Loi immigration: après le psychodrame politique, le couperet constitutionnel

Le Conseil constitutionnel n'est pas "une chambre d'appel des choix du Parlement", a récemment mis en garde son président, l'ex-Premier ministre socialiste Laurent Fabius. (AFP)
Le Conseil constitutionnel n'est pas "une chambre d'appel des choix du Parlement", a récemment mis en garde son président, l'ex-Premier ministre socialiste Laurent Fabius. (AFP)
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Publié le Mardi 23 janvier 2024

Loi immigration: après le psychodrame politique, le couperet constitutionnel

  • Le vote des députés du Rassemblement national en faveur de la version finale du projet de loi et leur revendication d'une «victoire idéologique», ont ébranlé la macronie
  • Parmi les autres mesures contestées figurent aussi des durcissements des conditions du regroupement familial, comme l'allongement de la durée de résidence pour y prétendre, de 18 à 24 mois

PARIS: Un dernier round pour la loi immigration: un mois après son adoption chaotique au Parlement, le Conseil constitutionnel rend sa sentence jeudi sur ce texte décrié, avec l'espoir à gauche, et jusque dans le camp présidentiel, d'en voir une large partie censurée.

Restrictions du regroupement familial, de l'accès aux prestations sociales ou fin de l'automaticité du droit du sol: la liste est longue, selon certains juristes, des mesures pouvant être retoquées dans cette loi, encore fustigée dimanche par des dizaines de milliers de manifestants.

Les dispositions sur la sellette sont les plus controversées, réclamées par la droite et concédées par une majorité présidentielle réticente mais voulant éviter l'enlisement. Au prix d'une crise interne, qui a culminé avec l'étalage des états d'âmes de plusieurs ministres.

Le vote des députés du Rassemblement national (RN) en faveur de la version finale du projet de loi et leur revendication d'une "victoire idéologique", ont ébranlé la macronie. Où la censure des articles les plus corrosifs est dès lors attendue comme une échappatoire par certains.

Le Conseil constitutionnel n'est pas "une chambre d'appel des choix du Parlement", a récemment mis en garde son président, l'ex-Premier ministre socialiste Laurent Fabius.

Une façon de rappeler que l'institution "n'est pas là pour rattraper nos bêtises", interprète l'un des 27 députés du camp présidentiel qui ont voté contre la loi à l'Assemblée (face à 189 pour, et 32 abstentions).

«Préférence nationale»

Les neuf Sages appliqueront quoi qu'il en soit leurs critères habituels: ils retoqueront les "cavaliers législatifs", c'est-à-dire les ajouts jugés sans lien suffisant avec l'objet de la copie initiale du gouvernement. Et censureront les articles bafouant sur le fond les principes et valeurs constitutionnels.

Leur décision promet d'être longue: le texte est passé de 27 articles à 86, sous l'effet surtout des ajouts obtenus par Les Républicains (LR) au Sénat, puis entérinés en commission mixte paritaire (CMP) après le rejet du texte en première lecture à l'Assemblée nationale.

Emmanuel Macron, qui a lui-même saisi le Conseil constitutionnel, a demandé que le texte soit passé au peigne fin, sans pointer de mesure spécifique.

Mais plusieurs dizaines sont ciblées dans les saisines des députés et des sénateurs de gauche, et quatre mesures en particulier dans celle de la présidente macroniste de l'Assemblée Yaël Braun-Pivet, car jugées "cavalières" ou inconstitutionnelles, voire les deux.

Est notamment visée la durée de résidence exigée pour que des non-Européens puissent bénéficier de certaines prestations sociales, dont les allocations familiales, fixée à cinq ans pour ceux ne travaillant pas et 30 mois pour les autres.

Pour l'Aide personnalisée au logement (APL), ces deux seuils ont été fixés à cinq ans et 3 mois.

Une consécration de la "préférence nationale" chère au RN, se réjouit ce dernier et accuse la gauche. Un faux procès, se défend l'exécutif, soulignant qu'un tel délai de carence de 5 ans existe déjà pour toucher le RSA.

LR aux aguets 

Parmi les autres mesures contestées figurent aussi des durcissements des conditions du regroupement familial, comme l'allongement de la durée de résidence pour y prétendre, de 18 à 24 mois. Une violation du droit à une vie familiale normale et au principe d'égalité, estiment les requérants.

L'instauration de "quotas" fixés par le Parlement pour plafonner le nombre d'étrangers admis sur le territoire est aussi remise en cause. Ainsi que la caution demandée aux étudiants étrangers, ou encore la fin de l'automaticité de l'obtention de la nationalité française à la majorité pour les personnes nées en France de parents étrangers.

Le Conseil "est dans une situation politique complexe", observe la constitutionnaliste Anne-Charlène Bezzina. "Il sait que s'il censure beaucoup de choses, il arrange paradoxalement le camp présidentiel. Sa décision est donc, même s'il juge uniquement de la constitutionnalité des lois, éminemment politique".

Si des mesures sont retoquées sur le fond, "ce sera de la responsabilité du président de la République de proposer une réforme constitutionnelle pour atteindre les objectifs", a déjà lancé mercredi dernier Olivier Marleix, le président des députés LR.

Mais la réforme de la Constitution réclamée par LR, qui souhaite pouvoir déroger aux règles de l'UE, est exclue par la majorité, dénonçant un "Frexit".

A l'approche des élections européennes, le bras de fer avec la droite sur l'immigration promet donc de se poursuivre.


Fusillade à Rennes: les quatre suspects mis en examen et écroués

Selon les investigations menées par la DCOS de Rennes sous l'autorité du parquet JIRS de Rennes, les quatre gardés à vue "sont impliqués dans le trafic de produits stupéfiants organisé par un réseau d'individus originaires de la région parisienne sur la dalle Kennedy (à Villejean), depuis le mois de janvier". (AFP)
Selon les investigations menées par la DCOS de Rennes sous l'autorité du parquet JIRS de Rennes, les quatre gardés à vue "sont impliqués dans le trafic de produits stupéfiants organisé par un réseau d'individus originaires de la région parisienne sur la dalle Kennedy (à Villejean), depuis le mois de janvier". (AFP)
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  • La fusillade avait fait trois blessés par balle et un quatrième homme avait été percuté par la voiture des tireurs. Le pronostic vital de cette dernière victime touchée par le véhicule n'est plus engagé
  • Les quatre hommes sont déjà connus pour de multiples délits

RENNES: Les quatre hommes, âgés de 21 à 23 ans, suspectés d'avoir tiré à plusieurs reprises en pleine journée dans un quartier populaire de Rennes le 17 avril pour "reconquérir" un point de deal, ont été mis en examen et écroués, a annoncé mardi le parquet de Rennes.

Trois ont été mis en examen des chefs d'association de malfaiteurs et tentative de meurtre en bande organisée et encourent "une peine de réclusion criminelle à perpétuité", a annoncé Frédéric Teillet, procureur de la République de Rennes dans un communiqué.

Le quatrième a été mis en cause pour trafic de stupéfiants et association de malfaiteurs, soit une peine encourue de dix ans d'emprisonnement.

La fusillade avait fait trois blessés par balle et un quatrième homme avait été percuté par la voiture des tireurs. Le pronostic vital de cette dernière victime touchée par le véhicule n'est plus engagé, a indiqué M. Teillet mardi matin.

Les quatre hommes sont déjà connus pour de multiples délits.

Selon les investigations menées par la DCOS de Rennes sous l'autorité du parquet JIRS de Rennes, les quatre gardés à vue "sont impliqués dans le trafic de produits stupéfiants organisé par un réseau d'individus originaires de la région parisienne sur la dalle Kennedy (à Villejean), depuis le mois de janvier", d'après le magistrat.

Le 14 avril, "après plusieurs jours d’assauts violents, ce clan a été évincé par le groupe des Villejeannais, qui a repris possession du terrain qu’il estimait être le sien", explique le magistrat.

C'est dans ce contexte "de règlement de compte lié au narcotrafic que des tirs d'arme à feu ont fait trois victimes et qu'une quatrième a été pourchassée en voiture, renversée violemment et laissée à terre, le 17 avril", poursuit M. Teillet.

Deux des mis en cause sont originaires de Tours, l'un de Marseille et le quatrième de la région parisienne.

"Leur équipement (armes, vêtements, voiture volée…) et leur mode opératoire ont démontré leur détermination extrême à reconquérir par tous les moyens le point de deal, à la demande de leurs commanditaires, en éliminant physiquement leurs concurrents et en prenant le risque de blesser, en plein après-midi, toute personne se trouvant à proximité", a dit M. Teillet.


Macron attendu à La Réunion sur le chikungunya et les dégâts du cyclone Garance

 Après Mayotte, Emmanuel Macron est attendu mardi à La Réunion, département d'outre-mer à la plus forte croissance économique, sur l'épidémie de chikungunya et les dégâts provoqués par le cyclone Garance. (AFP)
 Après Mayotte, Emmanuel Macron est attendu mardi à La Réunion, département d'outre-mer à la plus forte croissance économique, sur l'épidémie de chikungunya et les dégâts provoqués par le cyclone Garance. (AFP)
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  • A Mayotte, il a annoncé lundi une enveloppe de plus de trois milliards d'euros sur six ans pour financer le plan de "refondation" du département le plus pauvre de France, meurtri par le cyclone Chido en décembre
  • Autre défi pour La Réunion, le passage du cyclone Garance, le 28 février, a généré près de 250 millions d'euros de dégâts, dont 150 pour le seul secteur agricole, selon de premiers bilans

SAINT-DENIS DE LA REUNION: Après Mayotte, Emmanuel Macron est attendu mardi à La Réunion, département d'outre-mer à la plus forte croissance économique, sur l'épidémie de chikungunya et les dégâts provoqués par le cyclone Garance.

Le chef de l'Etat, arrivé lundi soir sur l'île en provenance du département voisin de Mayotte, va aussi réaffirmer le "rôle stratégique de La Réunion dans la zone indo-pacifique", où la France aspire à se poser en puissance régionale au côté des Etats-Unis, de la Chine ou l'Inde.

Le président poursuit ainsi une tournée de cinq jours dans le sud-ouest de l'océan Indien qui le mènera aussi à Madagascar mercredi et l'île Maurice vendredi.

A Mayotte, il a annoncé lundi une enveloppe de plus de trois milliards d'euros sur six ans pour financer le plan de "refondation" du département le plus pauvre de France, meurtri par le cyclone Chido en décembre.

La Réunion est secoué par une épidémie de chikungunya, une maladie infectieuse transmise par le moustique tigre, qui a fait six morts depuis le début de l'année et touché potentiellement 100.000 personnes, soit un habitant sur neuf.

Emmanuel Macron sera informé des derniers développements de l'épidémie, qui a atteint son pic ces derniers jours, lors d'un échange avec l'Agence régionale de la santé.

Engorgements 

Les difficultés sur ce front restent palpables. Le directeur général du centre hospitalier de La Réunion, Lionel Calenge, a demandé l'envoi de renforts médicaux face au risque de saturation des centres de santé.

"Tous les jours depuis plusieurs semaines, on accueille entre 30 et 40 patients atteints de +chik+ sur nos deux services d'urgence", ce qui génère "vraiment une grosse tension sur nos capacités", a-t-il alerté dimanche.

Début avril, le CHU avait déclenché le plan blanc, dispositif qui permet de déprogrammer certaines opérations ou de rappeler des personnels en congés dans les hôpitaux.

Une campagne de vaccination a aussi été lancée le 7 avril. Les 40.000 premières doses du vaccin Ixchiq, le premier ayant obtenu une autorisation de mise sur le marché en Europe, sont destinées aux personnes de 65 ans et plus présentant des comorbidités. Elles peuvent se faire vacciner gratuitement.

Autre défi pour La Réunion, le passage du cyclone Garance, le 28 février, a généré près de 250 millions d'euros de dégâts, dont 150 pour le seul secteur agricole, selon de premiers bilans.

Déjà frappées par une sécheresse sévère, toutes les filières agricoles de l'île - la canne à sucre représentant 53% de la surface agricole - ont lourdement été impactées par les vents et les pluies de Garance, qui a fait cinq morts.

"Echelle régionale" 

A la même époque, l'an passé, le cyclone Bilal avait déjà mis à terre les productions de l'île, deux cyclones en deux ans qui témoignent de l'augmentation et de l'intensification de ces phénomènes météorologiques.

Le chef de l'Etat rencontrera dans la matinée des exploitants agricoles alors que l'île est autosuffisante aux trois-quarts.

La souveraineté alimentaire sera au coeur du cinquième sommet de la Commission de l'océan Indien jeudi à Madagascar.

La Réunion y est représentée au côté de Madagascar, Maurice, des Comores et des Seychelles mais pas Mayotte, les Comores s'opposant à l'intégration de l'archipel dans l'organisation en raison d'un contentieux colonial.

"Le président veut à travers cette visite illustrer le fait que l’échelle régionale c’est le moyen de mieux survivre, de mieux se préparer à affronter ces éléments climatiques", résume l'Elysée.

"Cet espace régional doit s’organiser avec l'ensemble de ses territoires et il y a un avenir commun à bâtir", assure la présidence française.

Emmanuel Macron fera aussi le point sur l'état de l'économie réunionnaise.

 


Macron présidera lundi un Conseil des ministres sur la « refondation » de l'archipel depuis Mayotte

(Photo AFP)
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  • Emmanuel Macron présentera un projet de loi programme très attendu sur la « refondation » de l'archipel, quatre mois après le passage dévastateur du cyclone Chido, a annoncé dimanche l'Élysée.
  • Ce texte, qui comprend un volet important de lutte contre l'immigration clandestine depuis les Comores, y sera présenté en vue d'une adoption par le Parlement d'ici l'été, a-t-on précisé.

PARIS : Emmanuel Macron présidera lundi un Conseil des ministres en visioconférence depuis Mayotte afin de présenter un projet de loi programme très attendu sur la « refondation » de l'archipel, quatre mois après le passage dévastateur du cyclone Chido, a annoncé dimanche l'Élysée.

Ce texte, qui comprend un volet important de lutte contre l'immigration clandestine depuis les Comores, y sera présenté en vue d'une adoption par le Parlement d'ici l'été, a-t-on précisé.

Une loi d'urgence, destinée à faciliter la reconstruction de Mayotte via des assouplissements des règles d'urbanisme et de commande publique, a déjà été adoptée en février.

La loi de refondation, beaucoup plus large, comprend des « mesures plus structurelles permettant le développement économique et social du territoire sur de nouvelles bases », selon le ministre des Outre-mer Manuel Valls.

Mayotte, le département le plus pauvre de France, est confronté à plusieurs défis majeurs : une forte pression migratoire, un habitat précaire avec de nombreux toits de tôle et bidonvilles, ainsi que des difficultés économiques et sociales.

Ce texte, attendu depuis plusieurs années par les élus mahorais, prévoit notamment un durcissement des conditions d'obtention du titre de séjour dans l'archipel, une aide au retour volontaire et la facilitation des évacuations d'habitats insalubres et illégaux.