PARIS: Depuis presque sept ans, Bruno Le Maire pilote l'économie française à travers les tempêtes sanitaire et inflationniste. Celui qui campe une macronie avec un cap à droite assumé a été reconduit et même renforcé au ministère de l'Economie, accueillant l'Energie dans son giron.
A ceux qui lui prêtaient des vues sur Matignon, où a finalement été nommé son ancien ministre délégué Gabriel Attal, le ministre français de l'Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique répétait aimer être à Bercy et vouloir y rester.
"J'ai encore plus d'énergie et d'enthousiasme qu'au premier jour. C'est le moment d'accélérer, d'aller au bout de cette transformation", a-t-il réagi jeudi auprès du Figaro, se réjouissant de l'arrivée de l'Energie dans son portefeuille ministériel.
Depuis 2017, il s'est imposé à la tête de ce super ministère qui a marqué sa résurrection politique après un passage à vide à droite dont il est un transfuge. Au point d'y battre le record de longévité à Bercy sous la Ve République - seul Valéry Giscard d'Estaing a fait plus il y a 50 ans, mais en tenant le portefeuille de manière discontinue.
Plus populaire dans l'opinion que la plupart des autres membres du gouvernement, Bruno Le Maire, 54 ans, a défendu ardemment la "transformation" du pays et les réformes.
Comme celle des retraites en 2023: ce poids lourd de la politique au regard bleu acier n'a cessé d'en marteler la nécessité, se posant en garant de la vertu budgétaire. Clivante aussi, sa proposition d'abaisser la durée d'indemnisation du chômage des plus de 55 ans.
Economies
Depuis qu'il dirige Bercy, Bruno Le Maire a déployé le programme économique, très pro-entreprises, du président, avec son cortège de baisses d'impôts et la loi Pacte - il en prévoit une deuxième cette année.
Rapidement, il s'affiche aussi en protecteur des ménages et des entreprises face aux chocs, l'épidémie de Covid-19 puis la crise du pouvoir d'achat.
Ce partisan d'un Etat moins dispendieux n'hésite pas à desserrer les cordons de la bourse et à mettre en oeuvre le "quoi qu'il en coûte". Mesures pour relancer l'économie, soutiens aux boulangers face à l'envolée de leurs factures d'énergie, mise sous pression de l'agroalimentaire pour faire baisser les prix... Bruno Le Maire est omniprésent. Jusqu'à agacer dans l'exécutif.
Mais ces dépenses à tout va ont un revers: la dette publique explose et dépasse pour la première fois les 3 000 milliards d'euros en 2023 (plus de 111% du PIB), et les déficits se creusent (plus de 9% du PIB en 2020, 4,9% attendus cette année), loin des clous européens et au point de faire figurer la France parmi les mauvais élèves de la zone euro.
Couplé à une conjoncture morose, un rebond des défaillances d'entreprises et un chômage qui repart à la hausse, le ministre est contraint de resserrer la vis et de laborieusement corriger le tir: le budget 2024 est placé sous le signe de milliards d'économies, comme probablement les suivants.
Un effort qui a jusqu'ici permis à la France d'échapper à une dégradation de sa note souveraine par l'influente agence de notation S&P Global Ratings.
Au gouvernement, ses relations avec les Premiers ministres successifs n'ont pas toujours été fluides, le patron de Bercy n'hésitant pas à afficher certains désaccords.
Quant au président Emmanuel Macron, qu'il a rejoint dès le soir de sa victoire en 2017, il se méfie de ce ministre qui préfère souvent jouer cavalier seul et à qui l'on prête régulièrement des ambitions présidentielles en 2027.
Bercy lui aura permis de renaître politiquement après son échec cuisant à la primaire de la droite fin 2016. Un choc dans le parcours jusque-là sans accroc de ce brillant élève des beaux quartiers, normalien et énarque, qui a "grandi dans les couloirs des cabinets" ministériels, comme il le dit lui-même.
C'est en 2007, sur les conseils d'un de ses mentors, Dominique de Villepin, dont il a été directeur de cabinet à Matignon, que ce catholique pratiquant s'était fait élire député pour la première fois, en Normandie.
Ce mélomane germanophile, qui se dit autant écrivain que politique, est père de quatre garçons et marié à une artiste peintre.