Les Afghanes doivent-elles obtenir le statut de réfugié en France en raison de leur genre ? Une décision positive de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), attendue jeudi, aurait une portée symbolique forte en facilitant leur protection.
"A ce jour, aucun groupe social des femmes n'est reconnu, ce serait une première", indique-t-on à la CNDA.
En France, le droit d’asile repose en premier lieu sur la Convention de Genève de 1951 relative au statut des réfugiés. L'article 1 de cette convention internationale, adoptée dans l'après-guerre, dispose que "le terme +réfugié+ s'appliquera à toute personne (...) craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques".
Il revient aux juges de définir ce qui relève d'un "groupe social", moins défini que la religion ou les opinions politiques.
La CNDA reconnaît déjà l'existence d'un "groupe social" dans le cas des homosexuels dans certains pays (Mali, Tunisie, Egypte...), des femmes voulant se soustraire à un mariage forcé (Mali, Mauritanie, Guinée, Burkina Faso...) ou encore des femmes risquant l'excision (Egypte, Cameroun…).
Concernant la question des femmes, les juges de la CNDA ont examiné le 14 juin trois affaires distinctes, concernant une Afghane évoquant la perte de droits depuis l'arrivée au pouvoir des talibans en 2021, une Albanaise redoutant des violences domestiques et une Mexicaine des violences sexuelles.
Cette instance, qui statue sur les recours introduits par les étrangers déboutés en première instance par l'Ofpra (Office français de protection des réfugiés et apatrides) de leur demande d'asile en France, va se prononcer sur ces trois dossiers en particulier. Mais la question pourra ultérieurement être posée pour d'autres pays, indique-t-elle.
"Cela va uniformiser la jurisprudence pour les années à venir, car les décisions de la Cour en grande formation s'imposent à toutes les formations de jugement et à l'Ofpra", explique-t-on à la CNDA.
La jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne a ouvert la voie en janvier à une telle décision.
"Les femmes, dans leur ensemble, peuvent être regardées comme appartenant à un groupe social" et prétendre ainsi à la qualité de réfugiée si "dans leur pays d'origine elles sont exposées, en raison de leur sexe, à des violences physiques ou mentales, y compris des violences sexuelles et domestiques", selon l'arrêt de la CJUE.
L'Afghanistan est le premier pays d'origine des demandeurs d'asile en France depuis cinq ans : 17.103 premières demandes d'asile ont été déposées en 2022, soit 15% du total, selon l'Ofpra.