BEYROUTH: La Banque centrale libanaise a nié mardi les allégations concernant le gouverneur, Riad Salamé, que les autorités suisses accusent d’avoir viré près de 400 millions de dollars US à l’étranger. Son frère et son assistante sont aussi ciblés par l’enquête.
Le bureau du Procureur général suisse a demandé l’assistance juridique du Liban dans le cadre d’une enquête pour «blanchiment d’argent aggravé» ainsi qu’un éventuel détournement de fonds lié à la banque centrale libanaise.
Salamé assure pour sa part ne rien avoir à se reprocher. Il rejette les accusations et dénonce des «fabrications de preuves» et des «fausses nouvelles».
La Banque du Liban a déclaré dans un communiqué que «Salamé, comme d’habitude, respecte les lois libanaises et internationales en vigueur, et coopère pleinement avec toutes les parties concernées».
Le journal libanais pro-Hezbollah Al-Akhbar a déclaré le même jour que le Liban a reçu une demande officielle des autorités européennes et suisses en vue de fournir une assistance judiciaire dans une enquête sur des transferts financiers douteux impliquant Salamé.
Selon Al-Akhbar, les enquêteurs européens recherchent des informations sur les virements bancaires d'un montant total de 400 millions de dollars effectués par Salamé, son frère Raja et son assistante Marianne Hoayek.
Plus tôt dans la journée, la ministre de la Justice, Marie-Claude Najm, a dit avoir accusé réception d’une requête de coopération de la part des autorités judiciaires suisses.
Le journal poursuit que «l'enquête sur les agissements criminels ne concerne pas uniquement Salamé. La Banque du Liban et ses institutions affiliées, en particulier la Finance Bank, le Middle East Airlines (MEA), l’Intra Bank et le Casino du Liban, sont aussi dans la ligne de mire suisse».
Le président Michel Aoun et le Premier ministre par intérim, Hassan Diab, ont été briefés à ce sujet, indique le quotidien.
Une source sous le couvert de l’anonymat a confié à Al-Akhbar que «les autorités européennes se penchent sur le cas de Salamé dans le cadre d'un dossier qui comprend une longue liste de personnalités libanaises. Cette liste a été établie en coopération avec la France, la Grande-Bretagne et les États-Unis, qui ont demandé la participation de l'UE, et les puissances ont toutes exigé que les sanctions ne soient pas uniquement imposées par le département du Trésor américain, et qu’elles ne soient pas exclusivement liées à la lutte contre le financement du terrorisme».
La Banque centrale, qui menace d’intenter une poursuite judiciaire, assure que les propos du journal sont «montés de toutes pièces».
Une source financière et bancaire a déclaré à Arab News que le «gouverneur ne peut légalement transférer des fonds à l'étranger à partir la Banque du Liban. Tous les transferts effectués via des banques commerciales privées, et toutes les opérations de la Banque du Liban sont contrôlées par le Conseil central ainsi que par le Commissaire du gouvernement à la Banque du Liban».
La source explique que lorsqu'une banque centrale dans le monde effectue des transferts à l'étranger, «ils deviennent automatiquement sous surveillance américaine. Le Liban reçoit généralement des requêtes de l'étranger pour fournir une assistance sur la base de l'accord d'échange d'informations fiscales».
La source maintient qu’elle ne tente pas de «défendre qui que ce soit, mais ce qui a été évoqué pourrait indiquer un conflit politique, et ce qui a été publié fait partie du conflit politique au Liban».
Aoun et son équipe demandent une vérification juricomptable qui couvre la banque centrale, et le parlement a de plus approuvé une demande d'étendre cette vérification à toutes les institutions de l'État.
La Banque du Liban est accusée d’avoir perdu des dépôts en dollars dans des banques privées lors d’emprunts pour financer les projets du gouvernement libanais.
Le système bancaire paralysé du Liban est au cœur d'une crise financière qui a éclaté à la fin de 2019. Les banques ont depuis cette date bloqué la plupart des transferts à l'étranger et elles ont coupé l'accès aux dépôts, ce qui a entraîné une colère généralisée au moment où un nombre croissant de libanais sont de plus en plus confrontés à des difficultés économiques désastreuses.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com