ATHÈNES: La Grèce espère trouver une « base commune » avec la Turquie « pour résoudre leur différend », a déclaré mardi à Athènes le ministre grec des Affaires étrangères à l'issue d'un deuxième round de négociations entre les deux pays voisins qui se disputent sur la délimitation des eaux en Méditerranée orientale.
Cette réunion s'inscrivait dans la deuxième phase des pourparlers dits « exploratoires », un mécanisme réactivé fin janvier après cinq ans d'interruption pour tenter d'apaiser les tensions entre les deux pays membres de l'Otan.
« La Grèce participe à ces entretiens de bonne foi », a déclaré devant la presse le chef de la diplomatie grecque Nikos Dendias, en refermant les entretiens, dont le prochain round aura lieu prochainement à Istanbul, selon la TV publique grecque ERT.
« Nous espérons que (ces contacts) vont conduire à trouver une base commune pour résoudre notre seul différend vec la Turquie: celui de la délimitation de la zone économique exclusive et du plateau continental en mer Egée et en Méditerranée orientale, sur la base du droit international et de la convention onusienne sur le droit de la mer », a-t-il souligné.
Mais à Ankara, le président turc Recep Tayyip Erdogan a répliqué que « la détermination de la Turquie en Méditerranée orientale reste entière ». « Il est hors de question pour nous de faire des concessions » a-t-il insisté lors d'une conférence de presse.
Entamées en fin de matinée mardi dans un hôtel d'Athènes, les discussions entre diplomates grecs et turcs se sont tenues dans un climat pesant, au lendemain d'une mise en garde d'Ankara à la Grèce, l'UE et Israël.
Dans une note diplomatique, lundi, la Turquie a prévenu qu'elle devra donner son autorisation pour tous éventuels travaux dans le plateau continental revendiqué par Ankara en Méditerranée orientale, frontière extérieure de l'UE.
Selon des médias turcs, la démarche d'Ankara est la réaction à un accord signé le 8 mars entre Chypre, la Grèce et Israël pour la mise en oeuvre du plus long câble électrique sous-marin au monde, de plus d'un millier de kilomètres, qui passerait sous le plateau continental revendiqué par la Turquie.
Cette mise en garde a pesé sur les entretiens de mardi alors qu'Ankara a souhaité lundi par la voix de son ministre de la Défense qu'Athènes abandonne son « comportement provocateur et intransigeant le plus tôt possible ».
L'Otan « préoccupée »
Les relations entre les deux pays membres de l'Otan avaient connu une crise l'été dernier avec l'envoi du navire turc de recherches sismiques Oruç Reis dans des zones disputées, notamment près de l'île grecque de Kastellorizo proche de la Turquie, dans une zone considérée riche en hydrocarbures.
Athènes mise sur ses partenaires européens qui, lors de leur dernier sommet en décembre, avaient mis en garde Ankara contre d'éventuelles sanctions. Le sommet européen prévu fin mars devrait aborder à nouveau la question.
Lors du premier round des pourparlers à Istanbul le 25 janvier, les deux parties ne s'étaient pas mis d'accord sur la liste des questions à aborder: Athènes ne souhaite discuter que de la délimitation des eaux en mer Egée mais la Turquie insiste aussi pour parler de la définition de l'espace aérien des deux Etats.
Le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg a exprimé lundi « de sérieuses préoccupations en ce qui concerne les divergences de vues (entre alliés) en Méditerranée orientale, la décision de la Turquie d'acheter le système de défense antimissiles russe S400 et les violations des droits démocratiques en Turquie ».
« La Grèce veut transformer les questions gréco-turques en un problème entre la Turquie et l'UE et entre la Turquie et les Etats-Unis », avait dénoncé lundi le ministre turc de la Défense Hulusi Akar. « Nous ne l'acceptons pas » et « cela ne va conduire nulle part », avait-il prévenu.
Il avait toutefois souligné « l'importance des discussions exploratoires » et celles qui auront lieu dans une semaine entre les pays membres de l'Otan, ajoutant qu'Ankara était prêt à « discuter sur tout sujet ».
La 62e réunion des pourparlers gréco-turcs s'est tenue à quelques jours du 5e anniversaire de la déclaration controversée UE-Ankara signée le 19 mars 2016, qui avait contraint la Turquie à réduire le nombre de migrants passant en Europe.
La question migratoire est souvent utilisée par Ankara pour réclamer plus d'aide financière à l'UE dont la Grèce est membre, pour gérer les 3,5 millions de réfugiés sur son territoire.