LONDRES : Moufida Tlatli, artiste tunisienne novatrice qui fut la première réalisatrice arabe à tourner un long métrage, s’est éteinte à l'âge de 73 ans.
Mme Tlatli est particulièrement connue pour un film révolutionnaire réalisé en 1994, Les Silences du palais qui relate les aventures d'une femme qui revient dans un palais abandonné. Elle est alors plébiscitée par la critique, qui salue la manière dont la cinéaste explore les traumatismes vécus par les femmes dans le monde arabe pendant de nombreuses générations.
Les Silences du palais remporte plusieurs prix internationaux, dont le prix du «film le plus inventif et le plus créatif de l'année» au Festival du film de Londres.
Selon le critique et réalisateur Mark Cousins, ce long métrage compte parmi les dix meilleurs films africains. Son histoire est inspirée par les épreuves qu’a endurées la mère de Moufida Tlatli tout au long de sa vie.
La cinéaste est parvenue à briser un tabou qui était tenace lorsqu’elle est devenue réalisatrice. «Dans le monde du cinéma des pays arabes, la tradition veut qu'une femme travaille dans l’ombre ou qu’elle assume des fonctions précises, comme le montage. Cela ne m'avait jamais traversé l'esprit de réaliser des films», explique-t-elle.
Son deuxième film, La Saison des hommes, sort en 2000 et il aborde le thème des relations entre les hommes et les femmes. Il raconte en effet l'histoire d'un groupe de personnes qui vit sur l'île tunisienne de Djerba. Les hommes passent le plus clair de leur temps à travailler en dehors de l'île et ne retournent chez eux qu’un mois par an.
Pour Peter Bradshaw, principal critique de films du quotidien The Guardian, «La Saison des hommes [est un] film merveilleusement lucide, empreint de compassion, ainsi qu’un drame familial à la fois puissant et fascinant.»
Tout comme Les Silences du palais, le film La Saison des hommes est salué par les critiques cinématographiques internationaux et remporte plusieurs prix.
Née en 1947 dans la ville de Sidi Bou Saïd, Moufida Tlatli étudie le montage à Paris avant de rentrer en Tunisie en 1972.
C'est en 2004 que sort son troisième film, Nadia et Sarra, avec en vedette l'actrice et réalisatrice palestinienne Hiam Abbass.
En 2011, Mme Tlatli occupe le poste de ministre de la Culture dans le gouvernement de transition qui a été formé après la révolution tunisienne.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com.