PARIS : Les députés français ont approuvé samedi un élargissement des motifs de fermeture des lieux de culte, avec dans le collimateur les mosquées accueillant des « prêcheurs de haine », dans le cadre de l'examen du projet de loi sur le « séparatisme ».
L'examen en première lecture de ce texte « confortant le respect des principes de la République », selon sa dénomination officielle, qui veut notamment renforcer l'arsenal contre l'islamisme, doit se conclure samedi. Un vote solennel est ensuite prévu pour mardi avant son passage au Sénat.
L'article 44 adopté samedi instaure une procédure de fermeture pour deux mois par les autorités étatiques des lieux de culte théâtres de propos, idées, théories, activités incitant à la haine ou à la violence, ou tendant à les encourager.
Cette disposition étend le champ d'une loi de 2017 ne prévoyant une telle mesure que pour la lutte antiterroriste. En trois ans, huit lieux de culte musulmans ont été fermés en vertu de cette loi. Le dernier en date, en octobre, est la grande mosquée de Pantin, en banlieue parisienne, après l'assassinat du professeur Samuel Paty par un jihadiste.
Vendredi soir, les députés ont voté l'obligation pour les associations cultuelles en France de déclarer les financements étrangers dépassant 10 000 euros par an sous peine de sanctions.
Les députés ont adopté un amendement, présenté par un député du parti présidentiel La République en Marche, rendant obligatoire de déclarer toute aliénation d'un lieu de culte français à un Etat étranger. L'autorité administrative pourra s'y opposer en cas de menace « affectant un intérêt fondamental de la société ».
« Immeubles de rapport »
Les députés ont parallèlement validé vendredi soir de nouveaux outils de financement pour les cultes dont la possibilité d'exploiter des « immeubles de rapport » -posséder et administrer des immeubles acquis à titre gratuit pour en tirer des revenus.
Cette disposition a suscité l'inquiétude de plusieurs élus quant à « une remise en cause des équilibres » de la loi de 1905, le texte fondateur de la laïcité en France.
Les députés ont voté un amendement plafonnant à 33% des ressources totales annuelles des associations les revenus tirés des immeubles de rapport.
Avec cette mesure, le gouvernement veut notamment inciter musulmans et évangéliques, dont les structures associatives optent actuellement majoritairement pour le statut prévu par la loi sur les associations de 1901, à choisir le statut prévu dans la loi de 1905 plus strict au plan comptable.
Le ministre français de l'Intérieur Gérald Darmanin a expliqué vouloir inciter les cultes à ne pas dépendre des « financements étrangers » mais des « fidèles sur le sol national ». Selon lui, c'est « totalement conforme à l'esprit de (la loi) de 1905 » sur la séparation des Eglises et de l'Etat.
Les députés ont entamé le 1er février l'examen du projet, inspiré d'un discours du président français Emmanuel Macron début octobre présentant sa stratégie pour lutter contre l'islamisme après les attentats jihadistes qui ont coûté la vie à l'enseignant Samuel Paty mi-octobre en région parisienne et à trois fidèles dans la basilique de Nice (sud-est) deux semaines plus tard.
Le projet de loi comprend des mesures sur la neutralité du service public, la lutte contre la haine en ligne, l'instruction en famille, le contrôle renforcé des associations, une meilleure transparence des cultes et de leur financement ainsi que la lutte contre les certificats de virginité, la polygamie ou les mariages forcés.