Jacques Delors, architecte de la construction européenne, est mort à 98 ans

Jacques Delors, ancien président de la Commission européenne et ministre socialiste français, quitte l'Elysée à Paris le 5 juillet 2007 (Photo, Reuters).
Jacques Delors, ancien président de la Commission européenne et ministre socialiste français, quitte l'Elysée à Paris le 5 juillet 2007 (Photo, Reuters).
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Publié le Jeudi 28 décembre 2023

Jacques Delors, architecte de la construction européenne, est mort à 98 ans

  • «Il est décédé ce matin (mercredi) à son domicile parisien dans son sommeil», a déclaré sa fille Martine Aubry
  • Emmanuel Macron a salué sur X un «inépuisable artisan de notre Europe»

PARIS: Apôtre inébranlable de la construction européenne, père de l'euro, espoir éphémère de la gauche française à la présidentielle de 1995, Jacques Delors est mort mercredi à l'âge de 98 ans.

L'ancien président de la Commission européenne est décédé, dans sa 99e année, "ce matin (mercredi) à son domicile parisien dans son sommeil", a annoncé à l'AFP sa fille Martine Aubry, maire socialiste de Lille.

Emmanuel Macron a salué sur X un "inépuisable artisan de notre Europe", un "homme d'État au destin français", le chancelier allemand Olaf Scholz un "visionnaire devenu un architecte de l'UE".

Sa disparition "créera une vive émotion dans toute l'Europe tant il aura contribué à la façonner", a réagi l'ex-président socialiste François Hollande.

Ancien ministre de l'Economie sous François Mitterrand (1981-1984), Jacques Delors avait douché les espoirs de la gauche en refusant de se présenter à l'élection présidentielle de 1995 alors qu'il était le grand favori des sondages.

Depuis Bruxelles où il restera à la tête de la Commission de 1985 à 1995, il a joué les architectes pour façonner les contours de l'Europe contemporaine: mise en place du marché unique, signature des  accords de Schengen, Acte unique européen, lancement du programme Erasmus d’échanges étudiants, réforme de la  politique agricole commune, mise en chantier de l'Union économique et monétaire qui aboutira à la création de l'euro...

"L'oeuvre de sa vie (...) a façonné des générations entières d'Européens, dont la mienne", a commenté Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne.

"Ses réussites furent nombreuses", a déclaré la présidente de la BCE, Christine Lagarde, citant "le chemin qu'il avait façonné vers la création d'une monnaie commune, l'euro".

Jusqu'au bout il aura défendu l'unité de l'Europe, appelant en mars 2020 les chefs d'Etat et de gouvernement de l'UE à plus de solidarité au moment où ces derniers s'écharpaient sur la réponse commune à apporter à la pandémie de Covid-19.

Fin 1994, son renoncement spectaculaire à candidater à l'élection présidentielle, annoncé après six mois de suspens en direct à la télévision devant 13 millions de téléspectateurs dans l'émission "7 sur 7" d'Anne Sinclair, avait stupéfait les Français.

"Je vais atteindre 70 ans, je travaille sans relâche depuis 50 ans et il est plus raisonnable, dans ces conditions, d'envisager un mode de vie plus équilibré entre la réflexion et l'action", avait-il déclaré, ses yeux bleus tombants face à la caméra.

Je ne dis pas que j'ai eu raison

"Je n'ai pas de regrets", mais "je ne dis pas que j'ai eu raison", avait-il commenté dans Le Point en 2021. "J'avais un souci d'indépendance trop grand, et je me sentais différent de ceux qui m'entouraient. Ma façon de faire de la politique n'était pas la même".

Sa carrière politique avait ensuite marqué le pas et c'est presque en simple militant que Jacques Delors avait poursuivi ses combats partir du milieu des années 90.

Avec ses centres de réflexion, "Club témoin" ou "Notre Europe" (devenu ensuite "Institut Jacques-Delors" et installé à Paris, Bruxelles et Berlin), il a plaidé jusqu'au bout pour un renforcement du fédéralisme européen, réclamant davantage d'"audace" à l'heure du Brexit et des attaques de "populistes de tout acabit".

Né à Paris le 20 juillet 1925 dans un milieu simple et catholique, Jacques Delors était passé du patronage de paroisse à la Jeunesse ouvrière chrétienne (JOC), à laquelle il reste lié toute sa vie.

Hommages européens à Jacques Delors, «bâtisseur» de l'Europe

Les dirigeants de l'Union européenne (UE), et certains responsables nationaux, ont salué mercredi soir en Jacques Delors, ancien président de la Commission européenne décédé à l'âge de 98 ans, un "bâtisseur" de l'Europe.

Ce fut "un visionnaire qui a rendu notre Europe plus forte" et dont "l'oeuvre (...) a façonné des générations entières d’Européens", a réagi sur X (ex-Twitter) l'actuelle présidente de la Commission, Ursula von der Leyen.

"L'oeuvre de sa vie est une Union européenne unie, dynamique et prospère (...) Honorons son héritage en renouvelant sans cesse notre Europe", a ajouté la responsable allemande.

Antony Blinken a lui aussi salué un "visionnaire". Il "a transformé l'Europe en servant inlassablement l'idée d'une Europe unie et libre", a ajouté le secrétaire d'Etat américain, soulignant continuer "à croire en cette vision et en la force de notre lien transatlantique".

Jacques Delors est "entré dans l'histoire comme l'un des bâtisseurs de notre Europe", a salué de son côté le président du Conseil européen, Charles Michel, en qualifiant M. Delors de "grand Français et grand Européen".

Il "a conduit la transformation de la Communauté économique européenne vers une véritable Union fondée sur des valeurs humanistes et appuyée sur un marché unique et une monnaie unique", a ajouté l'homme politique belge.

Depuis Bruxelles où il dirigea la Commission de 1985 à 1995, Jacques Delors a façonné les contours de l’Europe contemporaine : Acte unique européen et mise en place du marché unique, accords de Schengen, lancement du programme Erasmus d’échanges étudiants, mise en chantier de l'Union économique et monétaire qui aboutira à l'euro...

Un «géant» européen 

"Ses réussites furent nombreuses", a déclaré la présidente de la Banque centrale européenne (BCE), Christine Lagarde, citant "le chemin qu'il avait façonné vers la création d'une monnaie commune, l'euro".

La présidente du Parlement européen, l'Italienne Roberta Metsola, et le chef de la diplomatie de l'UE, l'Espagnol Josep Borrell, ont chacun salué en M. Delors un "géant".

"Des générations d’Européens continueront de bénéficier de son héritage", a estimé Mme Metsola. "Il entre ainsi dans le Panthéon des grands que l'Europe a produit et dont nous nous devons d'assumer l'héritage", a écrit M. Borrell.

De Paris, le président français Emmanuel Macron a rendu hommage à l'"inépuisable artisan de notre Europe" : "son engagement, son idéal et sa droiture nous inspireront toujours".

De Berlin, le chancelier allemand Olaf Scholz a salué un "visionnaire devenu un architecte de l'UE telle que nous la connaissons aujourd'hui".

"Il est de notre responsabilité de poursuivre aujourd'hui son travail pour le bien de l'Europe", a-t-il ajouté.

Parmi les autres dirigeants de pays européens, le Premier ministre belge Alexander De Croo a évoqué "un père fondateur".

"Son projet pour une union plus forte et sûre reste d´une énorme actualité pour l’Europe de demain", a poursuivi le responsable libéral.

Son homologue espagnol, le socialiste Pedro Sanchez, a écrit que M. Delors "a toujours cru en une Europe unie, ouverte et prospère. Il a travaillé pour faire, de ce que beaucoup pensaient impossible, une réalité".

"Sans lui, l’Europe ne serait pas ce qu’elle est aujourd’hui. Nous poursuivrons son héritage pour consolider les avancées et les progrès de l'Union", a-t-il assuré.

En Italie, c'est le chef de la diplomatie, Antonio Tajani, du parti Forza Italia, qui a réagi le premier, en déplorant sur X la disparition d'une "personnalité qui a montré, sur la base des valeurs chrétiennes, le chemin du renforcement de l’Europe".

L’ancien Premier ministre italien Enrico Letta, actuel président de l’Institut Jacques Delors, a lui rendu hommage à "la force de son autorité morale" et à "son combat pour l’intégration" européenne.

Il entre à la Banque de France, puis adhère à la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) et participe à la déconfessionnalisation du syndicat, qui donne naissance à la CFDT.

Cet admirateur de Pierre Mendès France avait attendu 1974 et l'âge de 49 ans pour s'encarter au Parti socialiste, dans l'espoir d'"être utile".

Deuxième gauche française

Du gaullisme social avec Jacques Chaban-Delmas à l'union de la gauche, puis au social-réalisme aux côtés de François Mitterrand, Jacques Delors a tracé les contours d'une deuxième gauche française.

"Je suis un social-démocrate", résumait-il dans Le Point.

A la tête des Finances publiques sous Mitterrand, il fut l'un des initiateurs du tournant de la rigueur à partir de 1982, évitant à la France de plonger dans l'inflation.

Jacques Delors s'est marié en 1948 avec une collègue partageant ses convictions syndicales et religieuses, Marie Lephaille, décédée en 2020. Ils auront deux enfants: Martine Aubry, qui naît en 1950, puis Jean-Paul, né en 1953 et emporté par une leucémie en 1982.


Agriculteurs: la Coordination rurale bloque toujours le port de Bordeaux

 La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
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  • La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place
  • Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine

BORDEAUX: La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais.

La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place.

Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine et auquel les agriculteurs comme la classe politique française s'opposent.

Il s'agit de la première visite de la ministre sur le terrain depuis le retour des paysans dans la rue, une mobilisation surtout marquée en fin de semaine par les actions des bonnets jaunes de la Coordination rurale.

A Bordeaux, ils bloquent ainsi les accès au port et au dépôt pétrolier DPA: des pneus, des câbles et un tracteur entravent l'entrée du site.

Sous une pluie battante, les agriculteurs s'abritent autour d'un feu et de deux barnums tanguant avec le vent. Une file de camions bloqués dont des camions citernes s'allonge aux abords.

Les manifestants ont tenté dans la matinée de joindre Annie Genevard, sans succès.

"On bloque tant que Mme Genevard et M. Barnier [Michel Barnier, Premier ministre] ne mettent pas en place des solutions pour la profession. Des choses structurelles, (...), on ne veut pas un peu d'argent aujourd'hui pour rentrer dans nos fermes, on veut des réformes pour vivre, avoir un salaire décent", a déclaré à l'AFP Aurélie Armand, directrice de la CR du Lot-et-Garonne.

"Le temps est avec nous parce que quand il pleut on ne peut pas travailler dans les fermes, donc c'est très bien", a-t-elle lancé, alors qu'une pluie battante balaye la Gironde avec le passage de la tempête Caetano.

Plus au sud, dans les Landes, des agriculteurs de la CR40 occupent toujours une centrale d'achat Leclerc à Mont-de-Marsan mais les autorités leur ont donné jusqu'à vendredi inclus pour libérer les lieux, a-t-on appris auprès de la préfecture.

Tassement du mouvement, avant une reprise 

La préfète du département a par ailleurs condamné "les dégradations commises par des membres de la Coordination rurale" mercredi soir sur des sites de la Mutualité sociale agricole (MSA), visée par des dépôts sauvages, et de la Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), ciblée par un incendie "volontairement déclenché" dans son enceinte.

Sur Europe1/Cnews, le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a redit que les agriculteurs avaient "parfaitement le droit de manifester", mais qu'il y avait "des lignes rouges" à ne pas dépasser: "pas d'enkystement", "pas de blocage".

A l'autre bout de la France, à Strasbourg, des membres de la CR se sont installés dans le centre avec une dizaine de tracteurs pour y distribuer 600 kilos de pommes aux passants.

"Nous, on propose un pacte avec le consommateur, c'est-à-dire lui fournir une alimentation de qualité en quantité suffisante et en contrepartie, le consommateur nous paye un prix correct", a souligné le président de la CR départementale, Paul Fritsch.

Les autorités constatent une "légère baisse" de la mobilisation à l'échelle du pays par rapport au début de la semaine, quand les syndicats majoritaires FNSEA et JA étaient aussi sur le terrain.

Ce nouvel épisode de manifestations agricoles intervient à quelques semaines d'élections professionnelles. La CR, qui préside aujourd'hui trois chambres d'agriculture, espère à cette occasion briser l'hégémonie de l'alliance FNSEA-JA et ravir "15 à 20 chambres" supplémentaires.

Le président de la FNSEA Arnaud Rousseau a annoncé mercredi que les prochaines manifestations emmenées par ses membres auraient lieu la semaine prochaine, "mardi, mercredi et jeudi", "pour dénoncer les entraves à l'agriculture".

FNSEA et JA avaient prévenu qu'ils se mobiliseraient jusqu'à la mi-décembre contre l'accord le Mercosur, contre les normes selon eux excessives et pour un meilleur revenu.

Troisième syndicat représentatif, la Confédération paysanne organise aussi des actions ponctuelles, contre les traités de libre-échange ou les installations énergétiques sur les terres agricoles.


Les députés approuvent en commission l'abrogation de la réforme des retraites

L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
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  • La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.
  • La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation.

PARIS : La gauche a remporté mercredi une première victoire dans son offensive pour abroger la très décriée réforme des retraites : sa proposition de ramener l'âge de départ de 64 à 62 ans a été adoptée en commission des Affaires sociales, avant son arrivée dans l'hémicycle le 28 novembre.

Le texte, présenté par le groupe LFI dans le cadre de sa niche parlementaire, a été approuvé par 35 voix (celles de la gauche et du Rassemblement national), contre 16 (venues des rangs du centre et de la droite).

La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.

Le Rassemblement national, qui avait présenté une proposition similaire fin octobre, mais que la gauche n'avait pas soutenue, a voté pour le texte de La France insoumise. « C'est le même que le nôtre et nous, nous ne sommes pas sectaires », a argumenté le député Thomas Ménagé.

La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation : celle-ci est ramenée de 43 à 42 annuités, ce qui revient à abroger également la réforme portée en 2013 par la ministre socialiste Marisol Touraine pendant le quinquennat de François Hollande.

Un amendement, présenté par les centristes du groupe Liot pour préserver la réforme Touraine, a été rejeté. Les socialistes, qui auraient préféré conserver cette réforme de 2013, ont décidé d'approuver le texte global malgré tout.

La gauche affirme qu'elle est en mesure de porter sa proposition d'abrogation jusqu'au bout : après l'examen du texte dans l'hémicycle la semaine prochaine, elle a déjà prévu de l'inscrire à l'ordre du jour du Sénat le 23 janvier, à l'occasion d'une niche communiste, puis en deuxième lecture à l'Assemblée nationale le 6 février, cette fois dans un créneau dédié aux écologistes.

Les représentants de la coalition gouvernementale ont mis en garde contre un texte « pas sérieux » ou « irresponsable ».

« Il faut être honnête vis-à-vis des Français : si cette réforme des retraites est abrogée, certes ils pourront partir à 60 ans, mais avec une retraite beaucoup plus basse », a ainsi argumenté la députée macroniste Stéphanie Rist.


Censure du gouvernement : Le Pen fait monter la pression avant sa rencontre avec Barnier

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
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  • "Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure"
  • Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget

PARIS: Marine Le Pen fait monter la pression sur Michel Barnier, avant leur rencontre lundi à Matignon : elle assure que son parti n'hésitera pas à censurer le gouvernement à la veille de Noël si "le pouvoir d'achat des Français est amputé" dans le projet de budget 2025.

"Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure", a affirmé mercredi la cheffe de file des députés du Rassemblement national sur RTL.

Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget de l'Etat.

Si le RN et la gauche votaient conjointement cette motion alors la coalition Barnier, fragile attelage entre LR et la macronie, serait renversée et le projet de budget rejeté.

Si elle n'a pas détaillé la liste précise de ses revendications, Marine Le Pen a en particulier jugé "inadmissible" la hausse envisagée par le gouvernement pour dégager trois milliards d'euros des taxes sur l'électricité, une mesure toutefois supprimée par l'Assemblée nationale en première lecture.

"Taper sur les retraités, c'est inadmissible", a-t-elle aussi affirmé, insatisfaite du compromis annoncé par le LR Laurent Wauquiez. Celui-ci prévoit d'augmenter les retraites de la moitié de l'inflation au 1er janvier, puis d'une deuxième moitié au 1er juillet pour les seules pensions sous le Smic.

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. Si elles étaient suivies, celles-ci pourraient empêcher Mme Le Pen de participer à une quatrième élection présidentielle.

Face à cette menace de censure, Michel Barnier va recevoir en début de semaine prochaine, un par un, l'ensemble des présidents de groupes parlementaires, à commencer par Marine Le Pen dès lundi matin.

Ce premier tête à tête, depuis son entrée à Matignon, suffira-t-il ?

"Et-ce que M. Barnier va respecter l’engagement qu’il a pris, que les groupes d’opposition puissent reconnaître dans son budget des éléments qui leur paraissent essentiels ?", s'est interrogée la cheffe de file des députés RN.

Les demandes de notre parti étaient "de ne pas alourdir la fiscalité sur les particuliers, de ne pas alourdir sur les entrepreneurs, de ne pas faire payer les retraités, de faire des économies structurelles sur les dépenses de fonctionnement de l'Etat", a-t-elle récapitulé. "Or nous n'avons pas été entendus, nous n'avons même pas été écoutés".

Poker menteur 

Alors qu'il a déjà lâché du lest sur les économies demandées aux collectivités locales, aux retraités et aux entreprises face aux critiques de sa propre majorité, le Premier ministre, confronté à la colère sociale des agriculteurs, des fonctionnaires ou des cheminots, a très peu de marge de manoeuvres.

"L'objectif est d'arriver à un équilibre entre les ambitions des groupes parlementaires et les impératifs de rigueur" budgétaire, répète Matignon, alors que le déficit public est attendu à 6,1% du PIB fin 2024 contre 4,4% prévu initialement.

L'exécutif agite, à destination du RN mais aussi des socialistes, la menace du chaos.

"Celui ou celle qui renversera le gouvernement privera le pays d'un budget et le précipitera dans le désordre et la chienlit", a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, sur CNews.

"Le pire pour le pouvoir d'achat des Français, ce serait une crise financière", a alerté de son côté sur LCI sa collègue Astrid Panosyan-Bouvet (Travail).

Une question demeure: le RN bluffe-t-il ?

"Si le gouvernement tombe, il faudra attendre juin pour qu'il y ait des élections législatives parce qu'il ne peut pas y avoir de dissolution pour le moment!", a semblé nuancer le porte-parole du RN Julien Audoul.

Dans tous les cas, ce jeu de poker menteur risque de durer jusque la veille de Noël, lorsque l'Assemblée nationale aura à se prononcer définitivement sur le projet de budget 2025 de l'Etat.

Le RN n'entend, en effet, pas déposer ou voter de motion de censure sur les deux autres textes (fin de gestion de 2024 et projet de budget de la Sécurité sociale) qui pourraient être adoptés par 49.3 avant.