La rivalité de longue date entre l'Iran et Israël a atteint un stade critique avec une escalade de tensions sans précédent. Cette hostilité croissante semble pousser l'Iran à renforcer sa puissance nucléaire, ce qui suscite l'inquiétude de la communauté internationale. L'on craint que le conflit ne débouche sur une escalade rapide des capacités nucléaires, ce qui déstabiliserait davantage une région déjà instable.
Compte tenu de la situation actuelle, tout espoir de relancer le Plan d'action global commun, communément appelé « accord nucléaire », semble de plus en plus improbable. La perspective d'adhérer de nouveau à cet accord s'est amenuisée, principalement en raison du manque de motivation de l'Iran à freiner ses ambitions nucléaires. Le gouvernement iranien semble avoir peu de raisons de retourner à la table des négociations. La dynamique politique interne des États-Unis joue également un rôle crucial, puisque la relance de l'accord se heurte à une forte opposition, ce qui rend son renouvellement improbable. Le parti républicain américain exerce une pression importante et continue de faire preuve d'intransigeance à l'égard de l'Iran en refusant de lever les sanctions.
Les pays du monde entier imposeraient des sanctions encore plus strictes.
Dr Majid Rafizadeh
Du point de vue de certains hommes politiques américains, la relance de l'accord nucléaire, associée à l'assouplissement des sanctions, pourrait fournir au gouvernement iranien les ressources financières dont il a besoin pour renforcer son armée. Une telle évolution permettrait non seulement d'accroître la puissance militaire de l'Iran, mais aussi de renforcer sa position sur la scène internationale, ce qui pourrait conduire à sa réintégration dans le système financier international. Par conséquent, l'afflux potentiel de revenus pourrait modifier de manière significative l'équilibre des forces dans la région, ce qui compliquerait davantage le paysage géopolitique.
Néanmoins, il est essentiel de mettre en évidence un changement récent dans l'évaluation américaine des activités nucléaires de l'Iran. Un rapport du bureau du directeur du renseignement national des États-Unis a tiré la sonnette d'alarme, accusant l'Iran d'être de plus en plus confiant dans ses discussions sur les armes nucléaires. Le rapport souligne une tendance inquiétante : « Il y a eu, cette année, une augmentation notable des déclarations publiques iraniennes sur les armes nucléaires, ce qui suggère que le sujet devient moins tabou », comme l'indique l'évaluation des services de renseignement. Cette évolution est le signe d'une normalisation préoccupante du discours nucléaire en Iran, qui pourrait avoir des répercussions considérables sur la sécurité régionale et mondiale.
Il convient de noter que, pendant des années, le gouvernement iranien répétait incessamment que son programme nucléaire était destiné à des fins pacifiques. Toutefois, des déclarations récentes de responsables iraniens laissent entrevoir un possible changement de politique. Kamal Kharrazi, conseiller principal en politique étrangère du guide suprême Ali Khamenei, a récemment indiqué que l'Iran pourrait revoir sa stratégie nucléaire si Israël lançait une attaque contre ses installations nucléaires. Ce changement de ton est significatif, car il reflète une position plus agressive qui pourrait conduire à des tensions accrues. En outre, le député iranien Ahmad Bakhshayesh Ardestani a publiquement suggéré que l'Iran pourrait déjà posséder une arme nucléaire. Si cette affirmation s'avérait exacte, elle modifierait radicalement les calculs stratégiques dans la région.
Au cours de l'année écoulée, l'intensification du conflit entre l'Iran et Israël a coïncidé avec des progrès considérables au niveau des capacités nucléaires de l'Iran. Le secrétaire d'État américain Antony Blinken a lancé un terrible avertissement, déclarant que l'Iran était sur le point de produire le matériel nécessaire à la fabrication d'une arme nucléaire, peut-être d'ici « une à deux semaines ». Ces progrès rapides mettent en évidence le rythme effréné du programme nucléaire iranien, que certains attribuent au retrait des États-Unis du Plan d'action global commun sous l'administration Trump. L'administration actuelle considère ce retrait comme un facteur clé de l'évolution alarmante des activités nucléaires de l'Iran, ce qui souligne la complexité de la situation.
Les armes nucléaires feraient de l'Iran une cible privilégiée pour les frappes préventives.
Dr Majid Rafizadeh
En outre, les niveaux actuels d'enrichissement de l'uranium par l'Iran auraient atteint 84 %, ce qui se rapproche dangereusement du seuil de 90 % requis pour obtenir des matières de qualité militaire. Cette proximité avec l'uranium de qualité militaire pourrait suggérer que l'Iran pourrait bientôt posséder les composants essentiels à la fabrication de bombes nucléaires. Une telle évolution représenterait une escalade significative de la menace nucléaire posée par l'Iran, avec des conséquences potentiellement catastrophiques pour la sécurité régionale et mondiale.
Le gouvernement iranien devrait prêter une attention particulière aux répercussions de l'acquisition d'armes nucléaires, car les coûts dépassent largement les avantages.
Tout d'abord, l'acquisition d'armes nucléaires conduirait probablement à un grave isolement sur le plan international. Les pays du monde entier, en particulier les pays occidentaux, imposeraient des sanctions encore plus strictes, ce qui paralyserait l'économie iranienne déjà mise à mal. La perte potentielle de liens diplomatiques et économiques pourrait être dévastatrice, rendant l'Iran vulnérable sur plusieurs fronts.
Deuxièmement, l'acquisition d'armes nucléaires déclencherait presque certainement une course régionale aux armements. D'autres nations du Moyen-Orient, se sentant menacées par les capacités nucléaires de l'Iran, chercheraient probablement à développer leurs propres arsenaux nucléaires. Il en résulterait une instabilité accrue et le risque d'une confrontation nucléaire, qui pourrait avoir des conséquences catastrophiques pour l'ensemble de la région.
Troisièmement, le fait que l'Iran cherche à se doter d'armes nucléaires pourrait compromettre sa sécurité à long terme. Si les armes nucléaires peuvent avoir un effet dissuasif à court terme, elles feraient également de l'Iran une cible privilégiée pour les frappes préventives de ses adversaires. Le risque d'un conflit militaire dévastateur augmenterait, mettant en péril la sécurité et la souveraineté de l'Iran.
En conclusion, face à l'escalade des tensions entre l'Iran et Israël et à la diminution des chances de relancer l'accord nucléaire, les progrès rapides au niveau du programme nucléaire iranien présentent des risques importants. Dans l'intérêt de la stabilité régionale et pour éviter une course aux armements nucléaires, il est impératif que l'Iran s'abstienne de poursuivre ses ambitions nucléaires. Un engagement en faveur de la non-prolifération permettrait non seulement d'apaiser les inquiétudes de la communauté internationale, mais contribuerait également à promouvoir la sécurité et la paix dans la région.
Le Dr Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain diplômé de Harvard. X : @Dr_Rafizadeh
NDLR : L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com