TUNIS: Des centaines de manifestants se sont rassemblés mardi 26 janvier au Bardo, à l’ouest de la capitale, pour scander des slogans hostiles à la coalition au pouvoir et au gouvernement Mechichi en poste depuis septembre. Mais ils n’ont pu s’approcher du siège de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) qu’un important dispositif de police avait bunkérisé.
Dix jours après le début des protestations aux quatre coins de la Tunisie, à l’occasion du 10e anniversaire de la révolution tunisienne, des manifestants ont mis le cap le 26 janvier 2021 sur le siège de l’ARP, l’un des trois centres du pouvoir.
Ils sont venus scander les mêmes slogans que ceux des manifestants dans la plupart des grandes villes du pays depuis le début du mois. Ils expriment leur frustration devant l’aggravation des problèmes économiques et sociaux en raison de l’échec des gouvernements successifs à y apporter des réponses adéquates. Mais aussi dire leur hostilité à la force politique au pouvoir sans discontinuer depuis dix ans, le mouvement islamiste Ennahdha, mais aussi à Hichem Mechichi, nouveau chef du gouvernement, en qui de plus en plus de Tunisiens voient une marionnette entre les mains de M. Rached Ghannouchi, président d’Ennahdha et de l’ARP. Notamment depuis qu’il a cédé aux pressions de ce dernier et accepté de procéder à un remaniement du gouvernement pour en exclure les ministres considérés comme des hommes du président, Kaïs Saïed. Un remaniement qui a obtenu la bénédiction d’une majorité de députés mardi.
D’autres manifestants venant d’Ettadhamen (Solidarité) devaient les rejoindre devant le Parlement. Ils en ont été empêchés par les forces de police. Craignant un débordement, les autorités ont ce jour-là bunkérisé le siège de l’ARP en déployant un important dispositif de police qui a bloqué toute les rues qui y mènent. Ce qui a provoqué la colère des députés de l’opposition qui ont dénoncé «la militarisation du Parlement», retardant le début de la plénière qui devait accorder sa confiance au gouvernement remanié.
Député indépendant, Adnen Hajji a quant à lui laissé éclater son indignation. «Le Parlement n’a jamais été isolé de la sorte. En tant que député, cela ne m’honore pas d’être derrière les forces de police pour échapper au peuple», a-t-il déclaré.
La tension sociale ne cesse de monter alors que la crise politique au sommet de l’État s’envenime. La veille, un nouveau clash a eu lieu entre le président Saïed et ceux du Parlement et du gouvernement. Le chef de l’État conteste le remaniement auquel a procédé M. Mechichi en violation de la Constitution, selon lui. La loi fondamentale dispose en effet que lorsque le changement se traduit aussi par une modification de l’organisation de certains ministères, elle doit être validée en Conseil des ministres. Ce que le chef du gouvernement n’a pas fait.
Kaïs Saïed n’accepte pas que des personnalités qui font l’objet de poursuites et/ou suspectées de conflits d’intérêt puissent entrer au gouvernement. Le président avait promis de ne pas leur permettre de prendre leurs fonctions.
Alors que le précédent gouvernement avait pu prêter serment dès le lendemain de l’obtention de la confiance de l’ARP, le 26 février 2020, rien n’indiquait dans l’après-midi du mardi que la nouvelle équipe de Mechichi allait pouvoir faire de même.