"Beaucoup de preuves" des crimes d'Assad en Syrie (enquêteurs ONU)

Un homme passe à vélo devant la tour de l'horloge de la ville de Hama, au centre de la Syrie, le 27 janvier 2025. (AFP)
Un homme passe à vélo devant la tour de l'horloge de la ville de Hama, au centre de la Syrie, le 27 janvier 2025. (AFP)
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Publié le Samedi 01 février 2025

"Beaucoup de preuves" des crimes d'Assad en Syrie (enquêteurs ONU)

  • En dépit de la destruction de documents et d'autres indices sur les crimes commis en Syrie sous le régime de Bachar al-Assad, les enquêteurs de l'ONU ont souligné vendredi que "beaucoup de preuves" restaient intactes
  • La chute soudaine du président Bachar al-Assad le mois dernier après des décennies de dictature a permis à la commission d'obtenir un accès au pays, alors qu'elle s'efforçait depuis le début de la guerre civile en 2011 d'enquêter à distance sur ces crimes

Genève, Suisse: En dépit de la destruction de documents et d'autres indices sur les crimes commis en Syrie sous le régime de Bachar al-Assad, les enquêteurs de l'ONU ont souligné vendredi que "beaucoup de preuves" restaient intactes.

"On a trouvé dans le pays beaucoup de preuves, et nous n'éprouverons pas de très grande difficulté à obtenir que soit rendue justice", a dit Hanny Megally, membre de la Commission d'enquête de l'ONU sur la Syrie.

La chute soudaine du président Bachar al-Assad le mois dernier après des décennies de dictature a permis à la commission d'obtenir un accès au pays, alors qu'elle s'efforçait depuis le début de la guerre civile en 2011 d'enquêter à distance sur ces crimes.

"Cela a été fascinant d'être à Damas, alors que la Commission était restée depuis le début privée d'accès au pays", a ajouté M. Megally devant l'association des correspondants accrédités Acanu, après une récente visite en Syrie.

Décrivant ses visites de prisons à Damas, il a reconnu que "beaucoup de preuves" ont été "abîmées ou détruites" depuis que la population s'est ruée vers les prisons et centres de détention après la chute de Bachar al-Assad.

La célèbre prison de Saydnaya, lieu d'exécutions extrajudiciaires et de tortures qui symbolise les atrocités commises contre les opposants au régime, "est pratiquement vidée de tous documents", a encore déclaré le membre de la Commission d'enquête.

M. Megally a souligné qu'il y avait des signes évidents de "destruction délibérée des preuves", probablement par des proches d'Assad avant leur fuite, citant notamment deux lieux où avaient manifestement été brûlés des documents.

Mais il a estimé que l'Etat syrien sous Assad était un "système qui gardait probablement des doubles de tout, ce qui fait que si des preuves ont été détruites, elles existent à un autre endroit".

D'autres bâtiments recèlent de nombreuses preuves, a-t-il ajouté.

"Il semble qu'il y ait beaucoup de preuves qui sont maintenant à l'abri, et qui pourront, nous l'espérons, être utilisées à l'avenir" pour que justice soit rendue, a-t-il conclu.

Sa collègue Lynn Welchman a estimé que les nouvelles autorités syriennes semblaient "chercher à garantir la préservation des preuves pour l'avenir".

"L'une des choses les plus importantes pour l'avenir sera de garantir que ce qui s'est passé en Syrie ne s'y reproduise plus jamais", a-t-elle jugé. "Il y a beaucoup de travail à faire pour essayer d'en savoir plus sur ce qui s'est passé, afin que toutes les composantes de la société syrienne puissent aller de l'avant."


Les talibans prennent les rênes de l'hôtel de luxe Serena à Kaboul

Un Afghan se tient devant la porte d'entrée de l'hôtel Kabul Serena à Kaboul, le 1er février 2025. (Photo par Ahmad SAHEL ARMAN / AFP)
Un Afghan se tient devant la porte d'entrée de l'hôtel Kabul Serena à Kaboul, le 1er février 2025. (Photo par Ahmad SAHEL ARMAN / AFP)
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  • Les talibans ont pris samedi le contrôle de l'hôtel de luxe Serena, établissement réputé du centre-ville de Kaboul et jusqu'ici détenu par la fondation Aga Khan, a annoncé la chaîne hôtelière.
  • Les activités de l'établissement, ouvert en 2005, « s'arrêtent à compter du 1^(er) février » et sont reprises par la société publique d'hôtellerie », a indiqué vendredi le groupe hôtelier dans un communiqué.

KABOUL : Les talibans ont pris samedi le contrôle de l'hôtel de luxe Serena, établissement réputé du centre-ville de Kaboul et jusqu'ici détenu par la fondation Aga Khan, a annoncé la chaîne hôtelière.

L'hôtel, connu de tous à Kaboul, a été la cible de plusieurs attaques de la part des talibans avant qu'ils ne reprennent le pouvoir en 2021.

Les activités de l'établissement, ouvert en 2005, « s'arrêtent à compter du 1^(er) février » et sont reprises par la société publique d'hôtellerie », a indiqué vendredi le groupe hôtelier dans un communiqué.

L'hôtel, décrit comme « emblématique » de la capitale afghane, n'apparaît plus dans les destinations proposées par la chaîne hôtelière sur son site.

Contactées par l'AFP, les autorités talibanes n'ont pas souhaité s'exprimer pour l'instant.

La fondation Aga Khan, basée en Suisse, n'a pas répondu aux sollicitations de l'AFP.

Après le retour au pouvoir des talibans en août 2021, les États-Unis et le Royaume-Uni avaient demandé à leurs ressortissants d'éviter les hôtels de luxe de Kaboul, notamment le Serena, arguant d'une menace sécuritaire.

Un attentat suicide y avait eu lieu en janvier 2008, alors que le ministre norvégien des Affaires étrangères se trouvait à l'intérieur, faisant six morts, dont un Américain et un journaliste norvégien.

L'actuel ministre taliban de l'Intérieur, Sirajuddin Haqqani, est accusé d'être derrière cette attaque.

L'établissement a de nouveau été attaqué en mars 2014 par un commando armé taliban qui a abattu neuf personnes, dont un journaliste de l'AFP et sa famille.

Il restait un lieu incontournable pour les visiteurs étrangers et les diplomates de passage.

« Endroit accueillant pour les visiteurs d'État, les diplomates, les responsables gouvernementaux, les hommes d'affaires, les familles et les voyageurs du monde entier, l'hôtel a en outre joué un rôle vital pour développer les opportunités économiques des communautés et entreprises locales », a estimé la chaîne hôtelière Serena dans son communiqué.

« Il a également été pionnier en donnant des emplois de responsabilité aux femmes », a-t-elle ajouté.


Le Canada et le Mexique, premières victimes des droits de douane de Trump

Drapeaux du Canada, des Etats-Unis et du Mexique (Photo Getty Images)
Drapeaux du Canada, des Etats-Unis et du Mexique (Photo Getty Images)
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  • Le président américain devrait signer dans la journée un décret ouvrant la voie à l'imposition de 25 % de droits de douane sur les produits canadiens et mexicains, et de 10 % sur les produits en provenance de Chine.
  • Il a insisté sur le fait qu'« rien » ne viendrait empêcher leur application.

WASHINGTON : Le Canada, le Mexique et, dans une moindre mesure, la Chine deviendront samedi les toutes premières victimes de l'arme des droits de douane brandie par Donald Trump, qui espère ainsi imposer sa volonté à ses partenaires commerciaux.

Le président américain devrait signer dans la journée un décret ouvrant la voie à l'imposition de 25 % de droits de douane sur les produits canadiens et mexicains, et de 10 % sur les produits en provenance de Chine, au-delà de ceux déjà existants, et qui pourraient commencer à s'appliquer dès le 18 février, a-t-il déclaré vendredi devant des journalistes.

Il a insisté sur le fait qu'« rien » ne viendrait empêcher leur application.

Restent quelques détails à préciser : la mesure concernera-t-elle l'ensemble des produits en provenance de ces trois pays ou ciblera-t-elle certaines catégories particulières ?

Vendredi, M. Trump a cité plusieurs produits, des semi-conducteurs à l'acier en passant par le gaz et le pétrole, comme étant concernés par les futurs droits de douane, sans pour autant préciser si la liste était exhaustive.

« Je vais sans doute baisser les droits de douane sur le pétrole canadien, essentiel pour l'industrie pétrolière américaine, a toutefois ajouté le président : nous pensons les limiter à 10 %. »

Donald Trump a justifié ces mesures en accusant les trois pays de jouer un rôle dans la crise du fentanyl, un puissant opioïde qui fait des ravages aux États-Unis depuis plusieurs années.

Selon lui, la Chine exporte vers le Mexique des principes actifs qui permettent ensuite aux cartels mexicains de fabriquer du fentanyl, puis de le faire passer via la frontière.

- « Recul du PIB américain » -

Le Premier ministre canadien démissionnaire Justin Trudeau a répondu que son pays était « prêt à une réponse immédiate ».

De son côté, la présidente mexicaine Claudia Sheinbaum a assuré avoir « avancé sur différents sujets » avec l'administration Trump et que « des accords sont trouvés tous les jours ». Cependant, faute d'accord sur les droits de douane, « nous avons un plan A, B et C », a-t-elle assuré sans apporter de détails.

Pour les deux pays voisins des États-Unis, des droits de douane touchant l'ensemble de leurs exportations pourraient avoir un effet particulièrement violent sur l'économie.

Pour un pays comme le Mexique, pour qui les États-Unis représentent près de 85 % de ses exportations, selon l'Institut national de la statistique (INEGI), le choc pourrait être particulièrement rude, avec un recul de 3,6 % de son PIB, estime Wendong Zhang, professeur à l'université Cornell.

Mais l'économie américaine elle-même serait touchée, à un moment où elle tourne à plein régime, portée par la consommation, avec une croissance de 2,8 % de son PIB enregistrée en 2024.

Selon Gregory Daco, chef économiste pour le cabinet EY, les droits de douane prévus pourraient « entraîner un recul de 1,5 % du PIB américain en 2025 et 2,1 % en 2026 par rapport à nos prévisions initiales, en raison d'un ralentissement de la consommation et des investissements », sans même parler des effets de potentielles représailles.

Et l'UE dans tout ça ? « Absolument. »

Ils pourraient également entraîner une hausse de 0,7 point de pourcentage de l'inflation au premier trimestre de l'année, à un moment où cette dernière est en phase de réaccélération, avant de voir les effets s'atténuer.

D'autant que les États-Unis importent principalement de ces deux pays voisins une longue série de produits agricoles, des avocats aux tomates en passant par les œufs ou la volaille, dont les prix sont déjà en hausse.

L'impact pourrait également se faire sentir sur le secteur automobile, alors que le Canada et le Mexique représentent 22 % des véhicules vendus dans le pays, selon S&P Global Mobility.

Plus encore, des droits de douane sur le pétrole canadien et mexicain pourraient « avoir de gigantesques implications sur l'ensemble du Midwest », dont les installations de raffinage ont été optimisées pour le pétrole de ces deux pays et non celui produit aux États-Unis, aux caractéristiques différentes, estime le centre de réflexion Atlantic Council dans une note.

Une hausse des droits de douane sur le pétrole canadien « entraînerait une hausse des prix de l'énergie dans le Midwest », soulignent-ils.

Et cela ne pourrait être que le début, car Donald Trump prépare déjà la phase suivante de sa guerre commerciale : « Est-ce que je vais imposer des droits de douane à l'Union européenne ? Voulez-vous la vraie réponse ou la réponse diplomatique ? « Absolument. L'UE nous a très mal traités. »


RDC: le M23 progresse dans l'est, "soutien indéfectible" de la SADC à Kinshasa

Des soldats guatémaltèques de la Mission de stabilisation de l'Organisation des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUSCO) montent dans un pick-up alors que les habitants commencent à s'aventurer dans les rues de Goma, le 31 janvier 2025. (AFP)
Des soldats guatémaltèques de la Mission de stabilisation de l'Organisation des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUSCO) montent dans un pick-up alors que les habitants commencent à s'aventurer dans les rues de Goma, le 31 janvier 2025. (AFP)
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  • Après avoir conquis Goma dans l'est de la RDC, le groupe armé antigouvernemental M23 et l'armée rwandaise progressent dans la province voisine du Sud-Kivu
  • Le président français Emmanuel Macron s'est entretenu avec ses homologues angolais, ougandais et burundais pour tenter d'arrêter les hostilités, a dit la présidence française vendredi

Goma, RD Congo: Après avoir conquis Goma dans l'est de la RDC, le groupe armé antigouvernemental M23 et l'armée rwandaise progressent dans la province voisine du Sud-Kivu, alors que les dirigeants des pays d'Afrique australe (SADC), réunis vendredi en sommet, ont exprimé leur "soutien indéfectible" à Kinshasa.

Dans ce conflit qui dure depuis plus de trois ans, la République démocratique du Congo (RDC) accuse le Rwanda de vouloir piller ses nombreuses richesses naturelles dans la région. Le Rwanda affirme, lui, vouloir éradiquer des groupes armés, notamment créés par d'ex-responsables hutu du génocide des Tutsi au Rwanda en 1994, qui menacent selon lui sa sécurité.

De manière plus générale, l'est de la RDC est déchiré depuis des décennies par les violences de multiples groupes armés, exacerbées après le génocide au Rwanda.

A l'issue d'un sommet extraordinaire de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC) à Harare, au Zimbabwbe, les dirigeants des États membres ont affirmé leur "engagement indéfectible à continuer de soutenir la RDC dans sa quête de sauvegarde de son indépendance, de sa souveraineté et de son intégrité territoriale".

La SADC, qui a réclamé un sommet conjoint avec la Communauté de l'Afrique de l'Est (EAC) pour régler la situation sécuritaire, a une force de maintien de la paix déployée dans l'est de la RDC (SAMIDRC), tout comme l'ONU (Monusco).

- Armée ougandaise -

Goma, capitale de la province du Nord-Kivu coincée entre le lac Kivu et la frontière rwandaise, est tombée ces derniers jours au terme d'une offensive éclair, lancée après l'échec mi-décembre d'une tentative angolaise de médiation entre la RDC et le Rwanda.

Selon l'ONU, au moins 700 personnes ont été tuées et 2.800 blessées lors des combats pour le contrôle de la ville entre dimanche et jeudi.

Vendredi, quelques dizaines d'habitants de Goma, sous la garde étroite de combattants armés du M23 qui avaient invité la presse, ont brandi dans les rues des banderoles affirmant "Nous sommes fatigués avec Tshisekedi", en référence au président congolais Félix Tshisekedi.

Depuis la chute de la grande cité, le M23 et les troupes rwandaises ont progressé dans la province voisine du Sud-Kivu vers Kavumu.

Cette localité abrite un aéroport militaire stratégique et l'armée congolaise y a établi sa principale ligne de défense, à 40 km au nord de la ville de Bukavu et son million d'habitants, selon des sources locales.

Parallèlement, sur fond de craintes d'un embrasement régional, l'armée ougandaise a annoncé vendredi qu'elle allait "renforcer ses défenses" dans l'est de la RDC, où elle aussi est présente.

Objectif: "dissuader" et "empêcher les nombreux autres groupes armés" opérant dans la région "d'exploiter la situation, et protéger et sécuriser les intérêts de l'Ouganda".

- "Prêt à mourir" -

Répondant à l'appel pressant des autorités congolaises, plusieurs centaines de volontaires prêts à aller combattre au côté de l'armée congolaise sont venus s'enregistrer vendredi dans le stade de Bukavu, chef-lieu du Sud-Kivu, a constaté un journaliste de l'AFP.

"Je suis prêt à mourir pour mon pays", a assuré l'un deux, Juvenal Bahati Muhigirwa Ndagano, avant de rejoindre un bataillon désordonné de futurs miliciens en tenues dépenaillées.

Dans la capitale, Kinshasa, des dizaines de personnes ont fait don de leur sang à l'appel du ministère de la Santé, pour les militaires et civils blessés dans la région de Goma, où des combats sporadiques se poursuivent dans la périphérie nord.

L'ONU a exprimé son inquiétude face aux violences généralisées perpétrées par chaque camp, citant des exécutions sommaires et des cas de violences sexuelles.

Les combats ont par ailleurs aggravé une crise humanitaire chronique dans une région où, selon l'ONU, plus de 500.000 personnes ont été déplacées depuis début janvier.

L'offensive sur Goma a suscité de nombreux appels internationaux à la fin des combats et au retrait des troupes rwandaises.

Le président français Emmanuel Macron s'est entretenu avec ses homologues angolais, ougandais et burundais pour tenter d'arrêter les hostilités, a dit la présidence française vendredi.

La Belgique a demandé à l'Union européenne d'envisager des sanctions contre le Rwanda.

M. Tshisekedi a, lui, condamné "le silence" et "l'inaction" de la communauté internationale face à "la barbarie du régime de Kigali", mettant en garde contre "une escalade aux conséquences imprévisibles" dans la région des Grands Lacs.