LYON: Sept membres présumés de l'ultradroite lyonnaise ont été mis en examen pour "association de malfaiteurs" et deux d'entre eux écroués vendredi, près de trois mois après une attaque contre un local associatif du Vieux Lyon où se déroulait une conférence sur Gaza.
Les sept hommes avaient été interpellés mardi matin à la demande des juges d'instruction par des agents de la police judiciaire, secondés par la sous-direction antiterroriste (SDAT), en compagnie d'un huitième suspect, qui a été remis en liberté mercredi.
Présentés jeudi et vendredi aux juges d'instruction, ils ont été mis en examen pour "association de malfaiteurs", un chef passible de cinq à dix ans de prison, mais aussi pour "participation à un groupement formé en vue de la préparation de violences ou de dégradations", a indiqué le parquet dans un court communiqué.
Trois d'entre eux sont également poursuivis pour "port d'armes", selon cette source.
Cinq ont été remis en liberté sous contrôle judiciaire et deux écroués après une audience devant un juge des libertés et de la détention, à laquelle a assisté l'AFP.
Ces deux hommes, âgés d'une vingtaine d'années, sont des figures connues de l'ultradroite lyonnaise et ont milité au sein du groupe nationaliste Bastion social avant sa dissolution en 2019.
L'un d'eux, Eliot Bertin, avait ensuite fondé un nouveau groupe baptisé Lyon Populaire. Repéré par l'ultragauche dans plusieurs actions coups de poing ces dernières années, il légitimait l'usage de la violence par un droit à l'autodéfense dans une interview accordée à Radio France en novembre.
L'autre, Tristan Conchon, avait été condamné à six mois de prison avec sursis en octobre 2022 pour des violences sur des militants d'ultragauche.
A l'audience, le parquet a requis leur maintien en détention, mettant en avant le risque de "concertation" entre individus qui revendiquent la même "idéologie".
Trois blessés graves
Tous se voient reprocher d'avoir participé, le 11 novembre, à des actes d'intimidation et de violences sur un local, où se tenait une conférence organisée par le collectif Palestine 69.
En soirée, alors qu'un chirurgien connu pour ses missions à Gaza présentait son travail devant une centaine d'auditeurs, des dizaines de personnes vêtues de noir, visages en partie masqués, avaient tenté de forcer l'entrée à coups de mortiers d'artifice et de barres de fer.
L'attaque avait fait sept blessés, dont trois graves.
Un homme proche "de la mouvance ultradroite", selon le procureur, avait été interpellé le soir même, en possession d'une batte de baseball, d'un poing américain et d'un protège-dents. Il avait été immédiatement mis en examen dans le cadre d'une information judiciaire ouverte notamment pour violences aggravées et dégradations en réunion.
L'exploitation de données dans son téléphone, des images de vidéosurveillance et de bornages téléphoniques a permis aux enquêteurs d'identifier d'autres participants.
L'attaque avait été revendiquée sur une boucle Telegram par le "Guignol Squad", groupe informel d'ultradroite coutumier des actions violentes à Lyon.
Bar et salle de sport
La mouvance identitaire française regrouperait près de 3 300 personnes dont 1 300 fichés S, selon un récent rapport parlementaire.
Au delà de ses discours virulents, elle représente une menace concrète: douze projets d'action violente par l'ultradroite ont été recensés par le Parquet national antiterroriste (Pnat) depuis 2017, avait indiqué le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin en novembre.
Elle a essaimé sur l'ensemble du territoire mais Lyon, un de ses fiefs historiques, est régulièrement le théâtre de manifestations interdites ou de violences.
La mouvance, qui dispose d'un bar, La Traboule, et d'une salle de sports de combat, l'Agogé, dans le Vieux Lyon, y compte quelques centaines de militants, selon une source policière.
Ils se divisent principalement entre le groupuscule identitaire Les Remparts, né après la dissolution de Génération identitaire en 2021, et Lyon populaire.
Les élus locaux, dont le maire écologiste Grégory Doucet, réclament fréquemment leur dissolution et la fermeture de leurs locaux.
En attendant, elle a perdu plusieurs de ses leaders cette semaine: outre Eliot Bertin et Tristan Conchon, l'ancien porte-parole des Remparts Sishina Milinov a été condamné mardi à six mois de prison ferme pour une agression à caractère raciste commise la semaine dernière à la sortie d'un bar.