La France perplexe face à l’impasse politique en Tunisie

Des manifestants tunisiens lancent des slogans contre les forces de police lors d'une manifestation contre le gouvernement le 6 mars 2021 à Tunis. Cette manifestation a été organisée à l'appel des partis d'opposition et des organisations de la société civile sous le slogan «libérer la Tunisie», contre la politique économique du gouvernement et la stratégie de répression face aux mobilisations sociales. Fethi Belaid / AFP
Des manifestants tunisiens lancent des slogans contre les forces de police lors d'une manifestation contre le gouvernement le 6 mars 2021 à Tunis. Cette manifestation a été organisée à l'appel des partis d'opposition et des organisations de la société civile sous le slogan «libérer la Tunisie», contre la politique économique du gouvernement et la stratégie de répression face aux mobilisations sociales. Fethi Belaid / AFP
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Publié le Mardi 09 mars 2021

La France perplexe face à l’impasse politique en Tunisie

  • La Tunisie se retrouve dans une impasse politique depuis deux mois qui préoccupe Paris
  • Le paysage politique tunisien est écartelé entre trois centres du pouvoir (président de la République, Premier ministre et président du Parlement), qui s’affrontent pour le partage des compétences dans un climat délétère

PARIS: Le blocage politique dans lequel se trouve la Tunisie depuis presque deux mois est inquiétant pour la bonne marche des institutions. Il préoccupe la France, pour qui la Tunisie est un partenaire capital sur l’autre rive de la Méditerranée. Pour la diplomatie française, il n’existe pas d’alternative à un dialogue apaisé et responsable dans le pays afin de résoudre les difficultés en cours.

Le paysage politique tunisien est écartelé entre trois centres du pouvoir (président de la République, Premier ministre et président du Parlement), qui s’affrontent pour le partage des compétences dans un climat délétère. Il se caractérise également par un schisme entre le parti islamiste Ennahdha, une bonne partie de la classe politique et l’opinion publique. Paradoxalement, en plein milieu de cette crise interne aigüe, le président du Parlement et le chef du parti Ennahdha, Rached Ghannouchi, ont surpris en suggérant de relancer l'Union du maghreb arabe réunissant l’Algérie, la Tunisie et de la Libye.

Les autorités marocaines n'ont pas tardé à rejeter une telle démarche qui exclurait Rabat et Nouakchott de l’UMA. Pour beaucoup de politiciens et d’experts tunisiens, la proposition de Ghannouchi est perçue comme une tentative de contourner la crise interne en trouvant une échappatoire extérieur. La France, quant à elle, n’a fait aucun commentaire officiel à la suite de la suggestion du chef d’Ennahdha.

Privilégier un dialogue interne apaisé

Un ancien diplomate français et grand connaisseur du Maghreb estime que «cette manœuvre n’a pas de sens dans le contexte actuel de la région, avec la crise libyenne et la rupture entre Alger et Rabat», ajoutant qu’il «est plus utile de faire des propositions pour privilégier un dialogue interne apaisé et responsable et résoudre la crise politico- économique».

En effet, dix ans après la «révolution tunisienne», la vie politique du pays est rythmée par de multiples crises: treize gouvernements se sont succédé depuis 2011, mais le blocage actuel semble profond: le président Kaïs Saïed et le Premier ministre Hichem Mechichi ne s’entendent pas et le parti Ennahdha, en jouant le rôle du parti au pouvoir, provoque pratiquement une sorte de paralysie institutionnelle.

Paris, qui entretient de relations politiques et économiques étroites avec la Tunisie – en 2019, la France a été le premier partenaire économique de la Tunisie, et son premier fournisseur d’investissements directs à l’étranger – est perplexe face à cette menace d’une instabilité chronique.

Évitant soigneusement toute déclaration ou démarche donnant l’impression d’une «ingérence française dans les affaires intérieures tunisiennes», une source politique française souhaitant garder l’anonymat déplore que «le président Kaïs Saïed et le chef du gouvernement Hichem Mechichi campent fermement sur leurs positions, plongeant leur pays dans une crise politique à l’issue plus qu’incertaine» et regrette l’époque du feu président Essebsi assurant le bon fonctionnement des institutions tunisiennes. De la même manière, un parlementaire français observe avec inquiétude cette  crise qui agite le sommet de l’État et semble inextricable».

Mainmise sur la constitution du gouvernement

Plusieurs analystes et experts soulignent que le président Saïed dépasse «ses prérogatives en voulant avoir la mainmise sur la constitution du gouvernement», que le chef du gouvernement défie ouvertement la présidence, et que le président du Parlement se prend parfois pour «un ministre des Affaires étrangères» ou tire les ficelles contre le locataire du palais de Carthage, en l’accusant de se comporter comme «le chef de l’opposition».

Comme d’habitude, alors que le blocage persiste depuis la mi-janvier, la syndicale des travailleurs ne parvient pas à jouer les arbitres pour apaiser le climat politique, comme cela avait été le cas en 2013, à la suite d’une démonstration de force voulue par le chef du Parlement, Rached Ghannouchi, qui avait appelé les partisans de son parti Ennahdha à manifester pour soutenir le gouvernement.

La France, qui a dialogué avec Ennahdha depuis 2011 pour assurer «le succès de la période transitoire», constate que les positions extrêmes des uns et des autres conduisent à un blocage politique complet et sans précédent, à laquelle il n’est pour l’instant pas possible d’envisager une issue, en raison des préjugés des acteurs concernés. Un diplomate européen sur place considère que l’un des éléments perturbateurs est l’ambition démesurée de Ghannouchi, et son aspiration feutrée à devenir président de la République.

Malgré ces obstacles, la déception française ne dissuade pas Paris d’œuvrer en coulisses pour appeler à un dialogue apaisé afin de mettre terme au cercle vicieux dans lequel se trouve le pays.


Manipulation médiatique et instrumentalisation de Forbes France au service de la propagande royale du Maroc

Le bâtiment des galeries du magazine Forbes. 62, 5th avenue, Manhattan, New York, NYC, USA. (Photo par : -/VW Pics/Universal Images Group via Getty Images)
Le bâtiment des galeries du magazine Forbes. 62, 5th avenue, Manhattan, New York, NYC, USA. (Photo par : -/VW Pics/Universal Images Group via Getty Images)
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  • Les chiffres sont accablants : sur 49 articles publiés par Forbes France sur le Maroc, près de la moitié sont des contenus payants étiquetés « Brandvoice », financés directement ou indirectement par des proches du régime marocain.
  • Dominique Busso, le PDG de l’édition française, ne cache pas que ces transactions douteuses sont monnaie courante.

RIYAD : L’enquête explosive menée par Marianne, complétée par les révélations incisives d’Africa Intelligence, lève le voile sur un système d’influence sophistiqué dans lequel le Maroc, sous couvert de soft power, orchestre une propagande méthodique via des relais médiatiques internationaux.

Forbes France, autrefois symbole d’excellence journalistique, apparaît aujourd’hui comme un instrument docile entre les mains des autorités marocaines.

Les chiffres sont accablants : sur 49 articles publiés par Forbes France sur le Maroc, près de la moitié sont des contenus payants étiquetés « Brandvoice », financés directement ou indirectement par des proches du régime de Mohammed VI.

Ces textes déguisés en journalisme peignent un portrait idyllique du royaume, occultant sciemment la répression des libertés individuelles, les inégalités criantes et les réalités économiques sombres du pays. Il s'agit d'une véritable mascarade qui sape l’intégrité journalistique et trompe délibérément les lecteurs.

Forbes France : un média au service de la propagande royale

Plus qu’un simple complice passif, le magazine semble s’être vendu au plus offrant, troquant son indépendance contre des millions d’euros provenant des cercles de pouvoir marocains.

Dominique Busso, le PDG de l’édition française, ne cache pas que ces transactions douteuses sont monnaie courante. Pire, selon des sources internes, le Maroc achète régulièrement des articles pour redorer l’image de son régime monarchique, tout en évitant toute transparence sur les financements réels.

Abdelmalek Alaoui, présenté comme un analyste ou un économiste, mais qui n'est en réalité qu'un agent de la Direction générale des études et de la documentation (DGED), est identifié comme un rouage clé de cette machinerie propagandiste.

Des courriels internes obtenus par Marianne montrent comment Alaoui et d’autres agents influencent directement la ligne éditoriale de ces articles en faveur de la monarchie marocaine. Forbes France ne serait rien d’autre qu’un outil au service de cette désinformation orchestrée depuis Rabat.

Un documentaire sous influence : glorification du règne de Mohammed VI

Les tentacules de cette stratégie de manipulation s’étendent bien au-delà de la presse écrite. Africa Intelligence révèle qu’un documentaire diffusé sur Public Sénat à l’approche d’une visite officielle d’Emmanuel Macron au Maroc a été conçu comme une véritable opération de communication. 

Réalisé par des proches de l’élite politique marocaine et française, ce film, présenté comme un travail journalistique, n’est rien d’autre qu’une glorification du roi Mohammed VI.

Tout en vantant les prétendus succès du roi, notamment en matière de condition féminine et de développement économique, le documentaire escamote les critiques concernant les inégalités sociales et la répression des libertés. Il s'agit là d'une manipulation éhontée, à peine voilée, où les consignes éditoriales semblent avoir été dictées par Rabat pour protéger l’image royale.

Le Maroc : un État stratège du mensonge médiatique

Ce qui se dévoile ici est bien plus qu’un simple scandale médiatique. Il s’agit d’une stratégie délibérée et agressive de soft power, dans laquelle le Maroc utilise des moyens financiers considérables pour infiltrer et manipuler les récits médiatiques internationaux.

En contrôlant la narration sur des plateformes influentes telles que Forbes France, le royaume impose une version réécrite et aseptisée de la réalité, tout en muselant les voix dissidentes.

Ces pratiques immorales révèlent la complicité choquante de médias qui, en échange d'avantages financiers, renoncent à leur devoir d'informer honnêtement. Ce brouillage systématique de la frontière entre journalisme et propagande constitue une attaque directe contre l’intégrité de l’information.

Un appel urgent à l’éthique journalistique

Les révélations de Marianne et d’Africa Intelligence mettent en lumière le manque de diligence de la part d'acteurs tels que Forbes France.

Il est désormais impératif de mener une enquête indépendante sur ces pratiques. En effet, tant que des médias accepteront de se vendre au plus offrant, les citoyens continueront à être trompés par des récits soigneusement fabriqués pour servir des intérêts politiques. 

L’intégrité de la presse n’est pas à vendre, il est temps de le rappeler.


Les États-Unis débloquent 117 millions de dollars pour les Forces libanaises

Drapeau américain agitant isolément sur fond blanc (Photo iStock)
Drapeau américain agitant isolément sur fond blanc (Photo iStock)
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  • Selon un communiqué du département d'État, ces fonds doivent aider les Forces armées libanaises (FAL) et les Forces de sécurité intérieure (FSI, chargées du maintien de l'ordre) à « garantir la souveraineté du Liban dans tout le pays ».
  • C'est ce dernier qui est à l'origine de la réunion des donateurs internationaux qui a eu lieu jeudi « avec partenaires et alliés pour évoquer le soutien crucial à la sécurité du Liban afin de pérenniser la cessation des hostilités avec Israël ».

WASHINGTON : Lles États-Unis ont annoncé  samedi le transfert de 117 millions de dollars destinés à soutenir les forces de l'ordre et l'armée libanaises, à l'issue d'une réunion de donateurs internationaux, jeudi.

Selon un communiqué du département d'État, ces fonds doivent aider les Forces armées libanaises (FAL) et les Forces de sécurité intérieure (FSI, chargées du maintien de l'ordre) à « garantir la souveraineté du Liban dans tout le pays ».

C'est ce dernier qui est à l'origine de la réunion des donateurs internationaux qui a eu lieu jeudi « avec partenaires et alliés pour évoquer le soutien crucial à la sécurité du Liban afin de pérenniser la cessation des hostilités avec Israël ».

Un cessez-le-feu a pris effet fin novembre entre le mouvement islamiste pro-iranien Hezbollah et Israël, après plus d'un an de bombardements de part et d'autre, ainsi qu'une incursion des forces israéliennes en territoire libanais à partir de fin septembre.

L'enveloppe annoncée samedi par le département d'État « démontre son engagement à continuer à travailler avec ses partenaires et alliés pour s'assurer que le Liban bénéficie du soutien nécessaire pour renforcer la sécurité du pays et de la région ».

Samedi, le président libanais, Joseph Aoun, a réclamé le retrait de l'armée israélienne « dans les délais fixés » par l'accord de cessez-le-feu.

Ce dernier prévoit le déploiement de l'armée libanaise aux côtés des Casques bleus dans le sud du pays et le retrait de l'armée israélienne dans un délai de 60 jours, soit d'ici au 26 janvier.

Le Hezbollah doit, pour sa part, retirer ses forces au nord du fleuve Litani, à environ 30 km de la frontière libano-israélienne. 


Manifestation pour revendiquer la libération de l'opposante Abir Moussi

Des partisans d'Abir Moussi, chef du Parti Destourien Libre (PDL), participent à une manifestation demandant sa libération, à Tunis le 18 janvier 2025. (Photo FETHI BELAID / AFP)
Des partisans d'Abir Moussi, chef du Parti Destourien Libre (PDL), participent à une manifestation demandant sa libération, à Tunis le 18 janvier 2025. (Photo FETHI BELAID / AFP)
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  • Plusieurs centaines de sympathisants du Parti destourien libre (PDL), qui revendique l'héritage des autocrates Bourguiba et Ben Ali, ont manifesté samedi en Tunisie pour réclamer la libération de leur dirigeante, l'opposante Abir Moussi.
  • Soupçonnée d'avoir voulu rétablir un pouvoir similaire à celui de Zine El Abidine Ben Ali, renversé en 2011 par la première révolte du Printemps arabe.

TUNIS : Plusieurs centaines de sympathisants du Parti destourien libre (PDL), qui revendique l'héritage des autocrates Bourguiba et Ben Ali, ont manifesté samedi en Tunisie pour réclamer la libération de leur dirigeante, l'opposante Abir Moussi.

Brandissant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire « Liberté pour Abir » ou « Nous sommes des opposants, pas des traîtres ! », ils étaient entre 500 et 1 000, selon des journalistes de l'AFP. Beaucoup portaient des drapeaux tunisiens et des photos de la dirigeante du PDL.

Ils ont critiqué virulemment à la fois le président Kaïs Saied et le parti islamo-conservateur d'opposition Ennahdha. Mme Moussi, ex-députée de 49 ans, est en détention depuis son arrestation le 3 octobre 2023 devant le palais présidentiel, où, selon son parti, elle était venue déposer des recours contre des décrets de M. Saied.

Mme Moussi fait l'objet de plusieurs accusations, dont celle particulièrement grave de tentative « ayant pour but de changer la forme de l'État », soupçonnée d'avoir voulu rétablir un pouvoir similaire à celui de Zine El Abidine Ben Ali, renversé en 2011 par la première révolte du Printemps arabe.

Les manifestants ont dénoncé le décret 54 sur les « fausses nouvelles », en vertu duquel Mme Moussi est poursuivie dans cette affaire, et dont l'interprétation très large a entraîné l'incarcération depuis septembre 2022 de dizaines de politiciens, d'avocats, de militants ou de journalistes.

Pour Thameur Saad, dirigeant du PDL, emprisonner Mme Moussi pour des critiques envers l'Isie « n'est pas digne d'un pays se disant démocratique ». « Les prisons tunisiennes sont désormais remplies de victimes du décret 54 », a renchéri à l'AFP Karim Krifa, membre du comité de défense de Mme Moussi.

D'autres figures de l'opposition, dont le chef d'Ennahdha, Rached Ghannouchi, sont également emprisonnées.

Depuis le coup de force de M. Saied à l'été 2021, l'opposition et les ONG tunisiennes et étrangères ont déploré une régression des droits et des libertés en Tunisie. Le chef de l'État a été réélu à une écrasante majorité de plus de 90 % des voix le 6 octobre, lors d'un scrutin marqué toutefois par une participation très faible (moins de 30 %).