Netanyahou et Nasrallah: les deux faces d'une même médaille

En 2000, Israël a mis fin à son occupation du Liban et le rôle du Hezbollah en tant que mouvement de résistance aurait dû s'arrêter là. (AFP)
En 2000, Israël a mis fin à son occupation du Liban et le rôle du Hezbollah en tant que mouvement de résistance aurait dû s'arrêter là. (AFP)
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Publié le Jeudi 26 septembre 2024

Netanyahou et Nasrallah: les deux faces d'une même médaille

Netanyahou et Nasrallah: les deux faces d'une même médaille
  • Pour se protéger et rester au pouvoir, Netanyahou est prêt à faire de son pays un paria
  • Mais, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a lui aussi du sang sur les mains

Les escalades militaires sont toujours inquiétantes, mais comme avons pu le constater depuis le 7 octobre dernier, toutes les règles sont désormais permises au Moyen-Orient. C'est comme un match sans arbitre, où aucun des lutteurs ne semble vouloir s'arrêter, même lorsqu'il entend la cloche.

Cette situation est d'autant plus préoccupante que, comme l'a souligné il y a quelques mois le ministre irlandais du Commerce, Simon Coveney, Israël a choisi de «se comporter comme un monstre pour venir à bout d'un monstre».

En effet, Israël ne se laisse pas décourager par la condamnation mondiale, les protestations ou les menaces de la Cour pénale internationale. Il semble ne pas voir la contradiction entre sa capacité à éliminer certaines de ses cibles avec un maximum de précision et un minimum de dommages collatéraux (comme Ismaïl Haniyeh à Téhéran) et son insistance à mener des frappes aériennes aveugles qui causent un maximum de dégâts – ce qui, comme l'a admis le porte-parole de l'armée Daniel Hagari l'année dernière, était l'objectif à Gaza.

Pour se protéger et rester au pouvoir, Netanyahou est prêt à faire de son pays un paria. Sa coalition de fous d'extrême droite, qui a appelé à bombarder Gaza, n'est pas différente de Daech (ces mots ne sont pas les miens, mais ceux d'un éminent journaliste israélien avec qui j'ai pu discuter en janvier dernier à Davos).

Toutefois, la responsabilité de la mort récente d'au moins 1 300 hommes, femmes et enfants au Liban, dont plus de 620 au cours des trois derniers jours seulement, et de la destruction massive des infrastructures civiles, n'incombe pas uniquement au Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou: le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a lui aussi du sang sur les mains.

Israël a choisi de «se comporter comme un monstre pour venir à bout d'un monstre».

-Faisal J. Abbas

C'est parce qu'il y a une différence: le Liban n'est pas la Palestine. En 2000, Israël a mis fin à son occupation du Liban et le rôle du Hezbollah en tant que mouvement de résistance aurait dû s'arrêter là, sous les applaudissements de toute la région. En revanche, malgré le retrait unilatéral des troupes et des colons israéliens de Gaza en septembre 2005, tous les territoires palestiniens, y compris Gaza, continuent d'être considérés comme occupés en vertu du droit international. Bien entendu, cela ne justifie pas ce qui s'est passé le 7 octobre: toute perte de vie civile est une perte de trop.

Le Liban aurait pu suivre une autre voie et reprendre son titre de «Suisse du Moyen-Orient».  Au lieu de cela, le Hezbollah a refusé, pendant 24 ans, de déposer les armes et de devenir un parti purement politique: une exigence qui a coûté la vie à l'ancien Premier ministre Rafic Hariri. Durant son mandat, Hariri a obtenu un soutien considérable de l'Arabie saoudite, du Golfe et de la communauté internationale en faveur du Liban, mais cela s'est soldé par son assassinat en février 2005 dans un attentat à la bombe perpétré par un agent du Hezbollah.

Depuis lors, coïncidant avec la montée en puissance du Hezbollah soutenu par Téhéran, le Liban n'a cessé de régresser. Le Hezbollah a dominé la politique, s'est emparé de Beyrouth par la force et dicte au pays quand il entre en guerre et quand il n'y entre pas.

Pire encore, le Hezbollah a ruiné les relations du Liban avec les autres pays arabes en exportant de la drogue et en se mêlant de leurs affaires. Il a soutenu le régime Assad en Syrie pendant 13 ans de guerre civile et des commandants du Hezbollah ont aidé la milice houthie au Yémen à lancer des missiles sur l'Arabie saoudite, où vivent et travaillent jusqu'à 300 000 expatriés libanais qui envoient des fonds à leurs familles restées au pays. Le Hezbollah a promis que sa résistance se poursuivrait jusqu'à la libération de Jérusalem: mais la dernière fois que j'ai vérifié, la route de Beyrouth à Jérusalem ne passait ni par Damas ni par Sanaa!

Lors de la guerre d'Israël contre Gaza, le Hezbollah a montré son vrai visage (jaune, ironiquement). Qu'a fait Nasrallah pour empêcher le massacre de plus de 41 000 Palestiniens dans l'enclave? Au lieu de cela, la rhétorique du Hezbollah pointe invariablement du doigt l'axe de la modération, à savoir l'Arabie saoudite, pour avoir «trahi la cause».

En 2000, Israël a mis fin à son occupation du Liban et le rôle du Hezbollah en tant que mouvement de résistance aurait dû s'arrêter là.

-Faisal J. Abbas

Pourtant, en tant qu'éternel partisan de l'adage selon lequel les actes sont plus éloquents que les paroles, je préfère comparer les vaines tergiversations du Hezbollah aux efforts diplomatiques déployés au nom du peuple palestinien par le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Faisal ben Farhane. Ces efforts ont été couronnés par l'obtention par la Palestine d'un siège à l'Assemblée générale des Nations unies et par la reconnaissance par 146 pays d'un État palestinien.

En ce qui concerne le Liban, la principale différence entre l'influence saoudienne et celle du Hezbollah soutenu par l'Iran a été exprimée de la manière la plus éloquente dans une entretien accordé en 2018 par le ministre de la Défense du Royaume, le prince Khaled ben Salmane, qui a déclaré: «Nous envoyons des touristes au Liban, alors que l'Iran envoie des terroristes.»

Faisal J. Abbas est l'auteur du livre «Anecdotes d'un anglophile arabe», publié aux éditions Nomad Publishing.

X: @FaisalJAbbas

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com