Le rituel des émeutes de janvier au rendez-vous en Tunisie

Les manifestants entourés de fumigènes alors qu'ils bloquent une rue lors d'affrontements avec les forces de sécurité dans la banlieue d'Ettadhamen, dans la banlieue nord-ouest de Tunis, la capitale tunisienne, le 17 janvier 2021 (Photo, AFP).
Les manifestants entourés de fumigènes alors qu'ils bloquent une rue lors d'affrontements avec les forces de sécurité dans la banlieue d'Ettadhamen, dans la banlieue nord-ouest de Tunis, la capitale tunisienne, le 17 janvier 2021 (Photo, AFP).
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Publié le Mardi 19 janvier 2021

Le rituel des émeutes de janvier au rendez-vous en Tunisie

  • Depuis samedi, des heurts nocturnes ont éclaté dans plusieurs régions défavorisées de Tunisie, conduisant à des centaines d’arrestations
  • Faut-il voir dans cette poussée de fièvre des émeutes de la faim ou existe-il un agenda politique caché dans le contexte d’un remaniement ministériel ?

TUNIS: Des premières grandes «émeutes du pain» de janvier 1978 à celles de 2011 qui ont conduit à la chute du régime Ben Ali, le mois de janvier est quasiment chaque année un moment difficile pour le gouvernement en place. Une nouvelle fois, 2021 n’a pas dérogé à cette tradition. Avec l’éternelle interrogation qui demeure : à qui profite le «crime» ?

Le 14 janvier, les autorités s’attendaient à des manifestations pour commémorer le 10e anniversaire de la révolution tunisienne qui avait emporté le régime de l’ancien président Ben Ali. Mais c’est quarante-huit heures plus tard qu’elles ont eu lieu. Samedi 15 janvier, des heurts nocturnes ont en effet éclaté dans plusieurs régions du pays: Tunis, Siliana (nord-ouest), Sousse et Kairouan (centre-est). Elles se sont poursuivies dimanche et étendues à d’autres régions (Bizerte, au nord, Nabeul au nord-est et Kasserine, au centre-ouest). Plusieurs centaines de personnes ont déjà été arrêtées par les autorités.

La plupart des quartiers concernés ont en commun de se trouver dans des régions défavorisées. Faut-il voir dans cette poussée de fièvre des émeutes de la faim ? Une enquête en cours devrait permettre de déterminer les responsabilités. Les autorités s’abstiennent jusqu’ici de tout commentaire. Lundi 18 janvier, les pages Facebook de la présidence du gouvernement et du ministère de l’Intérieur n’avaient pas encore évoqué les événements en cours.

Toutefois, un représentant de l’autorité dans la capitale, qui souhaite garder l’anonymat, indique que les autorités n’excluent pas que les jeunes manifestants soient manipulés à des fins politiques. Et rappelle que cela s’est déjà produit par le passé. Militant politique et ancien ambassadeur de Tunisie au Sénégal, Jalel Lakhdhar abonde dans le même sens, et constate avec étonnement que les troubles se déroulent à la tombée de la nuit et que «ce ne sont pas des manifestations ordinaires avec des slogans exprimant les revendications des contestataires. Des vidéos sur les réseaux sociaux montrent des adolescents et des jeunes désœuvrés brûlant des pneus, jetant des pierres sur les forces de l'ordre, et pillant des magasins».

Même s’il estime qu’«il est difficile de ne pas voir la dimension économique et sociale de cette contestation», l’ancien diplomate s’interroge sur les éventuelles responsabilités politiques. «Existe-t-il un agenda politique caché derrière ces manifestations ? C’est possible. Cependant, ces jeunes font tout pour camoufler la dimension politique de leur protestation. Ils mettent en avant les problèmes économiques et sociaux des quartiers populaires défavorisés et des laissés-pour-compte», observe-t-il. L’ancien ambassadeur remarque qu’«un courant d'extrême gauche n'a pas hésité à encourager ces jeunes à continuer leur mouvement jusqu'à la chute du système politique. Il s'agit des nostalgiques du Front populaire.

L’ombre du président?

Il signale aussi l’activisme «des coordinations de sympathisants du locataire de Carthage qui diffusent sur Facebook des scènes déplorables de pillage et d'accrochages avec la police, afin de semer davantage la zizanie et envenimer la situation». Lakhdhar évoque d’autant plus la piste de l’implication de ces coordinations de sympathisants que, fait-il remarquer, les émeutes ont éclaté le jour même du remaniement ministériel, qui «a été perçu comme un renforcement du pouvoir du chef du gouvernement au détriment du président de la République».

Cependant, toutes les manifestations ne sont pas suspectes et ne tournent pas systématiquement à l’émeute. Lundi 18 janvier, des jeunes, apparemment des étudiants, ont manifesté dans le centre-ville de Tunis dans le calme. Ils ont incité leurs concitoyens à se rebeller contre la dégradation de leurs conditions de vies. Les policiers n’ont pas eu à faire usage de bombes lacrymogènes, comme ils y ont été contraints samedi et dimanche soir.


Liban: un mort dans une frappe israélienne dans le sud

Des personnes inspectent un véhicule incendié qui aurait été touché par une frappe israélienne à Ghazieh, près de Sidon, le 18 avril 2025. (AFP)
Des personnes inspectent un véhicule incendié qui aurait été touché par une frappe israélienne à Ghazieh, près de Sidon, le 18 avril 2025. (AFP)
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  • Une personne a été tuée vendredi dans un nouveau raid israélien visant un véhicule près de la ville côtière de Saïda, dans le sud du Liban
  • Malgré le cessez-le-feu entré en vigueur le 27 novembre après deux mois de guerre entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne mène régulièrement des attaques au Liban

GHAZIYEH: Une personne a été tuée vendredi dans un nouveau raid israélien visant un véhicule près de la ville côtière de Saïda, dans le sud du Liban, a indiqué le ministère libanais de la Santé.

Malgré le cessez-le-feu entré en vigueur le 27 novembre après deux mois de guerre entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne mène régulièrement des attaques au Liban, affirmant viser combattants et infrastructures du mouvement islamiste libanais soutenu par l'Iran.

"Le raid mené par l'ennemi israélien contre une voiture sur la route Saïda-Ghaziyeh a fait un mort", a indiqué le ministère de la Santé.

Après la frappe, le véhicule tout-terrain a pris feu, provoquant un nuage de fumée noire dans le ciel, selon un journaliste de l'AFP sur place. L'armée libanaise a bouclé la zone et les pompiers sont intervenus pour maîtriser les flammes.

La frappe n'a pas été revendiquée dans l'immédiat, mais l'armée israélienne a affirmé avoir tué plusieurs combattants du Hezbollah parmi lesquels des "commandants" cette semaine dans le sud du pays.

Après le début de la guerre à Gaza déclenchée le 7 octobre 2023 par une attaque du Hamas sur le sol israélien, le Hezbollah a ouvert un front contre Israël, tirant des roquettes sur le territoire israélien, disant agir ainsi en soutien aux Palestiniens.

En septembre 2024, le conflit a dégénéré en guerre ouverte avec des bombardements israéliens intenses au Liban qui ont décimé la direction du Hezbollah et fait plus de 4.000 morts, selon les autorités.


Explosion au port de Beyrouth: première comparution d'un ex-ministre

Une photo montre une vue du port de Beyrouth, site d'une énorme explosion qui a dévasté la capitale libanaise trois ans plus tôt, le 22 juillet 2023. (AFP)
Une photo montre une vue du port de Beyrouth, site d'une énorme explosion qui a dévasté la capitale libanaise trois ans plus tôt, le 22 juillet 2023. (AFP)
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  • Un ancien ministre de l'Intérieur a comparu jeudi pour la première fois devant le juge libanais chargé de l'enquête sur la gigantesque explosion au port de Beyrouth en 2020
  • En 2021, le juge Tarek Bitar avait été contraint de suspendre son enquête sur cette explosion qui a fait plus de 220 morts et plus de 6.500 blessés en raison de pressions politiques

BEYROUTH: Un ancien ministre de l'Intérieur a comparu jeudi pour la première fois devant le juge libanais chargé de l'enquête sur la gigantesque explosion au port de Beyrouth en 2020, a indiqué une source judiciaire à l'AFP.

En 2021, le juge Tarek Bitar avait été contraint de suspendre son enquête sur cette explosion qui a fait plus de 220 morts et plus de 6.500 blessés en raison de pressions politiques.

Une série d'actions en justice avaient en outre été intentées contre lui par des responsables politiques et fonctionnaires cités dans l'enquête, notamment l'ancien ministre de l'Intérieur, Nohad al-Machnouk, soupçonné de "négligence et manquements".

Le juge a repris en février ses investigations, après l'élection de Joseph Aoun à la présidence de la République et la nomination d'un Premier ministre réformateur, Nawaf Salam, qui se sont tous deux engagés à garantir l'indépendance du pouvoir judiciaire.

Selon la source judiciaire qui a requis l'anonymat, l'interrogatoire a porté sur un rapport que M. Machnouk avait reçu le 5 avril 2014, alors qu'il était ministre de l'Intérieur, concernant la "détention d’un navire dans les eaux territoriales libanaises, dont l’équipage avait demandé à être autorisé à reprendre la mer".

Le 4 août 2020, l'une des plus grandes explosions non nucléaires de l'histoire a dévasté des pans entiers de la capitale libanaise.

La déflagration a été provoquée par un incendie dans un entrepôt où étaient stockées sans précaution des tonnes de nitrate d'ammonium acheminées par navire, malgré des avertissements répétés aux plus hauts responsables.

Pointées du doigt pour négligence criminelle, les autorités libanaises, qui étaient au courant des dangers encourus, ont rejeté toute enquête internationale.

L'enquête avait notamment été suspendue après les accusations de partialité du juge proférées par le Hezbollah, désormais très affaibli par sa dernière guerre contre Israël fin 2024. Le parti qui dominait la vie politique libanaise avait demandé le renvoi de M. Bitar.

Deux juges de la direction des enquêtes de Paris sont attendus à Beyrouth à la fin du mois, pour présenter à M. Bitar les éléments recueillis par la justice française, trois ressortissants français figurant parmi les victimes, selon une source judiciaire.

Le 11 avril, deux anciens hauts responsables de la sécurité avaient également comparu pour la première fois devant M. Bitar.


Cellule terroriste: Amman partage les détails de l’enquête avec Beyrouth

Le roi Abdallah de Jordanie et le président libanais Joseph Aoun. (AFP)
Le roi Abdallah de Jordanie et le président libanais Joseph Aoun. (AFP)
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  • Beyrouth ne sait pas si des citoyens libanais sont impliqués dans un groupe de fabrication de missiles
  • Les services de renseignement de l'armée arrêtent deux Palestiniens pour contrebande d'armes à la frontière libano-syrienne

BEYROUTH: Le président libanais Joseph Aoun a été informé, mercredi, par le roi Abdallah de Jordanie des résultats de l'enquête sur une cellule de fabrication de missiles découverte en Jordanie. Deux membres de cette cellule avaient été envoyés au Liban pour y suivre une formation.

Selon son bureau de presse, M. Aoun a exprimé la «pleine disposition du Liban à la coordination et à la coopération» entre les deux pays et a chargé le ministre de la Justice Adel Nassar de travailler avec son homologue jordanien, en coopération avec les agences de sécurité et judiciaires, sur les enquêtes et l'échange d'informations.

Une source judiciaire a déclaré à Arab News que les services de renseignement de l'armée libanaise «suivaient de près l'affaire de la cellule terroriste et nous ne savons pas encore si des Libanais sont impliqués».

«Cette agence a demandé à la Jordanie de lui fournir des informations concernant les enquêtes, de s'appuyer sur les enquêtes libanaises et, dans le cas où une implication libanaise serait prouvée, l'affaire serait alors renvoyée à la justice libanaise», a déclaré cette personne.

Parallèlement, les services de renseignement de l'armée libanaise ont déclaré avoir arrêté deux Palestiniens dans la ville de Sidon, dans le sud du pays, pour «commerce et contrebande d'armes militaires à travers la frontière libano-syrienne, et ont saisi plusieurs armes et munitions militaires en leur possession».

Le commandement de l'armée a déclaré que les détenus faisaient l'objet d'une enquête sous la supervision du pouvoir judiciaire.

Les médias ont rapporté que les deux hommes étaient des membres de l'appareil de sécurité du mouvement Hamas à Sidon.

Aucune agence de sécurité officielle n'a confirmé l'existence d'un lien entre les arrestations et la cellule jordanienne.

Mardi, l'agence de presse jordanienne a cité des responsables des services de renseignement qui ont déclaré qu'«une série de complots visant la sécurité nationale du pays ont été déjoués et 16 personnes soupçonnées de préparer des actes de chaos et de sabotage ont été arrêtées».

Les plans prévoyaient la production de missiles à l'aide de matériaux locaux et de composants importés. Des explosifs et des armes à feu ont été découverts, ainsi qu'un missile dissimulé prêt à être utilisé.

Les 16 suspects sont soupçonnés d'avoir participé à la mise au point de drones, d'avoir recruté et formé des individus au niveau national et d'en avoir envoyé d'autres à l'étranger pour qu'ils y poursuivent leur formation.

Selon les déclarations des suspects, deux membres de la cellule – Abdallah Hicham et Muath al-Ghanem – ont été envoyés au Liban pour coordonner leurs activités avec une figure importante de l'organisation et recevoir une formation.

En décembre, l'armée libanaise a lancé un processus de désarmement des factions palestiniennes situées à l'extérieur des camps de réfugiés palestiniens. Ces factions, fidèles à l'ancien régime syrien, étaient principalement basées dans la région de la Békaa, le long de la frontière avec la Syrie, et dans la région méridionale.

Le Premier ministre Nawaf Salam a exprimé «l'entière solidarité du Liban avec la Jordanie dans la lutte contre les complots qui menacent sa sécurité et sa stabilité» et sa «volonté de coopérer avec les autorités jordaniennes en cas de besoin concernant les informations selon lesquelles certaines personnes impliquées dans ces complots ont reçu une formation au Liban», selon son bureau de presse.

Lors du lancement du projet de réhabilitation de la route de l'aéroport de Beyrouth, M. Salam a déclaré que les questions de sécurité sur la route de l'aéroport étaient «en cours d'examen avec le ministre de la Défense Michel Menassa et le ministre de l'Intérieur Ahmed Hajjar».

Au cours des dernières 48 heures, la municipalité de Beyrouth a entrepris des efforts pour retirer des rues de la capitale les drapeaux des partis et les images des politiciens et des chefs de partis, en particulier ceux qui sont associés au Hezbollah.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com