L'ONU envisage un rôle plus important pour l'économie créative dans la promotion du développement durable

En perturbant la vie culturelle, la pandémie de coronavirus a mis en lumière la volatilité chronique des industries créatives. De nombreux artistes avaient déjà du mal à joindre les deux bouts. (Photo Fournie).
En perturbant la vie culturelle, la pandémie de coronavirus a mis en lumière la volatilité chronique des industries créatives. De nombreux artistes avaient déjà du mal à joindre les deux bouts. (Photo Fournie).
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Publié le Dimanche 03 janvier 2021

L'ONU envisage un rôle plus important pour l'économie créative dans la promotion du développement durable

  • L'ONU a désigné 2021 « Année internationale de l'économie créative pour le développement durable »
  • En perturbant la vie culturelle, la pandémie a mis en lumière à la fois la valeur et la volatilité chronique du secteur

NEW YORK CITY: La Covid-19 a plongé les théâtres dans l'obscurité, jeté les volets des galeries d'art et annulé d'innombrables concerts, expositions et dédicaces de livres. Selon la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), l'annulation des représentations publiques à elle seule a coûté aux auteurs environ 30% de leurs redevances dans le monde, tandis que l'industrie cinématographique mondiale a signalé une perte de revenus de 7 milliards de dollars.

En perturbant la vie culturelle, la pandémie du coronavirus a mis en lumière la volatilité chronique des industries créatives. De nombreux artistes peinent déjà à joindre les deux bouts, travaillant souvent à temps partiel sous des contrats précaires. Pour certains, les mesures de confinement introduites pour contenir l'épidémie ont été la goutte qui a fait déborder le vase.

Pourtant, en même temps, la Covid-19 a révélé l'immense potentiel de l'industrie. Outre leurs effets thérapeutiques, les arts et la culture sont également des moteurs de cohésion sociale, d'inclusion, d'innovation et de croissance, non seulement pour les petites entreprises mais pour l'économie dans son ensemble. Ce potentiel, dans une large mesure, reste encore inexploité.

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Outre leurs effets thérapeutiques, les arts et la culture sont également des moteurs de cohésion sociale, d'inclusion, d'innovation et de croissance, non seulement pour les petites entreprises mais pour l'économie dans son ensemble. (Photo, AFP/Archives)

Marisa Henderson, responsable du programme d'économie créative de la CNUCED à Genève, révèle qu'elle voit ce potentiel partout, de la calligraphie arabe qu'elle a vue à Dubaï, aux créateurs de bijoux qu'elle a rencontrés à Doha et aux femmes qu'elle a vues raconter des contes pour enfants dans les bibliothèques du Golfe.

« Les femmes ont toujours été le moteur de l'économie créative, le faisant sans même s'en rendre compte: la couture, par exemple, ou la conception d'un vêtement, ou la broderie et la narration d'histoires », a déclaré Henderson à Arab News.

C'est dans cet esprit que l'ONU a placé les femmes et les filles au cœur de sa résolution visant à faire de 2021 une Année internationale de l'économie créative pour le développement durable tout en reconnaissant la nécessité de promouvoir une croissance économique inclusive, de favoriser l'innovation et d'offrir des opportunités ainsi que l'autonomisation pour tous.

L'Indonésie était le principal auteur de la proposition, qui a été présentée par un groupe mondial de plus de 80 pays.

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Avec tant de défis mondiaux urgents à affronter, les arts se sont souvent retrouvés en bas de la hiérarchie. (Photo, AFP/Archives)

Marquant un tournant pour les industries créatives, la résolution 74/198 a désigné l'économie créative comme un outil important sur la voie de la réalisation des objectifs de développement durable des Nations Unies - un ensemble complet d'objectifs universels pour éradiquer la pauvreté sous toutes ses formes, protéger la planète et améliorer les vies des humains. Les 17 objectifs ont été adoptés par tous les États membres de l'ONU en 2015 dans le cadre du Programme 2030.

Avec tant de défis mondiaux urgents à affronter, les arts se sont souvent retrouvés en bas de la hiérarchie. Cela est en train de changer, cependant, en partie grâce aux progrès technologiques, qui ont chamboulé les anciennes catégories et définitions, donnant naissance à de nouvelles formes d'art jusque-là non définies, rendant les industries créatives plus accessibles au public et aux consommateurs, et plus rentables encore pour les investisseurs.

« Nous avons des produits dont nous n’avons jamais entendu parler auparavant », a affirmé Henderson. « La Musique 3D: comment pouvez-vous classifier cela dans les services de création? Comment pouvez -vous le compter et même le vendre?

« La technologie affecte la façon dont les artistes vendent des bijoux, des jouets, des objets d'artisanat, des peintures et des instruments de musique. Les arts visuels sont aussi des biens créatifs. Mais maintenant, ils sont vendus en ligne, donc un composant de service vient d’être ajouté ».

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EN CHIFFRES

L’Industrie créative

* 30 millions de personnes sont employées dans le monde entier dans les secteurs culturels et créatifs.

* 10% - La contribution projetée des secteurs au PIB mondial.

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Redéfinir les industries créatives et améliorer la manière dont les données sont collectées est une priorité absolue pour la CNUCED, alors que l'agence se prépare pour une année chargée.« Nous devons tout savoir pour comprendre de quoi nous parlons », a souligné Henderson.

« Ceci est important pour les décideurs et les gouvernements qui tentent, par exemple, de réglementer les téléchargements. Combien d'argent la plate-forme reçoit-elle par rapport à ce que reçoit la création elle-même? Cela se fait généralement via Google et Spotify, mais le gouvernement a pour rôle de le faciliter.

« En général, nous n'avons pas ce genre d'informations dans les pays en voie de                      développement ».

Le Programme d’économie créative de la CNUCED aide les pays en développement à maximiser les gains qu’ils tirent de ces industries afin de créer des emplois et réduire la pauvreté.

L’aide de l’agence dépend de la demande. Tandis que les pays mobilisent leurs propres fonds, ils viennent à la CNUCED avec leurs propres problèmes particuliers, recherchant les connaissances de l’agence des Nations Unies fondées sur les données pour les aider à créer un espace pour leurs industries créatives.

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Des danseurs de l'équipe palestinienne Jafra Dabke exécutent une danse traditionnelle de dabke tout en portant des gants en latex et des masques chirurgicaux pour les personnes confinées en raison d'un confinement à cause de la pandémie du coronavirus dans le village de Tarqumia au nord-ouest d'Hébron en Cisjordanie occupée, le 15 avril 2020 (Photo, AFP/Archives)

Henderson donne pour exemple la musique omanaise, qu'elle a récemment découverte.« C'était très traditionnel, mais il y avait aussi des éléments très modernes qui sont différents de ce que vous considérez comme de la musique arabe. J'ai dit: « Cette musique est aussi une industrie créative ». À Oman, ils ont tellement de potentiel, c'est absolument incroyable ».

La CNUCED aide les pays à identifier leurs soi-disant « fuites », là où résident leurs besoins spécifiques, mais aussi leur potentiel commercial: comment peuvent-ils attirer les investissements? Quels sont les instruments juridiques à mettre en place pour la mise en œuvre? Puis un dialogue national suit, impliquant les artistes et toutes les autres parties intéressées.

La CNUCED contribue également à l’élaboration d’un plan d’action, dont l’exécution repose sur la coopération entre différents ministères et organismes. « Nous nous assurons que l'infrastructure n'est pas imposée. Il doit en être un qui est créé pour leur bénéfice », a confirmé Henderson.

Si le principal problème dans les pays en voie de développement reste le manque d'infrastructures, les pays qui ont une stratégie, comme la Malaisie, ont du mal à la mettre en œuvre.

« Je comprends maintenant pourquoi cela est difficile. Ce n'est pas une industrie qui peut être gérée par un seul ministère. Pour les industries créatives, vous devez rassembler les ministères de la culture, du commerce, de la technologie, de la propriété intellectuelle et des affaires étrangères », a témoigné Henderson.

« La CNUCED considère l’économie créative comme un cercle. Ce n'est pas que de l'art. Vous devez utiliser ces industries pour attirer les investissements, avoir un cycle de production, créer des emplois et, espérons-le, pouvoir exporter. En un seul mot; c'est un cercle créatif ».

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Sherazade Mami, danseuse et interprète professionnelle tunisienne de 28 ans au théâtre de danse de Caracalla et professeur à l'école de danse de Caracalla, s'entraîne en portant un masque, sur le toit de son immeuble dans la banlieue de Dekwaneh à la périphérie est de Beyrouth, la capitale du Liban, le 4 avril 2020 (Photo, AFP/Archives)

Lors de la première Conférence mondiale sur l'économie créative à Bali en 2018, un groupe informel de gouvernements, de parties intéressées privées et d'ONG se sont réunis sous le surnom de « Les amis de l'économie créative », introduisant un mouvement naissant qui croit au partage d'expériences dans le cadre du moteur de l'économie créative.

Les Émirats arabes unis ont pris la parole à Bali tout en proposant d'accueillir la prochaine session, qui se déroulera en décembre.

« Les États arabes en général encourage vraiment cela », a souligné Henderson. « Les Émiratis se rendent compte qu'il y a beaucoup de choses, comme les jeux et les applications, qui ne sont pas nécessairement liées à la culture telle que nous y pensons, mais qui sont en fait des industries. D’après moi, le moteur, l'essence et le principal produit de ces industries est tout simplement la créativité.

« Les Émiratis se rendent compte que l'économie créative va au-delà de l'argent, voire de la culture. Il s'agit d’un vrai changement social. Ils ont compris avec certitude qu'en encourageant la créativité, ils apporteront des changements à tant de personnes dans la société, y compris les jeunes et les femmes ».

Henderson a ajouté: « Les Émiratis savent qu'ils peuvent tout simplement acheter des œuvres d'art très précieuses et les mettre dans un musée. Mais ils veulent quelque chose de différent: ils cherchent à inspirer les gens. Ils veulent intégrer la créativité dans leur culture dans le but de l'amener à un nouveau niveau.

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Un tableau d'un artiste palestinien lors d'une exposition intitulée « Corona and the art » (Corona et l’art) organisée par le Village des Arts & de l’artisant, un centre qui aide à promouvoir les artistes et leur travail dans une tentative de maintenir et de préserver le patrimoine palestinien, dans la ville de Gaza, le 12 novembre 2020 (Photo, AFP/Archives)

« Mais ils sont également très sages économiquement. Ils voient l'importance de l'économie créative en termes de croissance économique ».

Le programme d'activités afin de mettre en œuvre l'Année internationale de l'économie créative débute le 25 janvier. L'événement comprend le lancement d'un nouveau livre, co-préfacé par Henderson.

« Quoi de plus adéquat pour entrer dans une nouvelle ère qu'une focalisation dédiée sur la créativité et le rôle qu'elle peut jouer pour nous aider à réaliser le Programme de développement durable à l'horizon 2030? », a-t-elle signalé.

« Plus que jamais, nous avons besoin de pensée créative, d'innovation et de résolution de problèmes pour nous imaginer hors du sillon dans lequel nous nous sommes trouvés. Les industries créatives, qui sont la pierre angulaire de l'économie créative, sont à leur tour bien placées pour nous aider ».

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Israël dit avoir intercepté un tir de missile depuis le Yémen, revendiqué par les rebelles

Les rebelles Houthis, qui contrôlent de larges pans du Yémen, ont affirmé dans un communiqué avoir visé une base aérienne "à l'est de la région occupée de Haïfa, à l'aide d'un missile balistique hypersonique". (AFP)
Les rebelles Houthis, qui contrôlent de larges pans du Yémen, ont affirmé dans un communiqué avoir visé une base aérienne "à l'est de la région occupée de Haïfa, à l'aide d'un missile balistique hypersonique". (AFP)
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  • "A la suite de sirènes qui ont retenti il y a peu de temps dans plusieurs régions d'Israël, un missile lancé depuis le Yémen a été intercepté", a indiqué l'armée israélienne dans un bref communiqué sur Telegram
  • L'engin a été intercepté avant qu'il ne pénètre en territoire israélien, est-il précisé

JERUSALEM: Les forces armées israéliennes ont annoncé vendredi avoir intercepté un missile lancé à partir du Yémen, un tir revendiqué par les rebelles houthis, soutenus par l'Iran.

"A la suite de sirènes qui ont retenti il y a peu de temps dans plusieurs régions d'Israël, un missile lancé depuis le Yémen a été intercepté", a indiqué l'armée israélienne dans un bref communiqué sur Telegram.

L'engin a été intercepté avant qu'il ne pénètre en territoire israélien, est-il précisé.

Les rebelles Houthis, qui contrôlent de larges pans du Yémen, ont affirmé dans un communiqué avoir visé une base aérienne "à l'est de la région occupée de Haïfa, à l'aide d'un missile balistique hypersonique".

Ces insurgés soutenus par l'Iran ont mené des dizaines d'attaques avec des missiles et des drones contre Israël,  depuis le début de la guerre dans la bande de Gaza, déclenchée par l'attaque sans précédent du mouvement islamiste Hamas sur Israël le 7 octobre 2023, en affirmant agir en solidarité avec les Palestiniens.

Ils ont également pris pour cible des navires qu'ils estiment liés à Israël en mer Rouge, une zone essentielle pour le trafic maritime mondial.

Ces attaques avaient cessé avec la trêve entrée en vigueur le 19 janvier entre Israël et le Hamas, mais les Houthis les ont relancées après la reprise par Israël de son offensive à Gaza le 18 mars.

Les "opérations de soutien se poursuivront jusqu'à ce que l'agression contre Gaza cesse et que le siège soit levé", a déclaré leur porte-parole militaire, Yahya Saree, selon le communiqué.

Les Etats-Unis, alliés d'Israël, avaient commencé en janvier 2024 à frapper les positions des Houthis pour les contraindre à cesser leurs tirs. La campagne s'est intensifiée après le retour de Donald Trump à la Maison Blanche en janvier.

Le Pentagone a indiqué fin avril avoir frappé plus de 1.000 cibles au Yémen depuis mi-mars, tuant "des combattants et des dirigeants houthis".


Gaza : les opérations humanitaires «au bord de l'effondrement total», affirme la Croix-Rouge

Depuis le 2 mars aucune aide humanitaire n'est autorisée à entrer dans le territoire où vivent 2,4 millions de personnes, pour forcer, selon les autorités israéliennes, le mouvement islamiste Hamas à libérer les otages pris le 7-Octobre encore entre ses mains. (AFP)
Depuis le 2 mars aucune aide humanitaire n'est autorisée à entrer dans le territoire où vivent 2,4 millions de personnes, pour forcer, selon les autorités israéliennes, le mouvement islamiste Hamas à libérer les otages pris le 7-Octobre encore entre ses mains. (AFP)
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  • Les opérations humanitaires dans la bande de Gaza sont "au bord de l'effondrement total", a mis en garde le le Comité international de la Croix-Rouge vendredi, après deux mois de blocus total de toute entrée d'aide par Israël
  • "Si l’acheminement des secours ne reprend pas immédiatement, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) ne disposera pas des vivres, médicaments et produits de première nécessité dont il a besoin"

GENEVE: Les opérations humanitaires dans la bande de Gaza sont "au bord de l'effondrement total", a mis en garde le Comité international de la Croix-Rouge vendredi, après deux mois de blocus total de toute entrée d'aide par Israël.

"Si l'acheminement des secours ne reprend pas immédiatement, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) ne disposera pas des vivres, médicaments et produits de première nécessité dont il a besoin pour poursuivre bon nombre des programmes qu'il mène à Gaza", souligne le CICR  dans un communiqué.

"Les autorités doivent permettre l'entrée de l'aide humanitaire à Gaza. Les otages doivent être libérés. Les civils doivent être protégés. Il faut agir de toute urgence, faute de quoi Gaza s'enfoncera encore plus profondément dans un chaos dont aucun effort humanitaire ne pourra la sortir", met en garde l'organisation basée à Genève.

Depuis le 2 mars aucune aide humanitaire n'est autorisée à entrer dans le territoire où vivent 2,4 millions de personnes, pour forcer, selon les autorités israéliennes, le mouvement islamiste Hamas à libérer les otages pris le 7-Octobre encore entre ses mains.

"Pour les civils à Gaza, chaque jour est une lutte acharnée pour survivre aux dangers des combats et supporter les conséquences des déplacements incessants – tout cela sans pouvoir compter sur une aide humanitaire d'urgence", déclare Pascal Hundt, directeur adjoint des opérations du CICR, cité dans le communiqué.

"Nous ne pouvons pas permettre que cette situation déjà critique s'aggrave davantage", insiste-t-il.

Jeudi, Mike Ryan le directeur général adjoint de l'OMS avait dénoncé ce qui se passe à Gaza comme "une abomination".

Obligation d'aider 

Or si le blocus se poursuit, des programmes tels que les cuisines collectives du CICR – qui fournissent à de nombreuses personnes leur unique repas quotidien – ne pourront pas être maintenus plus de quelques semaines, précise le communiqué.

Depuis l'instauration du blocus, l'ONU ne cesse de dénoncer la catastrophe humanitaire et sanitaire et le risque de famine.

Le Programme alimentaire mondial a annoncé il y a quelques jours qu'il "avait épuisé tous ses stocks".

Le CICR rappelle aussi que conformément au droit international humanitaire, Israël a l'obligation, dans toute la mesure de ses moyens, de veiller à ce que les besoins essentiels de la population civile placée sous son contrôle soient satisfaits.

La situation à l'hôpital de campagne de l'organisation est également critique, certains médicaments et produits de santé étant épuisés.

"Les hôpitaux et autres structures de santé réorganisent leurs réserves et établissent des priorités pour pouvoir continuer à fonctionner. Sans réapprovisionnement rapide, ils risquent de ne plus être en mesure de prodiguer des soins vitaux aux patients", souligne le CICR, qui dénonce aussi "les attaques répétées qui empêchent le personnel de santé de faire son travail".

La guerre de représailles menée par Israël depuis le 7-Octobre a fait plus de 52.400 morts à Gaza, majoritairement des civils, selon les données du ministère de la Santé du gouvernement du Hamas, jugées fiables par l'ONU.

L'attaque du Hamas le 7 octobre 2023, sur le territoire israélien, a entraîné la mort de 1.218 personnes côté israélien, pour la plupart des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels.

Parmi les 251 personnes enlevées ce jour là, 58 sont toujours retenues à Gaza, dont 34 mortes, selon l'armée israélienne.

 


Israël bombarde près du palais du président syrien accusé de «génocide» des Druzes

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  • Des heurts à proximité et au sud de Damas entre combattants druzes et groupes armés liés au pouvoir sunnite du président Ahmad al-Chareh illustrent l'instabilité persistante en Syrie
  • L'ONU a exhorté "toutes les parties à faire preuve d'un maximum de retenue" et la diplomatie américaine a fustigé "les dernières violences et la rhétorique incendiaire" antidruzes "répréhensibles et inacceptables"

DAMAS: Israël a mis vendredi sa menace à exécution contre la Syrie en bombardant les abords du palais présidentiel à Damas après que le chef de la minorité druze, protégée par le pouvoir israélien, eut accusé le pouvoir du nouveau président syrien Ahmad al-Chareh de "génocide".

Le plus influent chef religieux druze en Syrie, cheikh Hikmat al-Hajrin, venait de dénoncer jeudi soir une "campagne génocidaire injustifiée" visant des "civils" de sa communauté, après des affrontements confessionnels en début de semaine qui ont fait plus de 100 morts selon une ONG.

Le chef religieux druze alors réclamé "une intervention immédiate de forces internationales" et Israël -- voisin de la Syrie avec laquelle il est en état de guerre et qui a pris fait et cause pour les Druzes -- avait aussitôt menacé de répondre "avec force" si Damas ne protégeait pas cette minorité religieuse.

Quelques heures après, à l'aube vendredi, "des avions de combat ont frappé les environs du palais" présidentiel à Damas, a annoncé l'armée israélienne sur Telegram.

"C'est un message clair envoyé au régime syrien. Nous ne permettrons pas que des forces (syriennes) soient dépêchées au sud de Damas ou menacent de quelque manière que ce soit la communauté druze", ont martelé dans un communiqué, publié en anglais par le journal Times of Israel, le Premier ministre Benjamin Netanyahu et son ministre de la Défense Israël Katz.

Des heurts à proximité et au sud de Damas entre combattants druzes et groupes armés liés au pouvoir sunnite du président Ahmad al-Chareh illustrent l'instabilité persistante en Syrie, près de cinq mois après le renversement de son prédécesseur Bachar al-Assad, issu de la minorité alaouite.

"Nous ne faisons plus confiance à une entité qui prétend être un gouvernement. (...) Un gouvernement ne tue pas son peuple en recourant à ses propres milices extrémistes, puis, après les massacres, en prétendant que ce sont des éléments incontrôlés", avait dénoncé le cheikh druze.

"Rhétorique incendiaire" 

L'ONU a exhorté "toutes les parties à faire preuve d'un maximum de retenue" et la diplomatie américaine a fustigé "les dernières violences et la rhétorique incendiaire" antidruzes "répréhensibles et inacceptables".

Des combats cette semaine à Jaramana et Sahnaya, où vivent des chrétiens et des Druzes, ainsi qu'à Soueïda, ville à majorité druze, ont réveillé le spectre des massacres qui avaient fait début mars plus de 1.700 morts, en grande majorité des membres de la minorité alaouite, dans l'ouest du pays.

Ces violences avaient été déclenchées par des attaques de militants pro-Assad contre les forces de sécurité du nouveau pouvoir.

Mercredi déjà, l'armée israélienne avait frappé près de Damas, en forme "d'avertissement" contre un "groupe extrémiste qui se préparait à attaquer la population druze de la ville de Sahnaya", selon M. Netanyahu.

Les Druzes sont une minorité de l'islam chiite. Ses membres sont répartis entre le Liban, la Syrie et Israël.

"Nous sommes une partie inaliénable de la Syrie", a souligné un porte-parole du rassemblement des autorités religieuses, chefs traditionnels et groupes armés druzes à Soueïda, ajoutant que la communauté rejetait "toute division" du pays.

Les combats en Syrie ont été déclenchés lundi soir par une attaque de groupes armés affiliés au pouvoir contre Jaramana, après la diffusion sur les réseaux sociaux d'un message audio attribué à un Druze et jugé blasphématoire à l'égard du prophète Mahomet.

L'AFP n'a pas pu vérifier l'authenticité du message.

Les autorités syriennes ont accusé des éléments échappant à son contrôle d'avoir provoqué les violences.

102 morts 

Selon un bilan de l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), ces affrontements ont fait 102 morts, dont 30 membres des forces de sécurité et combattants affiliés, 21 combattants druzes et 11 civils à Jaramana et Sahnaya. Dans la province de Soueïda, 40 combattants druzes ont péri, dont 35 dans une embuscade, d'après l'ONG.

A Jaramana, des accords entre représentants des Druzes et du pouvoir avaient permis de rétablir le calme mardi soir, de même mercredi soir à Sahnaya à 15 km au sud-ouest de Damas où des forces de sécurité ont été déployées.

Et le pouvoir syrien avait réaffirmé son "engagement ferme à protéger toutes les composantes du peuple syrien, y compris la communauté druze".

Dès la chute de Bachar al-Assad le 8 décembre, renversé par une coalition de factions rebelles islamistes dirigée par M. Chareh après plus de 13 ans de guerre civile, Israël a multiplié les gestes d'ouverture envers les Druzes, cherchant, selon l'analyste indépendant Michael Horowitz, à se ménager des alliés dans le sud syrien à un moment où l'avenir de ce pays reste incertain.