LONDRES : Le défunt dirigeant libyen Mouammar Kadhafi a accepté de démissionner et d’arrêter la politique en 2011 dans le cadre d’un accord qui aurait pu éviter une décennie de crise et d’affrontements sanglants, mais cet accord est tombé à l’eau à la dernière minute, a rapporté The Independent jeudi.
L’ancien ministre norvégien des Affaires étrangères Jonas Store a expliqué au journal britannique qu’un projet de texte avait été convenu entre le fils de Kadhafi, Saïf Al-Islam, et Aly Zeidan, figure importante de l’opposition, qui deviendrait ensuite Premier ministre du Conseil national de transition libyen.
Les diplomates norvégiens ont élaboré un plan de transition dont la première ligne est la suivante : « Le colonel Kadhafi avait décidé de quitter le pouvoir, de démissionner et de mettre fin à la première phase de la révolution ».
Cependant, le destin du dirigeant erratique, qui a passé 42 ans au pouvoir, est resté un point de friction. Plus précisément, il a refusé de quitter le pays après avoir démissionné.
« Des personnes très proches de Kadhafi, des personnes qui font partie de l’appareil judiciaire, des membres des sa famille, ont soutenu les clauses de l’entente», indique Staale Wiig, biographe norvégien de M. Store et le premier à apprendre l’existence de ces négociations quelques années après la guerre. « Mais, lors de la dernière étape, Kadhafi devait dire “J’accepte de m’exiler” ou préciser où est-ce qu’il allait vivre », poursuit-il.
Par ailleurs, M. Store a mentionné que le dirigeant libyen n’était pas le seul obstacle à une transition pacifique. Selon lui, les États-Unis étaient favorables à l’accord, mais le Royaume-Uni et la France ont émis des réserves.
« J’ai eu l’impression que les mentalités à Londres et à Paris n’étaient pas ouvertes à réfléchir réellement à l’option diplomatique. La France et la Grande-Bretagne étaient-elles prêtes à envisager autre chose que des solutions militaires ? Les avis sont partagés là-dessus», a déclaré M. Store.
« Si la communauté internationale voulait vraiment suivre cette voie avec une certaine autorité et un certain dévouement, je pense qu’il aurait été possible d’obtenir un résultat moins dramatique et d’éviter l’effondrement de l’État libyen. S’il y avait eu une volonté de le faire ... on aurait pu imaginer une sorte de cessez-le-feu dans la campagne militaire pour permettre aux diplomates d’intervenir », a-t-il ajouté.
« Mais l’opération militaire durait depuis huit semaines, la dynamique sur le terrain changeait, et franchement, la volonté de se rallier à un tel processus n’était pas là ».
La Libye est dans un état de conflit perpétuel depuis que Kadhafi a violemment réprimé un soulèvement populaire en 2011.
À l’époque, il s’était engagé à écraser les « rats dans les rues », et ses menaces ont finalement entraîné une intervention soutenue par l’ONU pour l’empêcher d’assassiner ses propres citoyens.
Lors de cette intervention, menée par les États-Unis, le Royaume-Uni et la France, 7 000 bombes ont été larguées sur les forces de Kadhafi pendant sept mois, ce qui a conduit à son renversement et à sa mort.
Depuis, la Libye est le théâtre d’incursions de miliciens affiliés à Daech, d’une guerre civile dans laquelle des puissances extérieures sont largement impliquées, et de la mort de milliers de civils et de combattants.
Au début du mois, un accord de paix a été conclu entre les deux parties belligérantes du pays, basées à Benghazi et à Tripoli respectivement. Mais selon les observateurs, la Libye demeure sur le point de reprendre le conflit.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur arabnews.com