PERPIGNAN : Visa pour l'image, principal festival international de photojournalisme, ouvre samedi sa 36e édition à Perpignan, dans le sud de la France, exposant le regard "hétéroclite" de 26 professionnels sur Gaza, l'Ukraine ou Haïti, avec, cette année, une attention particulière portée aux exclus.
"Quand on entend les discours de Trump, d'Orban, de tous ces populistes qui font de l'exclusion une idée forte de leurs programmes, ça nous semble important d'attirer l'attention du public là-dessus", a expliqué à l'AFP Jean-François Leroy, l'historique directeur du festival, qui se tient depuis 1989.
Le festival ne choisit certes pas spécifiquement de thème mais pour l'édition 2024, nombre de travaux exposés ont trait au rejet de l'autre, à la pauvreté, à la marginalité.
La "France périphérique", reportage au long cours de Pierre Faure, explore par exemple le thème de la pauvreté, quand Karen Ballard ou Brenda Ann Kenneally s'interrogent sur le déclin de l'empire américain, en photographiant l'envers du décor de carte postale de "Venice, Californie" ou la misère d'une famille ouvrière dans l'Etat de New York.
- Ecarter et repousser -
L'exclusion, pour les photographes de Visa 2024, ce sont aussi ces murs qui se bâtissent pour écarter ou repousser l'autre: au Mexique, comme le montre Alejandrao Cegarra, ou en Roumanie, avec la ségrégation organisée autour des Roms qu'évoque le photographe et militant des droits de l'Homme Mugur Varzariu.
Un des axes forts de Visa pour l'image, c'est aussi de revenir sur l'actualité du monde à travers l'oeil des photo-reporters.
Jean-François Leroy salue le regard "varié" et "hétéroclite" sur les évènements proposé par les photographes sélectionnés: "Au bout de 36 ans, c'est plus difficile de m'étonner mais je reste toujours agréablement surpris par les propositions qu'on me fait", se réjouit-il.
La vie à quelques kilomètres du front en Ukraine vue par Anastasia Taylor-Lind, le choc de la violence des rues d'Haïti aux mains des gangs dans l'objectif de Corentin Fohlen, ou encore la guerre sans merci menée au narcotrafic en Equateur, photographiée par John Moore, comptent parmi les reportages marquants qui seront exposés.
Et Visa 2024 consacrera également une place à part au Proche-orient, marqué par le conflit Israël-Hamas depuis l'attaque du 7 octobre 2023, avec deux expositions: "la tragédie de Gaza" immortalisée pour le Washington Post par le photographe indépendant Loay Ayyoub, et "Cisjordanie" du Russe Sergueï Ponomarev.
- "boulot formidable" -
Une "grande rétrospective" sous la forme d'une projection complètera ce chapitre pour rendre hommage au "boulot formidable" des photographes de Gaza dans un conflit où l'armée israélienne a "bloqué" les accès à la presse internationale, une "situation qu'on a rarement vue auparavant", a souligné M. Leroy.
Visa s'attardera par ailleurs sur les Jeux olympiques de Paris, en offrant une "carte blanche" aux quelque 70 reporters-photographes de l'AFP mobilisés pour l'évènement sportif mondial.
Outre les 26 expositions, Visa pour l'image proposera gratuitement au public du 31 août au 15 septembre six soirées de projection, des conférences et des débats. Un hommage au monstre sacré du cinéma français Alain Delon, décédé le 18 août à 88 ans, a été ajouté au programme.
Au cours de la semaine dédiée aux professionnels, du 2 au 7, seront également remis huit "Visa d'or" dont le plus prestigieux, le "Visa d'or News", ainsi que quatre bourses et six autres prix pour soutenir financièrement le travail des photojournalistes.