Goma, RD Congo: Après avoir conquis Goma dans l'est de la RDC, le groupe armé antigouvernemental M23 et l'armée rwandaise progressent dans la province voisine du Sud-Kivu, alors que les dirigeants des pays d'Afrique australe (SADC), réunis vendredi en sommet, ont exprimé leur "soutien indéfectible" à Kinshasa.
Dans ce conflit qui dure depuis plus de trois ans, la République démocratique du Congo (RDC) accuse le Rwanda de vouloir piller ses nombreuses richesses naturelles dans la région. Le Rwanda affirme, lui, vouloir éradiquer des groupes armés, notamment créés par d'ex-responsables hutu du génocide des Tutsi au Rwanda en 1994, qui menacent selon lui sa sécurité.
De manière plus générale, l'est de la RDC est déchiré depuis des décennies par les violences de multiples groupes armés, exacerbées après le génocide au Rwanda.
A l'issue d'un sommet extraordinaire de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC) à Harare, au Zimbabwbe, les dirigeants des États membres ont affirmé leur "engagement indéfectible à continuer de soutenir la RDC dans sa quête de sauvegarde de son indépendance, de sa souveraineté et de son intégrité territoriale".
La SADC, qui a réclamé un sommet conjoint avec la Communauté de l'Afrique de l'Est (EAC) pour régler la situation sécuritaire, a une force de maintien de la paix déployée dans l'est de la RDC (SAMIDRC), tout comme l'ONU (Monusco).
- Armée ougandaise -
Goma, capitale de la province du Nord-Kivu coincée entre le lac Kivu et la frontière rwandaise, est tombée ces derniers jours au terme d'une offensive éclair, lancée après l'échec mi-décembre d'une tentative angolaise de médiation entre la RDC et le Rwanda.
Selon l'ONU, au moins 700 personnes ont été tuées et 2.800 blessées lors des combats pour le contrôle de la ville entre dimanche et jeudi.
Vendredi, quelques dizaines d'habitants de Goma, sous la garde étroite de combattants armés du M23 qui avaient invité la presse, ont brandi dans les rues des banderoles affirmant "Nous sommes fatigués avec Tshisekedi", en référence au président congolais Félix Tshisekedi.
Depuis la chute de la grande cité, le M23 et les troupes rwandaises ont progressé dans la province voisine du Sud-Kivu vers Kavumu.
Cette localité abrite un aéroport militaire stratégique et l'armée congolaise y a établi sa principale ligne de défense, à 40 km au nord de la ville de Bukavu et son million d'habitants, selon des sources locales.
Parallèlement, sur fond de craintes d'un embrasement régional, l'armée ougandaise a annoncé vendredi qu'elle allait "renforcer ses défenses" dans l'est de la RDC, où elle aussi est présente.
Objectif: "dissuader" et "empêcher les nombreux autres groupes armés" opérant dans la région "d'exploiter la situation, et protéger et sécuriser les intérêts de l'Ouganda".
- "Prêt à mourir" -
Répondant à l'appel pressant des autorités congolaises, plusieurs centaines de volontaires prêts à aller combattre au côté de l'armée congolaise sont venus s'enregistrer vendredi dans le stade de Bukavu, chef-lieu du Sud-Kivu, a constaté un journaliste de l'AFP.
"Je suis prêt à mourir pour mon pays", a assuré l'un deux, Juvenal Bahati Muhigirwa Ndagano, avant de rejoindre un bataillon désordonné de futurs miliciens en tenues dépenaillées.
Dans la capitale, Kinshasa, des dizaines de personnes ont fait don de leur sang à l'appel du ministère de la Santé, pour les militaires et civils blessés dans la région de Goma, où des combats sporadiques se poursuivent dans la périphérie nord.
L'ONU a exprimé son inquiétude face aux violences généralisées perpétrées par chaque camp, citant des exécutions sommaires et des cas de violences sexuelles.
Les combats ont par ailleurs aggravé une crise humanitaire chronique dans une région où, selon l'ONU, plus de 500.000 personnes ont été déplacées depuis début janvier.
L'offensive sur Goma a suscité de nombreux appels internationaux à la fin des combats et au retrait des troupes rwandaises.
Le président français Emmanuel Macron s'est entretenu avec ses homologues angolais, ougandais et burundais pour tenter d'arrêter les hostilités, a dit la présidence française vendredi.
La Belgique a demandé à l'Union européenne d'envisager des sanctions contre le Rwanda.
M. Tshisekedi a, lui, condamné "le silence" et "l'inaction" de la communauté internationale face à "la barbarie du régime de Kigali", mettant en garde contre "une escalade aux conséquences imprévisibles" dans la région des Grands Lacs.