DUBAÏ: En mars 2011, j'étais dans ma dernière année d'école. Mes plans étaient de quitter l'Arabie saoudite pour aller en Syrie et entrer à l'université. Soudainement, tout a changé, en raison des manifestations en Syrie. Je devais rapidement avoir un plan B, et je suis alors allé en Jordanie où j'ai poursuivi mes études. Pendant mon séjour, j'y ai rencontré des Syriens. Nous étions politiquement actifs, mais en 2013 et 2014, les manifestations se sont transformées en guerre civile et je me suis senti triste, déprimé – un sentiment de capitulation. Tout ce que nous avions fait avait été vain. Alors, j’ai arrêté…
Je suis arrivé en Europe à la fin de 2018 et, d'une certaine façon, je me suis davantage impliqué dans les manifestations et la liberté d'expression, mais je me sentais étranger et confronté au racisme. Ces dix dernières années ont été difficiles, j'aurais aimé les effacer. J’ai changé en tant que personne, et je n’aurais jamais imaginé qu’à 27 ans je serais engagé dans le militantisme politique et les débats. Rien de tout cela ne m'intéressait avant 2011.
Mon travail tient de l'improvisation. J'aime mélanger les choses, et j'ai trouvé ici l’occasion d’associer différentes images et de voir comment elles réagissent les unes avec les autres, dans un même cadre. Quand j'ai réalisé ce travail en novembre 2019, j'étais devant mon ordinateur, et je voulais faire quelque chose de personnel et de vulnérable.
J'ai d’importantes archives de photos de la Syrie, et j'ai regardé différentes images de Damas jusqu'à ce que j’en trouve une qui ait un potentiel évocateur suffisant. J'avais aussi des dizaines d'affiches de films. J'ai commencé à les découper, en les plaçant sur la photo de Damas. J'ai fait de nombreux essais, mais aucun ne m'a convaincu. Puis, j'ai découpé au hasard cette photo d'un homme d'une manière précise, et c'est comme s'il étreignait Damas. J'étais arrivé là où je voulais. J'ai senti que c'était bon.
J'adore l'idée du contraste, j'ai donc choisi le noir et blanc avec la couleur rouge vif. Le rouge est une couleur forte, symbolisant le sang, la tourmente, la révolution. Je considère ce travail comme une lettre d'amour à Damas, qui m'est très précieuse. Je l'ai visitée plus d'une fois et j’y ai vécu pendant trois semaines – parmi les plus belles de ma vie.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur arabnews.com