Quid du point de vue de l'Arabie saoudite sur le processus politique au Liban?

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Publié le Lundi 03 février 2025

Quid du point de vue de l'Arabie saoudite sur le processus politique au Liban?

Quid du point de vue de l'Arabie saoudite sur le processus politique au Liban?
  • Le ministre saoudien des Affaires étrangères a révélé que «le prince héritier Mohammed ben Salmane est ouvert aux propositions qui mèneront le Liban vers un avenir prospère»
  • Les dirigeants saoudiens attendent avec impatience une prochaine réunion avec le président Aoun pour poser les fondements d'une coopération bilatérale

Lorsque Joseph Aoun, alors commandant de l'armée libanaise, s'est rendu en Arabie saoudite en décembre dernier et a été reçu par le ministre de la Défense, le prince Khalid ben Salmane, il ne s'agissait pas d'une visite ordinaire. C'était une indication que Riyad avait activement repris un rôle positif concernant la sécurité et la stabilité du Liban, surtout après la guerre israélienne dévastatrice contre Gaza et le Liban. Forte de ses capacités politiques et économiques, l'Arabie saoudite a déployé des efforts diplomatiques pour mettre fin à la guerre et soutenir les pays arabes touchés.

Plus tard, avant l'élection de M. Aoun à la présidence du Liban en janvier, la présence saoudienne sur la scène politique libanaise a été significative. Le nom du prince Yazid ben Mohammed ben Fahd al-Farhane, conseiller du ministre saoudien des Affaires étrangères pour les affaires libanaises, est apparu. Pendant ce temps, tous les regards étaient tournés vers l'ambassadeur du Royaume à Beyrouth, Walid Bukhari, lors de sa participation à la session parlementaire au cours de laquelle M. Aoun a été élu président.

Riyad comprend qu'il existe un vide politique au Liban et en République arabe syrienne, d'autant plus que ce que l'on appelle l'axe de la résistance a vu son influence diminuer à la suite de l'effondrement du régime de Bachar el-Assad et des lourdes pertes subies par le Hamas à Gaza et le Hezbollah au Liban. Si aucune force forte et active ne s'efforce d'organiser et de combler ce vide par un engagement politique efficace, cela aura un impact négatif sur la sécurité et la stabilité du Moyen-Orient. Cela pourrait conduire au chaos, à la propagation de milices armées et à la poursuite des massacres, de l'occupation et de l'expansion territoriale d'Israël dans les pays environnants, par le biais de politiques de facto.

C'est dans ce contexte que le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Faisal ben Farhane, s'est rendu dans la capitale libanaise le 23 janvier. Il a rencontré le président Aoun, le président du Parlement Nabih Berri, le Premier ministre sortant Najib Mikati et le Premier ministre désigné Nawaf Salam. En rencontrant toutes les figures clés de l'État libanais, le prince Faisal a indiqué que l'Arabie saoudite se tient à égale distance de toutes les composantes et soutient le partenariat national fondé sur la Constitution libanaise et l'accord de Taëf.

Dans une brève déclaration, le prince Faisal a délibérément transmis des messages positifs mais mesurés. Il a souligné l'engagement des dirigeants saoudiens à faire du Liban un phare dans la région et un modèle de coexistence et de prospérité. Il a salué le leadership du président Aoun et son discours d'investiture, qui a tracé la voie à suivre. Il a souligné que «le Royaume se tiendra aux côtés du Liban et suivra pas à pas sa nouvelle voie, en travaillant avec ses partenaires dans cette direction».

S'il est correctement exploité, ce soutien de Riyad pourrait servir de prélude à un soutien arabe plus large.

-Hassan al-Mustafa

Le ministre saoudien des Affaires étrangères a révélé que «le prince héritier Mohammed ben Salmane est ouvert aux propositions qui mèneront le Liban vers un avenir prospère», ajoutant que les dirigeants saoudiens attendent avec impatience une prochaine réunion avec le président Aoun pour poser les fondements d'une coopération bilatérale. Il a déclaré: «Malgré les défis communs auxquels nous sommes confrontés dans la région, le Royaume est optimiste quant à l'avenir du Liban à la lumière de l'approche réformiste décrite dans le discours d'investiture du président. La mise en œuvre de ces réformes renforcera la crédibilité du Liban auprès de ses partenaires et ouvrira la voie au rétablissement de sa place légitime dans les sphères arabe et internationale.»

Les thèmes clés des propos du prince Faisal étaient les «réformes» et le «discours d'investiture». L'Arabie saoudite tient à ce qu'il y ait un véritable changement au Liban – sur les plans politique, économique et sécuritaire – grâce à des programmes sérieux et réalisables qui revitalisent l'économie, développent les institutions de l'État et préviennent les troubles de la sécurité ou les confrontations politiques, tant à l'intérieur du pays qu'avec les pays arabes.

Après 15 ans d'absence, la visite saoudienne représente une opportunité à saisir pour le Liban. S'il est correctement exploité, ce soutien de Riyad pourrait servir de prélude à un soutien arabe plus large. Par conséquent, les politiques du gouvernement qui sera bientôt formé et la coopération des partis et des dirigeants libanais avec lui détermineront l'ampleur du soutien arabe à Beyrouth.

Plusieurs questions urgentes doivent être abordées, telles que la consolidation de l'accord de cessez-le-feu et l'arrêt des violations israéliennes, le retour des personnes déplacées et la reconstruction. S'il s'agit de priorités, elles dépendent de la manière dont les hommes politiques libanais abordent les problèmes internes du pays afin d'instaurer une véritable stabilité qui favorise la croissance économique – sans corruption financière ni quotas sectaires.

Favoriser le dialogue interne au Liban, établir une feuille de route claire pour le déploiement de l'armée à l'échelle nationale, garantir le contrôle exclusif de l'État sur les armes, mettre fin au trafic de drogue et empêcher le Liban de devenir une plaque tournante pour les groupes et la rhétorique incitant à la violence contre les États du Golfe sont autant de questions cruciales. En outre, le positionnement futur du Hezbollah – qu'il reste aligné sur les axes régionaux comme auparavant ou qu'il s'intègre dans le processus politique interne du Liban, tout en cessant de bénéficier d'un soutien et d'un entraînement extérieurs – reste une question clé.

Le règlement de ces questions de sécurité et de politique contribuera à instaurer la confiance et à envoyer un message clair indiquant qu'un changement réel est en cours, justifiant le soutien de Riyad et d'autres capitales régionales influentes.

Hassan Al-Mustafa est un écrivain et chercheur saoudien qui s'intéresse aux mouvements islamiques, à l'évolution du discours religieux et aux relations entre les États du Conseil de coopération du Golfe et l'Iran.

X: @Halmustafa

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com