Ghassan Diab, de nationalité libanaise, a été extradé de Chypre vers les États-Unis afin de faire face aux accusations liées au blanchiment d’argent provenant de la drogue pour le compte du Hezbollah, groupe militant libanais. Selon le Département de justice des États-Unis, Diab est accusé d’avoir « conspiré pour s’engager, et s’est en effet engagé, dans le blanchiment des produits provenant de la drogue à travers l’échange de pesos sur le marché noir en appui au réseau mondial de soutien criminel du Hezbollah ».
Par ailleurs, le mois dernier, les autorités italiennes ont annoncé la saisie de 15,4 tonnes de comprimés de Captagon contrefaits produits en Syrie — pays qui serait le plus grand producteur et exportateur de cette drogue. Les comprimés de Captagon contrefaits totalisaient un montant estimé à 1,1 milliard de dollars. Le Captagon est interdit dans de nombreux pays du fait de sa nature addictive. Les comprimés saisis étaient tellement bien cachés que les scanners des aéroports ne les ont pas détectés, d’après le commandant de la police financière de Naples. C’était l’interception d’appels téléphoniques effectués par des criminels locaux qui a permis la police de trouver les drogues.
Les autorités grecques ont également saisi l’année dernière une énorme quantité de comprimés de Captagon qui valaient plus d’un demi-milliard de dollars, provenant aussi de Syrie. L’unité grecque des crimes financiers a indiqué dans un communiqué : « C’est la plus grande quantité jamais saisie dans le monde, privant le crime organisé de produits qui auraient dépassé 660 millions de dollars ».
Il est difficile de croire que les autorités syriennes et leurs alliés, le Hezbollah et le régime iranien, ne sont pas conscientes de la production à grande échelle de cette drogue illégale. La Syrie pourrait être considérée comme une bonne option pour le Hezbollah et l’Iran pour produire ces comprimés car il n’y a presque pas de surveillance internationale dans le pays.
« Rouhani a avoué que la République islamique fait face à la pire crise économique depuis sa création en 1979 ».
L’Iran et ses allies subissent une pression financière importante en raison des contraintes imposées par les sanctions américaines à Téhéran. Ces sanctions ont forcé l’Iran à réduire le financement de ses milices en Syrie. Les militants iraniens ne toucheraient ni leurs salaires ni leurs avantages sociaux, ce qui rend extrêmement difficile pour eux de continuer à se battre et à déstabiliser la région. Un combattant dans une milice soutenue par l’Iran en Syrie a déclaré au New York Times l’année dernière : « Les jours de gloire sont révolus et ne reviendront jamais. L’Iran n’a plus assez d’argent à nous donner ».
Ressentant la pression des sanctions sur l’Iran, le chef du Hezbollah Hassan Nasrallah, a également appelé la branche de financement de son groupe à « à fournir une opportunité pour le jihad avec de l'argent et aussi à aider dans cette bataille en cours ». Le président iranien Hassan Rouhani a avoué que la République islamique fait face à la pire crise économique depuis sa création en 1979 ».
Les revenus générés par le trafic de drogue pourraient constituer un élan significatif pour le Hezbollah, le régime syrien et l’Iran. Les rôles du Hezbollah et de l’Iran — en particulier celui du Corps des Gardiens de la révolution islamique — dans la contrebande de drogue datent du début des années 1980. Selon le livre intitulé « Hezbollah: The Global Footprint of Lebanon’s Party of God » rédigé par Matthew Levitt : « Après la création du Hezbollah au début des années 1980 — qui recrutait massivement des tribus et des familles clés de la Vallée de la Bekaa — il a bénéficié d’un décret religieux, ou fatwa, émis au milieu des années 1980 et donnant une explication religieuse à l’activité autrement impure et illicite du trafic de drogue. Présumée d’avoir été émise par des chefs religieux iraniens, la fatwa disait : « Nous fabriquons de la drogue pour Satan — les États-Unis et les Juifs. Si nous ne pouvons pas les tuer avec des armes à feu, nous les tuerons avec de la drogue ». Selon un rapport du FBI déclassifié en novembre 2008, « le chef spirituel du Hezbollah… a déclaré que le trafic de stupéfiants est moralement acceptable si les drogues sont vendues à des infidèles occidentaux dans le cadre de la guerre contre les ennemis de l’Islam ».
L’Iran a de même renforcé sa coopération avec des cartels latino-américains. Ceci aidera non seulement Téhéran et le Hezbollah à contourner les sanctions mondiales et générer des revenus, mais aidera aussi le régime iranien à infiltrer et à constituer une menace pour les États-Unis qui sont considérés l’ennemi numéro 1. Il est difficile de croire que ces drogues illicites n’entrent ni aux États-Unis, ni au Canada. Le Center for a Secure Free Society, basé à Washington, a publié une étude intitulée « Canada on Guard: Assessing the Immigration Security Threat of Iran, Venezuela and Cuba » en 2014. Elle précisait que le Venezuela avait délivré plusieurs passeports à des islamistes radicaux. Ces passeports pourraient être utilisés pour voyager en Amérique du Nord ou en Europe.
Il convient de rappeler que l’Iran avait recruté des membres d’un cartel de drogue mexicain en 2011 dans une tentative infructueuse d'assassiner l'ambassadeur saoudien de l'époque aux États-Unis, Adel Al-Jubeir, en faisant sauter un restaurant à Washington.
La communauté internationale doit être très attentive et perturber le dangereux triangle du trafic de drogue que l'Iran, le Hezbollah et la Syrie ont très probablement développé et élargi.
Dr Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain formé à Harvard.
Twitter : @Dr_Rafizadeh
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Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com