« Baba, elle est où maman ? » « Elle est partie au Cham (en Syrie). » « Est-ce qu’on peut l’appeler sur WhatsApp ? »
Alaa el-Mohammad, 31 ans, ne trouve pas les mots face aux supplications de Zeinab, 7 ans, et d’Omar, 4 ans. Comment peut-il leur dire qu’il a conduit la dépouille mortelle de leur mère, Nawal, 28 ans, jusqu’à la frontière syrienne ? Et que, puisqu’il risquait de se faire arrêter par l’armée du régime en mal de recrues, des proches ont dû prendre le relais pour accompagner la défunte vers sa dernière demeure, dans son village natal de Sabikhan, proche de Boukamal ? Cette jeune mère de famille est l’une des 40 victimes syriennes connues des explosions qui ont soufflé le port de Beyrouth et endeuillé la capitale le 4 août.
« Peu importe combien ça allait me coûter, je voulais absolument qu’elle repose en Syrie », raconte son époux, une semaine après le drame qui a fait au moins 180 morts. Lui a eu la chance d’être aidé financièrement par son employeur. Mais beaucoup ont dû se contenter d’enterrer l’être aimé dans des cimetières réservés aux réfugiés syriens, comme à Daraya, dans le Chouf, ou dans un village reculé du Akkar. « Il y a des cas terribles. Beaucoup de familles syriennes au Liban ne sont pas conscientes de leurs droits et nous sommes là pour les assister. Un donateur privé a par exemple tenu à prendre en charge les funérailles des victimes syriennes de la double explosion », explique Yasmin Kayali, cofondatrice de l’ONG Bassmeh & Zeitooneh.