le policier. 

Le troisième chef d'accusation, « second-degree manslaughter », est passible de quatre ans de prison pour une première condamnation, et de 10 ans autrement. Il s'applique à un homicide involontaire résultant d'une grave négligence, commise en pleine conscience, et faisant courir un risque à la vie d'autrui.  

Scénario 1: l'acquittement 

Cette hypothèse semble peu probable, car elle supposerait que les douze jurés se prononcent pour l'acquittement sur les trois chefs d'accusation. Cela signifierait la fin de la procédure devant la justice du Minnesota, l'accusation ne pouvant faire appel d'un tel verdict. 

Scénario 2: la déclaration de culpabilité 

Là encore, il faudrait un jury unanime. Les condamnations de policiers pour meurtre sont très rares aux Etats-Unis, les jurés ayant tendance à leur octroyer le bénéfice du doute. Mais l'affaire Floyd sort du cadre ordinaire. 

« Le système légal américain m'a déjà brisé le coeur », a déclaré récemment Ben Crump, l'avocat de la famille Floyd. « Mais ce qui est différent cette fois, c'est l'horrible vidéo » du drame, a-t-il ajouté, en affichant sa confiance. 

L'existence de trois chefs d'inculpation augmente les chances de l'accusation. « L'homicide involontaire est une possibilité parce qu'il suffit de montrer la négligence », relève David Schultz, professeur à la faculté de droit Hamline de l'Université du Minnesota. 

Si un verdict de culpabilité est rendu, il reviendra au juge de prononcer la peine, un ou deux mois plus tard.  

Si Derek Chauvin est jugé coupable, il est par ailleurs très probable que le policier fasse appel, ce qui pourrait prolonger la procédure de plusieurs années. Il devra toutefois attendre l'issue de cette bataille en prison, les appels n'étant pas suspensifs. 

Scénario 3: le jury divisé  

Si les 12 jurés ne parviennent pas à se mettre d'accord, le juge Peter Cahill devra déclarer la nullité du procès. 

« J'imagine assez bien un scénario où un juré dit à la fin: ‘J'ai un doute sur la cause de la mort’, il n'en faudrait pas plus », souligne M. Schultz. 

Il s'agirait d'un immense échec pour l'accusation qui devrait alors décider si elle organise un second procès, si elle entre dans une négociation de peine, ou si elle referme le dossier.  

Un telle perspective suscite de fortes appréhensions à Minneapolis, qui s'était déjà embrasée après la mort de George Floyd le 25 mai.  

Et après ? 

Quel que soit le verdict, les autorités fédérales, qui mènent leur propre enquête depuis des mois, pourraient décider de poursuivre le policier pour violation des lois américaines sur les droits civiques.  

Le verdict aura également un impact pour les trois anciens collègues de Derek Chauvin - Alexander Kueng, Thomas Lane et Tou Thao - qui doivent être jugés en août pour « complicité de meurtre ».  

S'il est acquitté, ce chef d'accusation tiendra difficilement et l'accusation pourrait être obligée de reprendre leur dossier.  

A l'inverse, si Derek Chauvin est reconnu coupable, ses trois ex-collègues pourraient avoir un intérêt à entrer dans un accord de plaider-coupable pour s'éviter la case procès. 

JOE BIDEN A PARLÉ À LA FAMILLE DE GEORGE FLOYD

Le président américain a parlé à la famille de George Floyd, a indiqué mardi la Maison Blanche au moment où le jury délibère sur la responsabilité du policier accusé du meurtre de ce quadragénaire afro-américain. 

Le président  a estimé que les preuves dans le procès sur la responsabilité d'un policier blanc dans la mort de George Floyd étaient « accablantes ».

« Je prie pour que le verdict soit le bon. A mon avis, c'est accablant. Je ne dirais pas cela si le jury ne s'était pas retiré pour délibérer », a-t-il déclaré depuis le Bureau ovale.

« J'ai appris à connaître la famille de George (...). C'est une famille bien », a-t-il ajouté, évoquant « l'angoisse » de l'attente de la décision du jury pour cette dernière.

Jen Psaki, porte-parole de l'exécutif américain, a indiqué que « le président Biden a parlé hier (lundi) avec la famille de George Floyd pour prendre de ses nouvelles et lui assurer qu'il priait pour elle », dans un tweet.

 

Les principaux points de l'accusation et de la défense 

Voici les principaux points développés par les deux parties: 

Un geste intentionnel 

« Ce n'est pas un accident », a affirmé le procureur Steve Schleicher. « Il n'a pas glissé pour se retrouver sur le cou de George Floyd. Il a fait ce qu'il a fait de manière intentionnelle et cela a tué George Floyd, cette force pendant 9 minutes et 29 secondes a tué George Floyd ».  

Force abusive 

Steve Schleicher a fustigé un « étalage choquant d'abus de pouvoir de la police ». « Ce qu'a fait l'accusé n'était pas du maintien de l'ordre, c'était une agression ». 

Le geste de Derek Chauvin, qui a maintenu son genou sur le cou de sa victime pendant près de dix minutes, « était inutile, gratuit et disproportionné », selon le procureur. 

Pas de résistance 

George Floyd pose ses mains sur le volant sur ordre du policier? « Ce n'est pas de la résistance, c'est de l'obéissance ». L'agent lui ordonne de sortir de la voiture. « Il le fait, ce n'est pas de la résistance, c'est de l'obéissance ». L'agent veut lui passer les menottes? « Il est menotté, ce n'est pas de la résistance », a martelé M. Schleicher. 

Mépris de la vie 

« Ce jour-là, aucun courage n'était demandé, tout ce qui était demandé, c'était de la compassion, et il n'y en a eu aucune », a dit Steve Schleicher. 

« George Floyd « a appelé à l'aide dans son dernier souffle, mais ‘M. l'agent’ n'a pas aidé ».   

A l'arrivée de l'ambulance, « l'accusé a continué, il est resté sur (George Floyd). Il ne voulait pas se relever, il ne voulait pas le laisser partir ». 

« On vous a dit que George Floyd était mort parce que son coeur était trop gros », a lancé l'autre procureur Jerry Blackwell en commentant ses problèmes cardiaques. « La vérité c'est que le coeur de M. Chauvin est trop petit ». 

Manque d'informations 

L'avocat de Derek Chauvin, Eric Nelson, a demandé au jury de prendre en compte l'ensemble des faits en commençant par « ceux qui étaient connus » de l'agent à son arrivée, alors que George Floyd refuse d'entrer dans une voiture de police. 

« Il voit une résistance active, une agression potentielle » alors que « la situation peut évoluer à chaque seconde, à chaque minute ». 

« Les 9 minutes et 29 secondes ignorent les 16 minutes et 59 secondes précédentes », dit-il. 

Une force « raisonnable »   

« Les efforts (des policiers) pour surmonter la résistance étaient raisonnables », a assuré Eric Nelson. « Etait-ce raisonnable de le mettre à terre? Tout le monde est d'accord pour dire qu'à ce moment, l'usage de la force est raisonnable et légal ».  

L'avocat suggère qu'il « n'est pas rare » qu'un suspect feigne un problème cardiaque pour éviter une arrestation, et que Derek Chauvin a été « raisonnable » quand il a évalué les blessures de George Floyd et demandé par deux fois l'intervention d'une ambulance. 

Selon lui, l'attention du policier a été aussi détournée au moment où George Floyd cesse de respirer. « Sa réaction face à la foule est de sortir sa bombe lacrymogène » alors qu'une passante »s'approche de lui par derrière ». 

« Les officiers sont des êtres humains capables de faire des erreurs dans des situations très stressantes », a-t-il souligné. 

Plusieurs facteurs mortels 

D'après l'avocat, George Floyd n'est pas seulement mort d'overdose, son décès est dû à de multiples facteurs: « l'ingestion de drogues, une maladie cardiaque, de l'hypertension, tout cela existait avant l'arrivée de Derek Chauvin. Quel rôle a joué la lutte? », a-t-il demandé, suggérant également que l'inhalation de gaz d’échappement a pu jouer un rôle.  

Pas de preuves 

« L'Etat a échoué à faire la preuve de ses accusation au-delà du doute raisonnable, et M. Chauvin doit par conséquent être déclaré non coupable », a conclu l'avocat. 


Prison à vie pour une Syrienne jugée coupable de l'attentat meurtrier d'Istanbul

Des gens portent lors de cérémonies funéraires, les cercueils des victimes de l'explosion dans la rue Istiklal à Istanbul, le 14 novembre 2022. (AFP)
Des gens portent lors de cérémonies funéraires, les cercueils des victimes de l'explosion dans la rue Istiklal à Istanbul, le 14 novembre 2022. (AFP)
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  • Ahlam Albashir a été condamnée à sept peines de prison à vie par un tribunal turc pour avoir perpétré l'attentat sur l'avenue Istiklal le 13 novembre 2022
  • Vingt autres personnes ont été condamnées à des peines d'emprisonnement allant de quatre ans à la perpétuité

DJEDDAH : Une femme syrienne qui avait posé une bombe  tuant six personnes dans la principale rue commerçante d'Istanbul il y a 18 mois a été condamnée à la prison à vie vendredi.

Ahlam Albashir a été condamnée à sept peines de prison à vie par un tribunal turc pour avoir perpétré l'attentat sur l'avenue Istiklal le 13 novembre 2022. Six citoyens turcs, deux membres de chacune des trois familles, ont trouvé la mort dans l'explosion qui s'est produite dans cette rue très fréquentée par les commerçants et les touristes. Une centaine de personnes ont été blessées.

Plus de 30 autres personnes ont été accusées d'avoir participé à l'explosion. Quatre d'entre elles ont été remises en liberté vendredi, et dix autres ont été jugées séparément par contumace, car elles étaient introuvables.

Vingt autres personnes ont été condamnées à des peines d'emprisonnement allant de quatre ans à la perpétuité. Six d'entre eux ont été condamnés à la réclusion à perpétuité pour meurtre et « atteinte à l'unité et à l'intégrité de l'État ».

La Turquie a accusé des militants kurdes d'être à l'origine de l'explosion et a déclaré que l'ordre d'attaquer avait été donné à Kobani, dans le nord de la Syrie, où les forces turques ont mené des opérations contre la milice kurde syrienne YPG au cours des dernières années.

Les YPG et le groupe séparatiste kurde hors-la-loi PKK, qui mène depuis des décennies une insurrection contre l'État turc, ont nié toute implication dans l'attentat. Aucun groupe n'a admis avoir participé à l'attentat.

Istanbul a été attaquée par le passé par des militants kurdes, islamistes et gauchistes. Une vague d'attentats à la bombe et d'autres attaques a commencé à l'échelle nationale lorsque le cessez-le-feu entre Ankara et le PKK a été rompu à la mi-2015.

Plus de 40 000 personnes ont été tuées dans le conflit entre le PKK et la Turquie depuis que le groupe militant a pris les armes en 1984. Il est considéré comme une organisation terroriste par la Turquie, l'UE et les États-Unis.

 Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com

 


Des milliards de cigales vont envahir les Etats-Unis

L'exuvie de la cigale s'accroche à un arbre lors du deuxième tour du Barbasol Championship au Robert Trent Jones Golf Trail at Grand National le 21 juillet 2017 à Auburn, Alabama. (Cliff Hawkins/Getty Images/AFP)
L'exuvie de la cigale s'accroche à un arbre lors du deuxième tour du Barbasol Championship au Robert Trent Jones Golf Trail at Grand National le 21 juillet 2017 à Auburn, Alabama. (Cliff Hawkins/Getty Images/AFP)
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  • Certaines cigales apparaissent chaque année, quand d'autres, appelées cigales «périodiques», sortent de terre tous les 13 ou 17 ans
  • «Nous avons eu plusieurs appels concernant un son qui ressemble à une sirène, un gémissement ou un rugissement», a indiqué sur Facebook le bureau du shérif de Newberry, en Caroline du Sud (sud-est) cette semaine

WASHINGTON : Bruyantes et prêtes à s'accoupler, des milliards de cigales s'apprêtent à envahir les forêts et banlieues pavillonnaires américaines.

Dans les prochaines semaines, deux groupes particuliers de cigales vont batifoler au même moment. Un phénomène qui n'est pas arrivé depuis 1803, quand Thomas Jefferson était encore président et que les Etats-Unis rachetaient la Louisiane à la France.

La famille des cigales comprend plus de 3.000 espèces d'insectes à travers le monde. La majorité d'entre-elles passent leur vie sous terre, sous forme de larve. Elles émergent adultes pour muer et se reproduire.

Certaines apparaissent chaque année, quand d'autres, appelées cigales «périodiques», sortent de terre tous les 13 ou 17 ans.

Cette année, le phénomène implique deux groupes de cigales: le groupe XIX, qui émerge tous les 13 ans et a déjà commencé à le faire en Caroline du Nord et du Sud (sud-est). Il sera suivi par le groupe XIII dans le Midwest, qui émerge tous les 17 ans. Dans le centre de l'Etat de l'Illinois (nord), les deux pourraient être présentes au même endroit.

«Quand elles font surface, elles le font en grand nombre, ce qui enthousiasme parents et enfants», selon l'entomologiste Gene Kritsky, de l'Université Mount-Saint-Joseph, qui a développé une application pour que tout un chacun puisse collecter des données sur ces bestioles aux yeux rouges.

Un phénomène dont on se souvient, et dont les histoires se transmettent de génération en génération. Tout comme, par exemple, être témoin d'une éclipse.

«C'est ce que fait la science: vous faites des hypothèses qui vous conduisent à des prédictions, les prédictions sont vérifiées, (...) cela a de la valeur, au moment où certaines personnes cherchent à discréditer la science», note Gene Kritsky.

- Une merveille scientifique  -

Sans grande défense, les cigales «périodiques» comptent sur leur nombre pour la survie de l'espèce: grâce aux hordes qui déferlent au même moment, les oiseaux, renards, ratons laveurs, tortues et autres prédateurs sont vite rassasiés, explique à l'AFP John Lill, professeur de biologie à l'Université George Washington.

Dans une étude publiée récemment dans la revue Science, John Lill et ses collègues montrent qu'un groupe de cigales ayant émergé à Washington en 2021 avait conduit à une augmentation du nombre de chenilles -- délaissées par les oiseaux, qui se sont concentrés sur les cigales.

Résultat: la consommation de pousses de jeunes chênes s'est accrue.

D'autres recherches montrent que les années où les chênes produisent le plus de glands suivent toujours deux ans après l'émergence des cigales. Plus il y a de glands, plus les populations de mammifères qui s'en nourrissent croît, plus le risque de maladie de Lyme chez l'homme augmente.

Ce phénomène «montre qu'il existe potentiellement des impacts écologiques à plus long terme se répercutant pendant des années après l'apparition des cigales», ajoute M. Lill.

- Impacts humains -

Puis il y a le son singulier -- et strident -- des cigales mâles qui s'accouplent.

«Nous avons eu plusieurs appels concernant un son qui ressemble à une sirène, un gémissement ou un rugissement», a indiqué sur Facebook le bureau du shérif de Newberry, en Caroline du Sud (sud-est) cette semaine.

Selon Chris Simon, chercheuse à l'université du Connecticut, le changement climatique perturbe l'horloge interne des cigales.

Avec le réchauffement climatique aux Etats-Unis, l'allongement de la saison de croissance des plantes fournit plus de nourriture et accélère celle des cigales. «Je prédis que davantage de cigales de 17 ans se transformeront en cigales de 13 ans», a-t-elle indiqué «et, éventuellement, que ce trait sera assimilé génétiquement».

Il est difficile de savoir ce que cela signifie pour l'espèce à long terme, ajoute M. Lill.


Sahel: Washington va retirer des soldats du Tchad, après le Niger

Des milliers de Tchadiens assistent au meeting de Mahamat Idriss Deby Itno, président de la transition et candidat à l'élection présidentielle au Tchad, dans le stade en construction au quartier Dombao, à Moundou, le 25 avril 2024. (AFP)
Des milliers de Tchadiens assistent au meeting de Mahamat Idriss Deby Itno, président de la transition et candidat à l'élection présidentielle au Tchad, dans le stade en construction au quartier Dombao, à Moundou, le 25 avril 2024. (AFP)
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  • Washington a entamé cette semaine des discussions avec Niamey sur le retrait du Niger des plus de 1 000 soldats américains présents dans le pays
  • Dans un courrier au ministre des Armées, le chef d'état-major de l'armée de l'air tchadienne avait réclamé début avril le départ des soldats américains

WASHINGTON: Les Etats-Unis vont retirer temporairement des soldats du Tchad, a annoncé le Pentagone quelques jours après leur accord pour retirer leurs forces du Niger voisin.

Au Tchad, les Etats-Unis disposent d'une centaine de soldats dans le cadre de la lutte antijihadiste au Sahel.

"L'Usafricom envisage actuellement de repositionner certaines forces militaires américaines depuis le Tchad, dont le départ d'une partie était déjà prévu", a déclaré lors d'une conférence de presse jeudi le porte-parole du Pentagone, Pat Ryder, se référant au commandement militaire américain en Afrique.

"Il s'agit d'une étape temporaire dans le cadre d'une révision en cours de notre coopération de sécurité, qui reprendra après l'élection présidentielle du 6 mai au Tchad", a-t-il ajouté.

Dans un courrier au ministre des Armées lu par l'AFP, le chef d'état-major de l'armée de l'air tchadienne avait réclamé début avril le départ des soldats américains, incriminant un défaut de documents sur un accord permettant leur présence.

Selon ce courrier, "l'armée de l'air a demandé à l'attaché de défense américain d'arrêter immédiatement les activités militaires sur la BAK", la base aérienne d'Adji Kossei où les soldats américains entraînent des forces spéciales tchadiennes à lutter contre le groupe jihadiste Boko Haram.

"Nous vous demandons d'intercéder auprès de qui de droit afin de prévenir les Américains que nous avons pris la décision d'arrêter leur activité", ajoute la lettre.

"La présence des forces américaines au Tchad était initialement motivée par l'engagement commun dans la lutte contre le terrorisme, un objectif partagé par les deux nations", a déclaré vendredi à l'AFP le porte-parole du gouvernement tchadien.

Discussions supplémentaires 

"Cependant, des préoccupations ont été exprimées par l'état-major tchadien quant à cette présence" et "en reconnaissance des préoccupations exprimées, le gouvernement américain a décidé de retirer temporairement ses forces du Tchad", a ajouté M. Abderaman Koulamallah.

"Il est important de souligner que ce retrait ne signifie en aucun cas une rupture de la coopération entre les deux pays dans la lutte contre le terrorisme", a-t-il dit.

"Des discussions supplémentaires auront lieu pour explorer la possibilité d'un retour des forces américaines dans le cadre d'un accord bilatéral précis et convenu entre les deux pays", a encore indiqué le porte-parole.

Au Niger, autre pivot de la stratégie des Etats-Unis et de la France pour combattre les jihadistes dans la région, la junte militaire au pouvoir depuis juillet a dénoncé en mars l'accord de coopération militaire en vigueur avec les Etats-Unis, estimant que la présence américaine était désormais "illégale".

Washington a entamé cette semaine des discussions avec Niamey sur le retrait du Niger des plus de 1.000 soldats américains présents dans le pays.

Les Etats-Unis disposent notamment au Niger d'une base de drones importante près d'Agadez, construite pour environ 100 millions de dollars.

Washington va "continuer à explorer les options possibles afin d'assurer que nous soyons toujours en mesure de faire face aux potentielles menaces terroristes", avait déclaré lundi Pat Ryder après l'annonce la semaine dernière du retrait américain du Niger.

Au Tchad, le général Mahamat Idriss Deby Itno a annoncé en mars sa candidature à la présidentielle, qu'il est quasi-assuré de remporter après que son régime a violemment réprimé dans la rue et muselé toute opposition et éliminé toute concurrence.

Il avait été proclamé par l'armée président de transition le 20 avril 2021, à la tête d'une junte de 15 généraux, à la mort de son père Idriss Déby Itno, lequel régnait d'une main de fer sur le Tchad depuis 30 ans.

Son principal adversaire, Yaya Dillo, a été tué fin février par des militaires dans l'assaut de son parti, d'une "balle dans la tête à bout portant" selon l'opposition, puis les candidatures de dix autres potentiels rivaux ont été invalidées.