BUREIJ: Un sac bourré d'affaires sur un fauteuil roulant, des piles de couvertures sur une charrette, un mince matelas sur le toit d'une voiture: des milliers de Palestiniens ont fui vendredi le centre de la bande de Gaza vers le sud après un ordre d'évacuation par l'armée israélienne.
Dans des publications sur ses réseaux en arabe au 77e jour de sa guerre contre le Hamas dans la bande de Gaza, l'armée israélienne a sommé les habitants du camp de réfugiés de Bureij (centre) à "partir immédiatement pour leur propre sécurité" vers Deir el-Balah, à sept kilomètres plus au sud.
"Ce n'est pas une vie: pas d'eau, pas de nourriture, rien", souffle Walaa Al-Medini, une mère de famille qui fait partie de ceux qui ont pris la route.
Blessée à la jambe par une frappe israélienne sur sa maison de Choujaiya dans la ville de Gaza, elle se déplace désormais en fauteuil roulant. Elle s'était réfugiée avec sa famille à Bureij après avoir fui Gaza-ville.
Selon les autorités du Hamas au pouvoir à Gaza, au moins 20.057 personnes, majoritairement des femmes, des enfants et des adolescents, ont été tuées à Gaza depuis le début de l'offensive de l'armée israélienne.
Celle-ci a été déclenchée par l'attaque le 7 octobre de commandos du Hamas sur le sol israélien, la plus meurtrière depuis la création de l'Etat en 1948, ayant fait environ 1.140 morts, en majorité des civils, d'après Israël.
"Ma fille est morte sur mes genoux et j'ai été secourue des décombres trois heures après la frappe", raconte Walaa Al-Medini à l'AFP.
"Tout ce qui nous entourait a été détruit", se lamente-t-elle.
Autour d'elle, dans une rue du camp de réfugiés de Bureij, ils sont nombreux à transporter balluchons et sacs à dos, à pousser des carrioles et des vélos ou à mener des ânes.
Sur une charrette, une cage à oiseaux jaune bringuebale entre un tas de couvertures et des sacs plastique.
«Pourquoi?»
Selon l'ONU, 1,9 millions des habitants de Gaza sont déplacés depuis le début de la guerre, soit 85% de la population.
La grande majorité s'est massée dans le sud du territoire, à la frontière avec l'Egypte, pour fuir les combats intenses entre Israël et le Hamas qui s'étaient d'abord concentrés dans le nord mais se sont étendus.
Partout, ils vivent dans des conditions très précaires. L'aide humanitaire arrive au compte-gouttes et Israël a coupé l'approvisionnement en électricité et en carburant.
"+Regardez-nous, regardez comment nous mourrons+, voilà mon message au monde. Pourquoi personne ne fait-il attention?", s'interroge Walaa Al-Medini.
Salem Youssef avait d'abord pris abri dans l'hôpital Al-Chifa de la ville de Gaza, pensant qu'il y serait en sécurité.
Mais l'armée israélienne y a lancé une grande opération, affirmant que le Hamas, qu'il souhaite "anéantir", y avait établi un centre de commandement.
"Maintenant ils nous tuent, ils tuent les petits enfants et prétendent viser des cibles" militaires, lance M. Youssef.
Après l'hôpital Al-Chifa, M. Youssef a pris la direction du sud et a posé ses maigres effets dans le camp de Nuseirat, proche de Bureij, pendant un mois et demi. Après quasi 80 jours de guerre, son prochain arrêt doit désormais être Rafah, ville à la pointe sud du micro-territoire, où de nombreux déplacés ont établi des camps de fortune.
Rafah n'est toutefois pas épargnée par les combats.
"Ils (les Israéliens) nous disent que c'est sûr mais il n'y a pas d'endroit sûr", dit M. Youssef. Résolu, il assure qu'il ne quittera "jamais (son) pays".